Un quatrième net-citoyen assassiné en moins de deux mois à Nuevo Laredo : “Utiliser Internet deviendrait-il suicidaire ?”

Le corps décapité d’un internaute mexicain a été retrouvé, le 9 novembre 2011, à Nuevo Laredo. Surnommé “Rascatripas” (littéralement le “gratte-tripes”) sur la Toile, l’internaute contribuait activement au site de dénonciation du crime organisé “Nuevo Laredo en vivo”, dont il était le modérateur. Un message placé à côté du cadavre de “Rascatripas”, dont les mains étaient liées, proclamait : “Ceci m’est arrivé pour ne pas avoir compris que je ne dois pas publier des informations sur les réseaux sociaux”. “Reporters sans frontières est profondément choquée par cet assassinat. La liste des net-citoyens victimes des cartels ne cesse de s’allonger, et la simple activité d’informer sur le Net devient presque suicidaire. Toute la société est concernée et l’enjeu de l’enquête qui s’annonce est désormais de garantir, à travers la lutte contre l’impunité, la sécurité de tout citoyen qui prend le risque d’informer sur la violence dont souffre le pays. Nous réclamons justice pour les internautes et les blogueurs au même titre que les nombreux journalistes mexicains assassinés ou disparus”, a déclaré l’organisation. Il s’agit du quatrième net-citoyen assassiné en moins de deux mois à Nuevo Laredo - ville frontalière connue pour sa dangerosité extrême - pour avoir dénoncé les activités des narcotrafiquants. Les infâmes mises en scène des crimes se répètent : le 27 octobre, le corps décapité de Maria Elisabeth Macias avait été découvert au même endroit que celui de “Rascatripas”, accompagné d’un message similaire, signé Z, pour le cartel des Zetas, très présent dans la région. Cette journaliste et blogueuse utilisait, elle aussi, les réseaux sociaux pour informer des activités du crime organisé dans la région. Le 13 septembre dernier, les corps torturés d’un homme et d’une femme, également dénonciateurs des activités des narcotrafiquants, avaient été retrouvés pendus à un pont. Face à l’autocensure de certains médias traditionnels, qui craignent des représailles, les net-citoyens mexicains se mobilisent sur le Net et les réseaux sociaux sur des sites comme Nuevo Laredo en Vivo ou le Blog del Narco. Les internautes se heurtent malheureusement à la violence des cartels, et ne peuvent pas toujours compter sur le soutien des autorités, alors que le bilan de l’offensive fédérale contre le narcotrafic continue de s’alourdir. Fin août, deux internautes avaient été arrêtés et accusés de “terrorisme” et “sabotage” pour avoir posté sur Twitter des alertes sur une possible attaque contre une école de Veracruz. Les charges ont finalement été levées et les deux net-citoyens ont été libérés, après un mois de détention. La guerre de la drogue se prolonge désormais sur la Toile : le groupe Anonymous, qui avait menacé de révéler des noms de personnes liées au cartel des Zetas, a dû faire machine arrière, le 5 novembre, après que les narcotrafiquants ont proposé de libérer un jeune internaute de Anonymous en échange du silence des “hacktivistes”. Le nom de l’internaute n’a pas été révélé pour sa propre sécurité.
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Updated on 20.01.2016