Un journaliste en détention provisoire depuis 15 mois

Le journaliste algérien Abdessami’ Abdelhaï a entamé le 5 novembre 2014 une grève de la faim pour protester contre sa détention sans jugement à la prison de Tébessa depuis le 18 août 2013. Reporters sans frontières exhorte les autorités algériennes à mettre en place un procès juste et équitable pour que le journaliste puisse se défendre.

Journaliste à la station régionale de la radio de Tébessa et correspondant local du quotidien arabophone Jaridati à l’époque, Abdessami’ Abdelhaï est accusé d’avoir facilité la fuite de son directeur de l’époque du journal, Hicham Aboud. Il a été arrêté par la police le 18 août 2013 et placé en garde à vue pendant plus de cinq jours selon son avocat, une durée non motivée qui dépasse la période légale de placement en garde à vue de 48 heures, et au cours de laquelle il aurait subi de mauvais traitements au sein de plusieurs services de sécurité. Cela fait désormais 15 mois que le journaliste algérien croupit en prison à Tébessa (600 km à l'est d'Alger) sans programmation d’audience pour le juger. Le 5 novembre 2014, Abdessami’ Abdelhaï, qui souffre de diabète, a entamé une grève de la faim après avoir essuyé un quatrième refus de demande de liberté provisoire émise par son avocat. Son dossier est depuis le 15 mai 2014 au niveau de la Cour suprême, et cette dernière doit se prononcer sur sa qualification en correctionnelle ou criminelle. Comme l’indique l’article 123 du code de procédure pénale algérien, la détention provisoire est une mesure exceptionnelle, et dans ce cas les strictes conditions de son application ne sont pas claires. “Une détention sans jugement de 15 mois viole les droits fondamentaux du journaliste, notamment son droit à la liberté et à un procès équitable. Nous demandons donc aux autorités algériennes de mettre immédiatement en place un procès pour assurer sa défense, dans le cas contraire le journaliste doit être libéré sur le champs”, déclare Lucie Morillon, directrice des programmes de Reporters sans frontières. Selon Hicham Aboud, plusieurs personnes ont été convoquées par la police au prétexte qu'ils avaient été en contact avec lui. Ce dernier est poursuivi depuis l’an dernier par les autorités pour deux affaires: il est accusé d’”atteinte à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale et au bon fonctionnement des institutions nationales” par ses déclarations à la presse étrangère sur la détérioration de la santé du président Bouteflika et est également accusé d’avoir quitté illégalement le territoire. Les autorités ont saisi en mai 2013 les deux quotidiens du directeur, Monjournal et Jaridati, suspendus depuis septembre 2013. Contacté par RSF, Hicham Aboud explique être sorti du territoire algérien le 10 août 2013 de manière légale avec son passeport, qui possède les cachets des polices des frontières algériennes et tunisiennes. Abdessami’ Abdelhaï avait bel et bien rencontré le rédacteur en chef avant que ce dernier ne sorte du pays mais cela ne justifie pas son arrestation, selon Hicham Aboud qui explique à RSF que toute cette affaire est politique et qu’en détenant Abdessami’ Abdelhai, les autorités cherchent à l’atteindre et le “salir”. A l’initiative de journalistes et activistes algériens, une pétition a été lancée fin octobre 2014, et a récolté plus de 430 signatures à ce jour, sur le site Avaaz pour demander la libération d’Abdessami’ Abdelhai au ministre de la Justice algérien. L’Algérie figure à la 121ème place sur 180 du Classement 2014 sur la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.
Publié le
Updated on 20.01.2016