Un journaliste détenu illégalement pour s’être intéressé de trop près à des affaires de corruption

Reporters sans frontières condamne fermement l’arrestation et le placement en détention du journaliste Sherwan Sherwani, libéré sous caution, six jours plus tard, le 25 avril 2012. “Cette détention est arbitraire et illégale au regard du code de la presse du Kurdistan (loi numéro 35). Les procédures engagées contre ce journaliste, qui a révélé des affaires de corruption, se résument à une logique de règlements de compte politiques. Nous demandons aux autorités de lever les charges qui pèsent contre Sherwan Sherwani et d’abandonner les poursuites judiciaires”, a déclaré l’organisation. Sherwan Sherwani, rédacteur en chef du mensuel Bashur Magazine, publié à Dohuk (au nord ouest du Kurdistan), connu pour ses enquêtes et articles sur des affaires de corruption au sein des cercles des dirigeants politiques de la région autonome du Kurdistan irakien (KRG), a été arrêté par la police, le 20 avril 2012, à Akre, localité périphérique à l’est de Dohuk, controllée par le Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Cette arrestation fait suite à une plainte déposée par la municipalité de la ville d’Akre, après la publication d’un article dans Bashur Magazine en mai 2011, dénonçant une affaire de corruption impliquant le responsable de la municipalité, qui se serait rendu coupable de détournement de fonds publics. Le journaliste avait fourni un certain nombre de preuves sur la culpabilité du potentat local. Au cours de ses six jours de détention, les membres des forces de sécurité du KDP l’ont transféré de Akre vers Erbil, où le journaliste s’est vu reprocher une ancienne interview réalisée avec un homme d’affaires kurde. L’interviewé assurait qu’un des frères de Massoud Barzani, président du KRG, lui avait extorqué la somme de 32 millions de dollars US. D’Erbil, le journaliste a été transféré à Pirmam (environ 7 kilomètres au nord-est d’Erbil) où réside la famille du président Barzani, avant d’être de nouveau envoyé à Duhok. Critiquer et révéler des scandales de corruption qui touchent de près ou de loin à la famille du président Barzani et au PDK, constituent une ligne rouge à ne pas franchir pour les journalistes. Suite à la pression du syndicat des journalistes et d’organisations non gouvernementales, le journaliste a été libéré après le versement d’une caution d’un million de dinars irakiens (soit près de 650 euros). A sa libération, le rédacteur en chef de Bashur Magazine a déclaré : “Je continuerai mon devoir de journaliste, en poursuivant mes enquêtes sur les dossiers de corruption, malgré les risques encourus”. Par ailleurs, Reporters sans frontières demande aux autorités du Kurdistan irakien de clarifier, dans la plus grande transparence, les motivations du refus de publication de l’ouvrage “Hell of Truth” d’Aso Jabar, qui relate des cas de violations qui auraient été commises par les autorités à l’encontre de journalistes, écrivains et activistes. Selon les déclarations de l’auteur au Kurdistan Tribune, le ministère de la Culture aurait refusé de délivrer une licence de publication en raison du contenu, accusant les autorités du KRG d’atteintes à la liberté de la presse. D’après ce même article, Aso Jabar aurait fui aux Etats-Unis.
Publié le
Updated on 20.01.2016