Un célèbre journaliste de Lagos assassiné au volant de sa voiture : la police ne doit négliger aucune piste

Reporters sans frontières appelle la police nigériane à ne négliger aucune piste dans l'enquête sur le meurtre, le 22 décembre 2006, de Godwin Agbroko, président du directoire éditorial du quotidien privé This Day, notamment après que la famille eut fait part de ses doutes sur la thèse du crime crapuleux. "Rien ne serait plus nocif qu'une enquête bâclée, ne donnant aucun résultat satisfaisant. Les investigations doivent être sérieuses et transparentes. Tous les doutes doivent être levés et tous les responsables de ce crime doivent être retrouvés et punis. Alors que le pays entre dans une période électorale déjà tendue, la police doit comprendre le choc ressenti par la communauté journalistique, qui considère les hommes tels que Godwin Agbroko comme ce que le Nigeria a fait naître de meilleur en termes de courage et de générosité", a déclaré Reporters sans frontières. Godwin Agbroko a été retrouvé mort au volant de sa voiture, peu après 22 heures, le 22 décembre, sur le bord d'une route menant au pont de Daleko, dans le quartier d'Isolo, à Lagos. Il venait de quitter les bureaux de son journal, situé dans le quartier Apapa. Son corps sans vie a été retrouvé baignant dans une mare de sang. La vitre de la portière côté conducteur était brisée. Le journaliste a été tué d'une balle dans la gorge. Sa ceinture de sécurité était attachée. La portière était verrouillée. L'air conditionné et la radio étaient allumés. Ses effets personnels n'ont pas été dérobés. La même nuit, trois policiers et deux passants ont été tués par balles dans le même quartier. La police a indiqué qu'elle privilégiait la thèse de l'homicide pour des motifs crapuleux. Son fils, Tobor Agbroko, a toutefois indiqué à la presse nigériane que sa famille penchait pour un "assassinat". "Il a dû être suivi depuis son bureau, a-t-il déclaré. (...) Il avait un téléphone d'une valeur de plusieurs milliers de nairas, on ne l'a pas touché. Son argent liquide, sa montre-bracelet et d'autres biens n'ont pas été touchés." Il a rejeté la thèse privilégiée par la police, estimant qu'on ne pouvait pas "prendre les gens pour des imbéciles en disant que les tueurs étaient des voleurs. Le tir était très professionnel, effectué dans la jugulaire. Il n'y a eu qu'un seul tir. On ne peut pas dire qu'il s'agissait d'une attaque crapuleuse. S'il avait été attaqué pour être volé, quelque chose aurait été emporté." Godwin Agbroko était un journaliste célèbre, qui signait régulièrement une chronique dans This Day. Ancien rédacteur en chef de plusieurs journaux sous la dictature militaire (1993-1999), il avait été détenu au moins deux fois, en 1995 et 1996. Emprisonné au centre de détention des renseignements militaires, du 18 décembre 1996 au 6 mai 1997, il n'avait pu voir son épouse qu'une seule fois en six mois. Depuis la restitution du pouvoir aux civils, en 1999, ce lauréat du prix PEN/Barbara Goldsmith 1997 avait continué à donner un éclairage ironique et sans complaisance de la vie politique. Sa dernière chronique, publiée le 19 décembre, était une satire des primaires au sein du parti People's Democratic Party (PDP, au pouvoir). Ce meurtre survient deux mois après celui d'Omololu Falobi, ancien journaliste du quotidien privé The Punch, fondateur et directeur exécutif de l'association Journalists Against AIDS (Journalistes contre le sida, JAAIDS). Ce journaliste a été assassiné dans des conditions similaires, le 5 octobre 2006 aux environs de 22 heures, alors qu'il venait de quitter le siège de son association située dans le quartier d'Ogba, à Lagos. L'insécurité est un problème majeur au Nigeria. Le 25 décembre 2006, le bureau régional du quotidien privé Vanguard à Onitsha (Etat d'Anambra, Sud-Est) a été attaqué par des voleurs, qui ont tué un assistant à la distribution, Ifeanyi Nnadi, avant de s'enfuir avec de l'argent et du matériel.
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Updated on 20.01.2016