Un an après le lancement du “programme national pour les droits de l'homme”, l’Égypte toujours championne de la répression contre les journalistes

Le journaliste Mohamed Said Fahmi en détention provisoire depuis Mai 2018

Depuis le lancement du programme national pour les droits de l'homme en septembre 2021, la répression systématique des journalistes par le gouvernement n'a pas cessé. Si huit professionnels des médias ont été libérés ces six derniers mois - le dernier ce mercredi 14 septembre - 22 sont toujours en prison. À moins qu'ils ne se soumettent à la mainmise des autorités sur le discours public, les journalistes continuent de faire l'objet d’un harcèlement judiciaire constant. 

“Le nombre de journalistes emprisonnés confirme que le programme national pour les droits de l'homme ne s’intéresse pas du tout à l'amélioration de la situation de la presse en Égypte, déclare le bureau Moyen-Orient de RSF. Huit journalistes ont bien été libérés, mais ces grâces individuelles ne résolvent pas les problèmes structurels qui continuent d'entraver le travail et la sécurité des journalistes.

Un an après que le président Abdel Fattah Al-Sissi s'est félicité devant les caméras du lancement du "programme national pour les droits de l'homme”, l'Égypte reste l'une des plus grandes prisons du monde pour les journalistes. 22 journalistes sont aujourd'hui en prison. Trois d’entre eux ont été arrêtés depuis l’annonce du président Al-Sissi le 11 Septembre 2021

Conçu par le ministère des Affaires étrangères, ce programme a, dès le départ, été décrit par les organisations de défense des droits de l'homme comme n'étant rien de plus qu'un coup de communication pour les gouvernements étrangers. Cela dans le but d'attirer des fonds pour une économie égyptienne en difficulté.

 

Emprisonnements 

Au niveau de la liberté de la presse, le gouvernement n'a entamé aucune  réforme, et c’est un climat général de peur qui domine au sein de la profession. Quand les autorités libèrent certains journalistes, c’est pour mieux en emprisonner d'autres. Trois autres professionnels des médias ont été arrêtés depuis l’annonce d’Abdel Fattah Al-Sissi : Mohammad Fawze Masaad, Safaa Al Korbiji, et Hala Fahmy, en détention provisoire respectivement depuis le 15 mai, le 20 avril et le 24 avril, sur la base d'accusations liées à leur travail journalistique. 

 

Le célèbre blogueur Alaa Abdel Fattah est emprisonné depuis le 29 septembre 2019 pour "appartenance à un groupe terroriste”, “diffusion de fausses informations” et “usage abusif des réseaux sociaux”. Sa détention continue à se prolonger. Depuis le 2 avril 2022, le journaliste a intensifié sa grève de la faim. Il risque désormais de mourir en prison. 

Arrestations

Au moins six autres journalistes ont été temporairement détenus et interrogés par la police depuis le 11 septembre 2021. Les dernières arrestations en date sont celles de la rédactrice en chef de Mada Masr, Lina Atallah, et de ses trois collègues, Rana Mamdouh, Sara Seif Eddin et Beesan Kassab le 7 septembre. Les quatre journalistes ont été libérées sous caution, mais après avoir été accusées “d'exploiter un site web sans licence” : une accusation qui pourrait entraîner des poursuites judiciaires. 

Multiplication des détentions provisoires

Au moins 13 des 22 journalistes emprisonnés sont en détention provisoire, dont Mohamed Said Fahmi, Abdel Nasser Salama, Hamdy Al-Zaeem, Bahaa Ed-Din Ibrahim, et Mustafa Al-Khateeb.

Le 29 août, la cour pénale a décidé de renouveler la détention du journaliste Tawfiq Ghanem, ancien rédacteur en chef d'Islam Online et d'Anadolu, emprisonné depuis le 21 mai 2021 pour "diffusion de fausses nouvelles" et "adhésion à un groupe interdit", et du journaliste d’Al Jazeera Rabie El-Sheikh

Les problèmes structurels subsistent

Les emprisonnements, les arrestations et les poursuites judiciaires démontrent que le programme ne s'attaque pas aux problèmes structurels qui affectent le paysage médiatique égyptien. Le pluralisme des médias demeure inexistant, la plupart des médias étant soumis au contrôle du gouvernement. Un phénomène que RSF avait déjà appelé "la sissification des médias". Plus de 500 sites web de médias sont inaccessibles en Égypte, y compris celui de RSF. Les journalistes indépendants y font régulièrement l'objet de harcèlement judiciaire ou de campagnes de dénigrement de la part des marionnettes des médias fidèles au gouvernement. 

 

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