Trois radios de Mogadiscio fermées en 24 heures : les autorités somaliennes doivent s'expliquer
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Reporters sans frontières demande au gouvernement fédéral de transition somalien de s'expliquer sur la fermeture arbitraire, en l'espace de deux jours, de trois radios indépendantes, au mépris de ses engagements et au risque de réduire au silence les derniers organes d'information de la capitale.
"Même en temps de guerre, les engagements pris par un gouvernement restent valables. Or, les autorités civiles somaliennes, signataires d'une charte garantissant la liberté de la presse, ont manifestement abdiqué devant les forces militaires, qui bafouent ouvertement les droits des journalistes de Mogadiscio. La population tenue dans l'ignorance, les médias un à un réduits au silence, leurs employés poussés à l'exil ou la clandestinité : les conséquences de cette vague autoritaire sont désastreuses", a déclaré l'organisation.
Au lendemain de la fermeture de la station indépendante Radio Shabelle, le 12 novembre 2007, les forces gouvernementales somaliennes ont fait violemment irruption dans les bureaux de deux autres radios privées de Mogadiscio, Radio Banadir et Radio Simba, leur ordonnant de cesser d'émettre. "Ils ont déclaré que l'ordre de fermer la station concernerait toutes les stations indépendantes à Mogadiscio", a déclaré Mustafa Haji, rédacteur en chef de Radio Simba, à l'Agence France-Presse (AFP).
Le gouvernement ne s'est pas publiquement exprimé sur ces opérations, menées alors que l'armée somalienne, appuyée par l'armée éthiopienne, a lancé une opération de ratissage du grand marché de Bakara, à la recherche d'insurgés islamistes et de caches d'armes.
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12.11.2007 - L'armée investit les locaux de Radio Shabelle et ordonne à la station de cesser d'émettre
Reporters sans frontières dénonce vigoureusement la fermeture arbitraire, le 12 novembre 2007, de la station privée Radio Shabelle par les forces de sécurité somaliennes, alors qu'une opération de police de grande envergure a commencé dans le marché de Bakara, visant des insurgés islamistes.
"Le mépris dont font preuve les autorités somaliennes envers les médias indépendants a franchi un nouveau palier, avec la fermeture de Radio Shabelle. Faire taire une des rares sources d'information dont bénéficient les habitants de la capitale équivaut à leur bander les yeux et à les laisser seuls face à la violence qui se déchaîne dans leurs quartiers. Le prétexte de la lutte contre l'insurrection islamiste ne peut pas servir à légitimer tous les abus, d'autant que le bâillonnement d'une radio laisse désormais toute la place aux rumeurs et à la confusion", a déclaré l'organisation.
Le 12 novembre aux alentours de 11 heures 30, une unité des forces de sécurité somaliennes commandée par trois officiers a fait irruption dans les locaux de Radio Shabelle à Mogadiscio, non loin du marché de Bakara. Les militaires ont ordonné la fermeture immédiate de la radio et conduit son directeur, Jafar Mohammed "Kukay", et son directeur des programmes, Abdirahman Yusuf, dit "Al-Adala", devant le commandement de l'armée. Les deux journalistes ont été libérés peu après, après avoir été informés que l'ordre de fermeture, pour lequel aucun motif ne leur a été fourni, provenait de hauts responsables du gouvernement.
Le 24 septembre, Jafar Mohammed "Kukay" avait été victime d'une tentative d'assassinat, lorsqu'un inconnu avait sorti un pistolet qu'il cachait sous sa chemise et tiré deux balles dans sa direction. Le journaliste n'avait pas été touché et l'agresseur était parvenu à prendre la fuite.
A partir du 18 septembre, la radio n'avait plus émis pendant plusieurs semaines, après qu'une unité mixte de la police et des services de renseignements avait ouvert le feu contre l'immeuble qui abrite ses studios. Les forces de sécurité suspectaient le bâtiment d'avoir servi à une attaque à la grenade contre une patrouille. Le gouvernement fédéral de transition avait par la suite qualifié cette attaque d'"accident". Depuis, une grande partie du personnel de la station a quitté la ville pour se mettre en sécurité.
Moins d'un mois plus tard, le 19 octobre 2007, le directeur du groupe de presse Shabelle, Bashir Nur Gedi, avait été assassiné par un commando de jeunes hommes devant son domicile, dans le sud de la capitale.
Le 12 novembre, les forces gouvernementales somaliennes, appuyées par l'armée éthiopienne, ont lancé une vaste opération de ratissage maison par maison, dans le quartier du grand marché de Bakara, à la recherche d'armes et d'insurgés islamistes.
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Updated on
20.01.2016