Taoufik Ben Brik reste en prison après le report de son procès en appel : “La mauvaise farce continue”

La farce judiciaire continue pour le journaliste et écrivain Taoufik Ben Brik. A l’issue de sa nouvelle comparution, le 23 janvier 2010, pour “violence, outrage aux bonnes mœurs et dégradation volontaire du bien d’autrui” la cour d’appel de Tunis a renvoyé le verdict au 30 janvier prochain. La juridiction a en même temps rejeté la demande de libération déposée par sa famille. En repoussant sa décision tout en refusant une remise en liberté, la justice tunisienne démontre que le seul but poursuivi est d’étouffer une voix dissidente. Rym Nasraoui, qui accuse Taoufik Ben Brik de l’avoir agressée, était absente comme en première instance et aucun témoin n’a déposé. Devant cette parodie de justice, les diplomaties occidentales, et notamment française, vont-elles se taire plus longtemps ? Le sort de Taoufik Ben Brik, injustement emprisonné et malade, doit les mobiliser. “Les méthodes n’ont pas changé, mais au moins, les avocats ont pu faire la preuve que ce dossier ne tient pas, ni sur fond ni sur la forme”, a déclaré à Reporters sans frontières Azza Zarrad, la femme du journaliste. “Taoufik n’a, par exemple, jamais été arrêté. Il s’est présenté de lui-même à la police. Il n’a jamais été confronté aux témoins de cette prétendue ‘agression’. Cette procédure est falsifiée mais il le maintienne en prison.” Incarcéré le 29 octobre 2009, après la publication d’articles critiques envers le régime du président Ben-Ali par deux médias français, Le Nouvel Observateur et le site Mediapart, Taoufik Ben Brik avait été condamné à six mois de prison le 26 novembre 2009. Trois jours plus tard, il était transféré vers la prison de Siliana, à 130 kilomètres de la capitale. Une mesure d’éloignement portée tardivement à la connaissance de sa famille et de ses avocats. La famille et la plaignante avaient l’une et l’autre interjeté appel de la première condamnation. “Le procès s’annonçait mal. J’ai été interdit d’assister à l’audience”, nous a confié Jalel Zoghlami, le frère du journaliste. Prétextant des “consignes”, la police secrète a limité l’accès de la famille à cinq personnes, en violation de la loi. Parmi les défenseurs de Taoufik Ben Brik, Léa Forestier, avocate au barreau de Paris et assistante de maître William Bourdon, ainsi que sa consœur Sabrina Goldman, représentante de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), ont été admises au sein du tribunal. “Taoufik s’est bien défendu et a réussi à démontrer le caractère totalement fabriqué des accusations portées contre lui”, a également témoigné auprès de Reporters sans frontières Mokhtar Trifi, avocat et président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme. Suspendu lui aussi à un procès en appel, le journaliste en ligne et activiste des droits de l’homme, Zouhaïer Makhlouf - incarcéré en octobre 2009 et condamné en décembre suivant après la publication d’un reportage sur des nuisances industrielles - sera fixé sur son sort le 3 février prochain. Le jugement de deuxième instance devait être rendu le 20 janvier et la peine du journaliste avait légalement pris fin deux jours plus tôt. Les autorités judiciaires ont pourtant rejeté la demande de remise en liberté déposée par ses défenseurs. Il est donc maintenu en détention en toute illégalité.
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Updated on 20.01.2016