Suspension d’un journal réformateur par le gouvernement d'Hassan Rohani
Organisation :
Rporters sans frontières condamne la décision prise, le 28 octobre 2013, par la Commission d'autorisation et de surveillance de la presse, l'organe de censure du ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, de suspendre le quotidien réformateur Bahar. Le journal a été suspendu pour un article publié dans son numéro 23 octobre 2013, considéré comme une "insulte envers des textes sacrés de l'islam". L’organisation dénonce également les lourdes condamnations prononcées contre Mahnaz Mohammadi, journaliste documentaire et Pegah Ahangarani, blogueuse et actrice, respectivement condamnées à cinq ans et dix-huit mois de prison ferme.
« Malgré les promesses électorales du président Hassan Rohani, un conservateur modéré, la suspension du quotidien réformateur Bahar par un organe dépendant du ministère de la Culture et de l'Orientation islamique montre que la priorité du régime en terme d’ouverture est d’atténuer les tensions avec communauté internationale et non de diminuer la répression contre les libertés et les acteurs de l'information», a déploré Reporters sans frontières.
Le 28 octobre 2013, la Commission d’autorisation et de surveillance de la presse, dirigée par le ministère de la Culture et de l’Orientation islamique, a ordonné la suspension du quotidien Bahar en application de l’article 12 du code de la presse. Le ministre de la Culture et de l’Orientation islamique a confirmé cette suspension en accusant le journal de “falsification de l’histoire” et “tentative de créer des divergences entre religieux dans le pays”. L'article incriminé, publié dans le numéro du 23 octobre 2013 du journal était intitulé «Ali le premier Imam de chiites était un leader religieux avant d’être un leader politique ». Dans son numéro du lendemain, le journal a publié plusieurs droits de réponse et s’est excusé pour cette “faute grave”. Il a même suspendu sa publication pour une durée indeterminée. Pour autant, les médias proches des extrémistes et le Guide suprême Ali Khamenei continuent de faire campagne pour la fermeture du journal. Ils interpètent cet article comme une critique contre leur Guide suprême.
Les 23 et 28 octobre 2013, Mahnaz Mohammadi, journaliste documentariste et la jeune actrice et blogueuse, Pegah Ahangarani ont été informées de leurs condamnations à cinq ans et 18 mois de prison par la 28e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran.
Mahnaz Mohammadi avait déjà été arrêtée, le 26 juin 2011 et le 29 juillet 2009 et passé à chaque fois un mois dans la prison d’Evin avant d’être libérée sous caution. Depuis, elle a fait l’objet de fortes pressions, étant plusieurs fois convoquée et interrogée par les agents du ministère des Renseignements. Pegah Ahangarani, quant à elle, a été arrêtée à son domicile par des agents du ministère des Renseignements, le 10 juillet 2011, à Téhéran avant d’être libérée provisoirement, le 27 juillet 2011, suite au versement d’une caution, de 100 millions de Tomans (soit 75 000 euros).
Selon le dernier rapport d'Ahmed Shaheed, rapporteur spécial des Nations unies chargé d'examiner la situation des droits de l'homme en Iran, "la situation des droits de l'Homme dans la République islamique d'Iran continue de soulever les inquiétudes, ne montrant aucun signe d'amélioration dans les domaines précédemment pointés (..) notamment le nombre d'exécutions dans le pays et les atteintes à la liberté d'expression." Les autorités iraniennes ont estimé que ce rapport "décrit la situation des droits de l'Homme en Iran de manière totalement injuste, et avec des motivations politiques". Elles interdisent toujours au rapporteur de visiter le pays.
La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Marzieh Afkham, avait déclaré dans un communiqué diffusé par la télévision et radio d'Etat que l’Iran ne permettra pas que "de tels rapports partiaux deviennent la mesure par rapport à laquelle on juge la situation des droits de l'Homme en Iran". En insistant sur la non reconnaissance du rapporteur spécial de l'ONU par son pays.
“Reporters sans frontières somme les autorités iraniennes d’opérer une réelle rupture avec la politique d'Ahmadinejad, de collaborer sans condition avec les Nations unies et de faciliter la visite du rapporteur spécial. La communauté internationale doit faire pression sur les autorités iraniennes pour qu’elles se soumettent aux prérogatives du rapporteur spécial”, a ajouté Reporters sans frontières.
Reporters sans frontières est vivement préoccupée par la situation de deux journalistes kurdes, Khosro et Masoud Kourdpour, directeur et collaborateur du site d’information Mokeryan. Leur procès a pris fin hier dans la ville de Mahabad. Ces journalistes ont été accusés d’être des “mohareb “ (ennemis de Dieu), d’”actions et publicité” contre le régime, et de publication d’informations sur la situation des prisonniers et des droits de l’homme. Ces accusations sont, en vertu de la loi iranienne, passibles de la peine capitale. Arrêtés début mars 2013, ils ont été mis en examen par la 2e chambre du tribunal de Mahamabad (ouest du pays) après 111 jours de détention illégale par les services des Renseignements.
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Updated on
20.01.2016