Surveillance : RSF soutient ADN, victime des pressions des autorités marocaines
Ironie de la situation. Alors que les journalistes et militants des droits de l’homme victimes de surveillance seraient fondés à porter plainte contre le viol de leurs correspondances privées, c’est le ministère de l’Intérieur qui dépose plainte contre un rapport publié par Privacy International et l’Association des droits numériques, qui dénonce les pratiques de surveillance des autorités marocaines.
"Alors que la répression contre les journalistes se durcit au Maroc, cette plainte n’a qu’un seul objectif : intimider ceux que la surveillance n’aurait pas encore réduit à l’autocensure et au silence", déclare Grégoire Pouget, responsable du bureau Nouveaux médias. "La protection des sources, corollaire nécessaire à la liberté de l’information, ne peut en aucun cas être garantie dans un pays où de telles pratiques ont cours. RSF appelle les autorités marocaines à retirer leur plainte et à cesser leur intimidation à l’encontre de journalistes."A travers quatre témoignages de journalistes victimes de surveillance d’Etat, ce rapport détaille les conséquences néfastes de la surveillance sur le travail des journalistes. Ali Anouzla, journaliste et “héros de l’information”, relate ses nombreuses expériences de surveillance, des écoutes téléphoniques aux piratages de ses comptes Facebook. Les net-citoyens Hisham Almiraat, Samia Errazzouki et Yassir Kazar, anciens membres de Mamfakinch (“On ne lâche rien” en arabe, un magazine en ligne créé en 2011 pour couvrir le mouvement du 20 février au Maroc), ont eux été ciblés par un logiciel espion développé et commercialisé par Hacking Team, une société listée “Ennemi d’Internet” par RSF en 2013 Le rapport rappelle que les autorités marocaines ont fait l’acquisition d’un système de surveillance généralisée, Eagle, le même que celui utilisé par Khadafi pour surveiller la population libyenne. Ce système, capable d’intercepter les emails et de traquer journalistes et dissidents sur les réseaux sociaux, a été développé et installée par une société française, Amesys, également nommée “Ennemi d’Internet”. Le Maroc est classé 130e sur 180 au classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières.