Soudan du Sud : l’enquête attendue de longue date sur l’assassinat du journaliste Christopher Allen doit être indépendante et transparente

La république du Soudan du Sud a annoncé la formation d’une commission d’enquête “concernant la mort tragique du journaliste Christopher Allen”. Après six ans de plaidoyer, Reporters sans frontières (RSF) se félicite de cette initiative, mais demande instamment aux autorités du pays de mener une enquête solide, indépendante et transparente, conforme aux normes internationales, et qui rende justice à la famille de Christopher Allen.

Christopher Allen, un journaliste indépendant à la double nationalité américaine et britannique, a été abattu de plusieurs balles alors qu’il couvrait un affrontement à Kaya, près de la frontière entre le Soudan du Sud et l’Ouganda, le 26 août 2017. Il suivait les forces rebelles depuis trois semaines. Il n’avait sur lui qu’un appareil photo et était âgé de 26 ans au moment de son assassinat. Les informations disponibles démontrent que des crimes de guerre ont été commis du fait du ciblage délibéré de Christopher Allen et du traitement réservé à son corps après sa mort, qui a notamment été photographié comme un trophée. 

RSF appelle le gouvernement du Soudan du Sud à fournir à la commission toutes les ressources nécessaires, y compris le temps nécessaire pour mener une enquête crédible. Compte tenu de la citoyenneté américaine du journaliste, le gouvernement des États-Unis devrait offrir sa propre assistance technique. 

Si le fait que le gouvernement du Soudan du Sud accepte la responsabilité de mener une enquête est une évolution bienvenue, RSF est vivement préoccupée par la courte durée du mandat de la commission d'enquête, qui est de 15 jours – à compter du 29 septembre, alors que l’annonce n’a été faite que le 2 octobre. Or, un délai aussi bref ne permettrait pas une enquête digne de ce nom. 

RSF exprime également son inquiétude quant à la capacité de la commission à demeurer impartiale. L’annonce de l’enquête a été signée par Martin Elia Lomuro, un ministre sanctionné par le gouvernement américain parce qu’il aurait “étendu ou prolongé le conflit au Soudan du Sud, ou entravé la réconciliation, ou les pourparlers ou processus de paix”. D’autres membres du comité sont étroitement liés aux dirigeants de l’armée du pays.

“L’annonce de l’ouverture d’une enquête, si longtemps attendue, est l’un des développements les plus importants depuis plus de six ans que RSF fait campagne pour que justice soit rendue à Christopher Allen. Mais le combat pour la justice est loin d’être terminé. Nous suivrons de près ce processus et continuerons d’exiger une enquête véritablement approfondie et transparente, qui amènera les responsables du meurtre devant la justice pénale. Christopher et sa famille ne méritent pas moins.

Clayton Weimers
Directeur du bureau de RSF aux États-Unis

Ces six dernières années, RSF a travaillé avec la famille de Christopher Allen dans le cadre d’une campagne mondiale pour que justice soit rendue pour son assassinat, appelant à plusieurs reprises le gouvernement du Soudan du Sud à ouvrir une enquête et à rendre justice. Cette campagne a régulièrement porté l’affaire auprès des deux gouvernements du journaliste – le Royaume-Uni et les États-Unis –, y compris auprès de hauts fonctionnaires de la Maison-Blanche, du ministère de la Justice et du département d’État, tant de l’administration Trump que de l’administration Biden. RSF salue les récentes déclarations communes des ambassades des États-Unis et du Royaume-Uni au Soudan du Sud appelant à une enquête crédible sur la mort de Christopher Allen. 

Le Soudan du Sud se situe au 118e rang sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023.

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