Slovaquie : RSF appelle l’ancien premier ministre Robert Fico à cesser de légitimer le harcèlement des journalistes

Après avoir couvert un débat auquel participaient l’ancien Premier ministre Robert Fico et un youtuber jugé “extrémiste”, le journaliste slovaque du site d’information Aktuality.sk, Matej Pribelsky, a été la cible d’attaques en ligne. Reporters sans frontières (RSF) condamne son harcèlement et appelle Robert Fico à en faire autant.

Je ne peux plus (..) supporter [les journalistes, nldr], il est temps de commencer à les battre”. “Je lui ferai sauter les dents de la gueule.” Ces deux appels à la violence font partie des centaines de commentaires et messages haineux adressés au journaliste slovaque du site d’information Aktuality.sk, Matej Pribelsky. Son tort ? Avoir couvert un débat, diffusé en ligne le 11 juin dernier, auquel participaient l’ancien Premier ministre Robert Fico et le youtuber slovaque Daniel Bombic, plus connu sous le pseudonyme de Danny Kollar. Dans son article, le journaliste qualifiait le youtuber, domicilié au Royaume-Uni, “d’extrémiste” et rappelait que les autorités slovaques avaient émis trois mandats d’arrêts internationaux à son encontre qui seraient liés aux faits de harcèlement en ligne et d’extrémisme. Daniel Bombic avait alors réagi en demandant à ses followers sur les réseaux sociaux de “transmettre” au journaliste d’Aktuality.sk leurs “commentaires et impressions” et en promettant que “le règlement de comptes viendra[it]”. 

Accepter de participer à un débat avec un instigateur présumé de harcèlement contre des journalistes et refuser systématiquement de condamner ces attaques revient à les légitimer. Nous appelons l’ancien Premier ministre Robert Fico à dénoncer fermement les appels à la violence contre le journaliste Matej Pribelsky. En tant que responsable politique, il doit tirer toutes les leçons de l’assassinat, sous son mandat passé, du journaliste Jan Kuciak, qui avait eu lieu suite à des propos violents de sa part à l’encontre des professionnels des médias slovaques.

Pavol Szalai
Responsable du bureau UE-Balkans de RSF

Selon le média Zive.sk, Daniel Bombic ferait l’objet de poursuites en Slovaquie pour des crimes d’extrémisme et de harcèlement en ligne. Le youtuber jette régulièrement en pâture les journalistes slovaques de premier plan, comme Monika Todova, Vladimir Snidl ou encore Zuzana Kovacic-Hanzelova, qui sont ensuite harcelés en ligne. 

L’ancien premier ministre Robert Fico, chef du parti Smer, actuellement en tête des sondages pour les élections législatives prévues en septembre 2023, est également habitué à jeter l'opprobre sur les journalistes de son pays. 

En février dernier, il avait notamment promis de “pourchasser” le directeur général du média public RTVS, suite au refus de la rédaction de permettre à son parti de remplacer à la dernière minute son représentant dans une émission politique. L’animatrice de l’émission, Marta Janckarova, avait immédiatement reçu des menaces de mort de la part d’internautes et avait dû être placée sous protection policière. 

En 2022, Robert Fico avait déjà qualifié plusieurs journalistes d’investigation, couvrant des affaires de corruption, d’agir à la façon d’un “groupe criminel organisé” pour “détruire l’État”. 

Le phénomène de harcèlement verbal online et offline, alimenté par les propos virulents de responsables politiques slovaques comme Robert Fico, constitue la première menace contre les professionnels des médias en Slovaquie, selon une récente enquête du nouveau mécanisme de sécurité des journalistes, Safe.Journalism.skmis en place en 2023 par le média et l’ONG, Centre d’investigation de Jan Kuciak, avec le soutien de RSF. Harcelé, le journaliste Matej Pribelsky a saisi de son cas le Safe.Journalism.sk qui a ensuite alerté RSF. 

La Slovaquie se situe à la 17e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.  

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