RSF invite les États membres du Conseil des droits de l’Homme à voter ce rapport, qui peut et doit être un premier pas vers la mise en place de mécanismes internationaux et régionaux contraignants. Pour la première fois, la communauté internationale se saisit de la problématique de la surveillance d’Internet. RSF accueille avec d’autant plus d’espoir une telle initiative que l’organisation s’est saisie de ce thème depuis près de dix ans (lire à ce sujet la note de RSF "
entreprises et droits de l'homme" - anglais - ). RSF a effectivement dénoncé à plusieurs reprises les agissements des États et entreprises en matière de surveillance des populations, notamment lors de la publication de son
rapport spécial surveillance du 12 mars 2013 (journée mondiale contre la cyber-censure).
Ce rapport souligne qu’aucun État n’échappe actuellement aux dérives sécuritaires liées à ce type de surveillance. Frank LaRue montre que l’utilisation d'outils technologiques permettant d’espionner les citoyens n’est pas l’apanage des États autoritaires. Il évoque notamment les lois sur le terrorisme, la sécurité nationale ou la lutte contre la grande criminalité, en vigueur dans bon nombre de démocraties, qui autorisent la cyber-surveillance et pistent des “cibles vulnérables”, parmi lesquelles les journalistes. (Paragraphe 52 : "
Journalists are also particularly vulnerable to becoming targets of communications surveillance because of their reliance on online communication".)
Le Rapporteur spécial souligne que la “violation des droits humains” que représente la surveillance d’Internet a un impact négatif sur les journalistes (paragraphe 51).
Évoquant l’utilisation des données personnelles et le respect de la vie privée, il estime que dans le cas des journalistes ou de leurs sources, l’effet de la surveillance de leurs communications se révèle désastreux (paragraphes 26 et 52).
Ce document souligne également la nécessité d'
adapter des législations souvent obsolètes (paragraphe 50) et/ou imprécises, de
créer un délit sanctionnant la surveillance illicite et d’instaurer un
contrôle juridictionnel (para 54) de ces pratiques, notamment la collecte et conservation des données personnelles. Il préconise également d'informer et sensibiliser les citoyens et utilisateurs. Comme RSF dans son rapport
spécial surveillance, le Rapporteur spécial prend très au sérieux la menace que représentent les "nouvelles formes de surveillance" (paragraphe 62) telles que les techniques d’intrusion offensives (comme les
trojans) ou l’interception légale.
Reporter sans frontières salue le rappel lancé par
Frank La Rue à la responsabilité des États. Ces derniers ont non seulement l’obligation de respecter les droits mais aussi et surtout de les protéger (paragraphe 76). L’organisation s’accorde, en outre, avec ses recommandations concernant le secteur privé.
"States must take measures to prevent the commercialization of surveillance technologies, paying particular attention to researche, development, trade, export and use of these technologies considering their ability to facilitate systematic human rights violations." (paragraphe 97)
En effet, l’organisation estime que de telles recommandations engagent non seulement les États, mais également leurs acteurs privés (intermédiaires techniques, entreprises du Web, fabricants et exportateurs de matériel de surveillance). RSF a d’ailleurs demandé la
mise en place de sanctions des entreprises compromises dans activités de surveillance nuisibles à la liberté d’informer.
Reporters sans frontières confirme,à cet égard, la tendance observée dans ce rapport par M. La Rue : "
the burden of such policy is transferred to private intermediaries" (paragraphe 46). L’organisation a souvent dénoncé le pouvoir grandissant et les dérives du secteur privé en matière de surveillance.