RSF exige une enquête indépendante après la mort du reporter indien Sulabh Srivastava

Correspondant pour la chaîne d’information ABP News dans l’Etat d'Uttar Pradesh, le journaliste a été retrouvé mort, le corps couvert de blessures. Face à l’impéritie de la police locale, Reporters sans frontières (RSF) demande au gouvernement central indien l’intervention d’une équipe d’investigation indépendante.

Le corps de Sulabh Srivastava a été retrouvé sans vie hier soir, dimanche 13 juin, au bord d’une route du district de Pratapgarh, dans l’Uttar Pradesh, en Inde du nord. C’est vers 21 h 45 qu’il aurait été découvert, selon les informations avancées par l’officier de police chargé de l’enquête. Avant même les conclusions de l’autopsie, celui-ci a classé l’affaire comme une accident de la route - le journaliste ayant apparemment percuté un poteau électrique alors qu’il roulait à deux-roues sous la pluie.


Une version vivement contestée par les membres de sa famille, interrogés par le site d’information Newsclick. Selon les informations qu’ils ont pu recueillir, c’est vers 22 h 30 que Sulabh Srivastava a été vu la dernière fois par des confrères, alors qu’il revenait d’un reportage dans la localité de Kotwali Lalganj - soit près d’une heure après que la police a prétendument découvert son corps. Surtout, le cadavre du reporter a été retrouvé couvert de blessures, et sa chemise déchirée - deux éléments qui contredisent clairement la version d’un simple accident routier.


Autre élément troublant, la veille même de sa mort, Sulabh Srivastava a adressé une lettre au bureau du directeur général de la police de la ville de Prayagraj, en date du 12 juin. Il y dénonce les menaces dont il était la cible depuis quelques jours, après qu’il a publié, le 9 juin, une enquête sur le site de la chaîne ABP News, le média qui l’employait, à propos des agissements de la mafia locale de contrebande d’alcool, et de ses complicités au sein de certains membres de la police. Le journaliste explique dans la lettre que, depuis cette date, il a remarqué qu’il était constamment suivi.


Errements inadmissibles


“Il est extrêmement choquant de constater que la police de Pratapgarh tente de classer la mort de Sulabh Srivastava en accident de la route en dépit de l’accumulation d’éléments qui permet d’ores et déjà de conclure à un assassinat, déclare le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. Compte tenu des errements inadmissibles de l’enquête préliminaire par l'administration de l’Uttar Pradesh, nous appelons le ministre de l’Intérieur indien, Amit Shah, à diligenter immédiatement une équipe d’investigation indépendante. L’impunité des crimes commis contre les journalistes dans cet État doit cesser.”


Il y a un an, le 19 juin 2020, le reporter Shubham Mani Tripathi a été tué de six balles en banlieue de Lucknow, la capitale de l’Uttar Pradesh. Comme RSF l’avait alors révélé, ce journaliste avait, peu peu avant le drame, fait part de ses craintes d’être assassiné en raison d’enquêtes qu’il menait sur des cas d’expropriations illégales en lien avec la mafia du sable. L’enquête sur son assassinat est aujourd’hui au point mort.


L’Inde se situe à la 142e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2021 par RSF.

Publié le
Updated on 14.06.2021