RSF et ses partenaires demandent au tribunal du Monténégro l’acquittement définitif du journaliste Jovo Martinović
Reporters sans frontières (RSF) et sept autres organisations de défense de la liberté de la presse demandent l’acquittement de Jovo Martinović. Dans une déclaration commune datée du 5 octobre 2020, les ONG estiment qu’une nouvelle condamnation du journaliste monténégrin porterait atteinte à la liberté des médias dans le pays et serait incompatible avec l’adhésion du Monténégro à l’UE.
Le Monténégro va-t-il choisir l’Union européenne ou l’emprisonnement d’un grand journaliste ?
Le 8 octobre 2020 sera prononcé le verdict du nouveau procès du journaliste monténégrin Jovo Martinović. En amont de cette décision, nous, les organisations soussignées, appelons la Haute Cour du Monténégro à tenir pleinement compte des preuves accablantes de l’innocence du reporter et à l’acquitter.
Arrêté il y a cinq ans alors qu’il enquêtait sur le trafic d’armes dans les Balkans, le journaliste d’investigation Jovo Martinović a, depuis, fait l’objet d’une persécution judiciaire alors qu’il aurait dû bénéficier d’une protection. Privé du droit à un procès équitable, il a passé 15 mois en détention provisoire avant d’être condamné, en janvier 2019, à 18 mois de prison pour trafic de cannabis et association de malfaiteurs par la Haute Cour du Monténégro. Le verdict, sur lequel pesaient des soupçons de pressions politiques, a finalement été annulé par la Cour d’appel du Monténégro, qui concluait, en octobre 2019, que la Cour de première instance avait échoué à expliquer les faits et à présenter les preuves justifiant une condamnation du journaliste.
Spécialiste de l’enquête sur le crime organisé, Jovo Martinović a travaillé pour de grands médias internationaux comme The Economist, Financial Times, NPR et la BBC. En 2018, il a reçu le prestigieux prix Peter Mackler pour un journalisme courageux et éthique, qu’il n’a pu accepter en personne en raison d’une interdiction de voyager liée à son procès.
Nous sommes convaincus que Jovo Martinović, qui avait pris contact avec des réseaux criminels dans un but exclusivement journalistique, est innocent.
Le 8 octobre, la Haute Cour du Monténégro qui a condamné le reporter aura désormais l’opportunité de l’acquitter. La responsabilité qui pèse sur les juges est lourde : le renouvellement de la condamnation de Martinović porterait atteinte à la liberté des médias dans le pays, et serait en conséquence incompatible avec l’adhésion du Monténégro à l’Union européenne, pour laquelle l'indépendance et le pluralisme des médias sont une condition sine qua non. Ces dix dernières années, aucun autre journaliste d’un Etat membre de l’UE, d’un pays candidat ou d’un potentiel candidat à l’adhésion à l’UE - à l'exception de la Turquie - n’a passé autant de temps en prison pour avoir simplement fait son travail.
Nous appelons les juges à défendre la liberté des médias et les droits de l'homme au Monténégro, et à acquitter Jovo Martinović.
---
Reporters Sans Frontières (RSF)
European Centre for Press and Media Freedom (ECPMF)
Fédération européenne des journalistes (EFJ)
International Press Institute (IPI)
ARTICLE 19
Center for Investigative Journalism of Montenegro (CIN-CG)
Osservatorio Balcani Caucaso Transeuropa (OBCT)
Fédération internationale des journalistes (IFJ)