RSF appelle le Premier ministre malaisien Najib Razak à respecter la liberté de la presse

Reporters sans frontières (RSF) s’inquiète de l'accélération de la politique de censure des autorités malaisiennes alors que plusieurs scandales politiques entachent la vie politique du pays. Deux journalistes australiens de la chaîne de télévision ABC ont été brièvement arrêtés et pourraient être poursuivis simplement pour avoir approché le Premier ministre. Parallèlement, le site d’information The Malaysian Insider a annoncé mettre la clé sous la porte, peu après avoir fait l’objet d’un blocage.

Auraient-ils commis un crime de lèse-majesté ? Les deux reporters australiens Linton Besser et Louie Eroglu ont été arrêté dans les rues de Kuching, sur l’île de Bornéo, le 12 mars dernier, peu de temps après avoir approché le Premier ministre Najib Razak. Relâchés le lendemain, les deux journalistes qui travaillaient pour le programme d’investigation "Four Corners", ont vu leurs passeports brièvement confisqués. Les autorités leur auraient interdit de quitter le territoire en attendant de savoir s’ils feront l’objet de poursuites judiciaires. Selon la police locale, les reporters auraient violé le « périmètre de sécurité et tenté, agressivement, d’approcher le Premier ministre», dans le but de l’interroger sur l’ « affaire Althantuya », extrêmement sensible et ayant déjà fait l’objet de censure à multiples reprises dans le passé. (cf arrestation du blogueur Raja Petra Kamarudin) The Malaysian Insider, site d’information et propriété du groupe The Edge Media Group, a quant à lui annoncé sa fermeture le 14 mars 2016, après la perte de revenus consécutive au blocage du site par les autorités. « Le Malaysian Insider a souffert du blocage à un moment où le marché publicitaire était déjà en baisse. C’est un jour triste car la Malaisie a besoin de plus de portails d’information fournissant un point de vue sans vernis sur notre nation » a déclaré le rédacteur en chef Jahabar Sadiq à Reporters sans frontières. Le 25 février dernier, la Malaysian Communications and Multimedia Commission (MCMC) avait annoncé avoir procédé au blocage du site « sur la base de plaintes du public, invoquant la violation par le média de la section 233 de la loi sur les Communications et le Multimedia de 1998, concernant “l’usage impropre de services de réseaux” ». Le communiqué de presse de la MCMC mettait en garde les médias contre toute publication d’ « informations non vérifiées ». « Dire que la censure est croissante en Malaisie est un euphémisme, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. Avec Sarawak Report, Asia Sentinel, Medium et d’autres sites d’information parfois victimes de censure temporaire, c’est toute la presse indépendante et critique qui est visée. Cela ne peut continuer éternellement. La communauté internationale doit réagir concrètement et ne pas se limiter à des déclarations. Les États-Unis doivent conditionner l’instauration du Trans Pacific Partnership au respect des libertés démocratiques et en premier lieu de la liberté de l’information et de la presse. » Pour répondre à la censure du gouvernement malaisien, Reporters sans frontières a entrepris le déblocage du site d’information Sarawak Report , interdit d’accès depuis sa couverture d’une affaire de corruption impliquant le Premier ministre. En utilisant la méthode « Collateral Freedom », technique employée par Greatfire.org afin de débloquer des sites censurés en Chine, l’organisation a pu rendre Sarawak Report accessible à l’adresse suivante : https://swk.global.ssl.fastly.net/. RSF prévoit d’étendre la liste des sites débloqués et de prolonger cette opération aussi longtemps que ses ressources lui permettront d’assumer le coût des serveurs et de la bande passante consommée par les visiteurs. Pour en savoir plus sur Collateral Freedom et consulter la liste des sites débloqués à l’occasion de la Journée Internationale contre la cyber-censure, rendez vous ici : https://12mars.rsf.org/2016-fr/#sites La Malaisie occupe la 147e place sur 180 pays du Classement mondial pour la liberté de la presse 2015 établi par Reporters sans frontières.
Publié le
Updated on 16.02.2022