Reporters sans frontières soulagée de l'abandon des poursuites contre les 44 journalistes du Daily News

L'Etat a abandonné ses poursuites contre les 44 journalistes du Daily News qui devaient comparaître le 12 octobre 2005 devant un tribunal de Harare pour « défaut d'accréditation ». Les autorités leur reprochaient d'avoir travaillé sans la licence de la Commission des médias et de l'information (MIC), l'autorité de régulation des médias étroitement contrôlée par le pouvoir. Le 12 octobre, les 44 journalistes et l'avocate qui les représente, Beatrice Mtetwa, se sont rendus à la cour, mais aucun des fonctionnaires, y compris le magistrat en charge du dossier, n'était au courant de la tenue de l'audition. Selon le directeur de la société qui publie le Daily News, l'Associated Newspapers of Zimbabwe (ANZ), « le bureau de l'avocat général ne peut continuer les poursuites parce que l'affaire tombe après l'acquittement de Jakachira. L'Etat est trop embarrassé pour avancer dans l'instruction, alors ils ont décidé de laisser l'affaire mourir lentement de sa mort naturelle ». Kelvin Jakachira, le premier journaliste du Daily News à avoir été inculpé pour défaut d'accréditation et violation de la loi liberticide sur l'information de 2002, avait été acquitté le 31 août 2005. -------------------------------------------------------------------------- 02.09.2005 Acquittement de Kelvin Jakachira : une première victoire sur l'une des lois les plus liberticides au monde Kelvin Jakachira, premier journaliste du Daily News à avoir été poursuivi pour violation de la loi sur l'information par le gouvernement zimbabwéen, a été acquitté le 31 août 2005, au terme d'un procès qui laissait craindre une condamnation qui aurait été le début d'une vague d'arrestations de ses confrères du quotidien interdit. Le journaliste était poursuivi pour avoir exercé son métier avant que la Commission des médias et de l'information (MIC), étroitement contrôlée par le pouvoir, lui ait accordé une accréditation. Dans son verdict, la juge Priscilla Chigumira s'est appuyée sur l'article 82 de la loi sur la presse, dite Access to Information and Protection of Privacy Act (AIPPA), selon lequel un journaliste a le droit d'exercer son métier dans l'intervalle entre sa demande d'accréditation et la décision de la MIC. « Nous saluons une décision juste et une victoire sur l'une des lois les plus liberticides au monde, a déclaré Reporters sans frontières. Nous voulons adresser nos félicitations à toute l'équipe du Daily News, et notamment à Kelvin Jakachira et ses 44 confrères, qui ont fait front en attendant ce verdict. Toutefois, ce succès n'est qu'un grain de sable dans l'immense machine à réprimer mise en place par Robert Mugabe. Avec le Daily News et les journalistes indépendants du Zimbabwe, nous restons mobilisés. » ------------------ 30.08.2005 - Verdict attendu contre un journaliste du Daily News : Reporters sans frontières extrêmement inquiète devant ce qui pourrait constituer un grave précédent Reporters sans frontières exprime son « extrême inquiétude » à la veille du verdict du procès pour défaut d'accréditation intenté par le gouvernement zimbabwéen contre Kelvin Jakachira, journaliste du Daily News. Le journaliste risque une peine de deux ans de prison. Cette sentence pourrait être suivie d'une vague d'arrestations et de condamnations iniques pour ses 44 confrères du célèbre quotidien interdit. « Le gouvernement de Robert Mugabe veut évidemment nuire à tous ceux qu'il déteste, a déclaré Reporters sans frontières. Il reste pourtant une chance de rendre justice aux journalistes du Daily News : que la justice zimbabwéenne sauve l'honneur en affirmant son indépendance et un esprit d'équité. Il n'y a pas d'alternative à l'acquittement de Kelvin Jakachira. Dans le cas contraire, il sera indispensable que les autorités qui négocient avec Robert Mugabe une sortie de crise pour le Zimbabwe, au premier plan desquelles le Fonds monétaire international (FMI) et l'Afrique du Sud, ajoutent l'affaire des journalistes du Daily News à leurs exigences. » Kelvin Jakachira, reporter du Daily News, a été traîné en justice par le gouvernement du Zimbabwe, sous prétexte qu'il avait travaillé sans avoir été accrédité par la Commission des médias et de l'information (MIC), aux ordres du pouvoir. Les 44 autres journalistes employés par le quotidien et son supplément hebdomadaire The Daily News on Sunday sont poursuivis pour les mêmes charges et doivent comparaître collectivement le 12 octobre 2005 devant un tribunal de Harare. Aux termes de la loi sur la presse, dite Access to Information and Protection of Privacy Act (AIPPA), les journalistes doivent être dûment enregistrés par la MIC, l'organe de régulation des médias étroitement contrôlé par le pouvoir. Depuis la fin de l'année 2004, une peine de deux ans de prison ferme est prévue pour les contrevenants. Lors de son procès, Kelvin Jakachira a expliqué qu'il avait fait sa demande d'accréditation auprès de la MIC, mais qu'il n'avait jamais reçu de réponse. En vertu de l'article 82 de l'AIPPA, un journaliste a le droit d'exercer son métier dans l'intervalle entre sa demande d'accréditation et la décision de la MIC. Les avocats du journaliste ont invoqué cet article lors du procès pour demander la relaxe, mais la juge Priscilla Chigumira a estimé que le journaliste devait au contraire affronter l'accusation et présenter sa défense. L'affaire Kelvin Jakachira constitue le premier procès intenté contre un journaliste pour violation de l'AIPPA à avoir été mené à terme. Le verdict qui doit être rendu le 31 août 2005 par la juge Priscilla Chigumira sera révélateur des intentions du gouvernement de Robert Mugabe envers l'équipe du Daily News. « Cette affaire est très importante et beaucoup d'entre nous en font des insomnies, a déclaré un journaliste du quotidien à Reporters sans frontières. Si Kelvin Jakachira était condamné, nous pensons que le gouvernement pourrait faire arrêter d'un coup tous les journalistes poursuivis pour les mêmes charges. » Asphyxié par une crise politique et économique sans précédent, le Zimbabwe est aujourd'hui au bord de la banqueroute. Le gouvernement de Robert Mugabe a, ces derniers mois, effectué des démarches auprès de plusieurs pays, notamment l'Afrique du Sud, afin d'obtenir une aide financière d'urgence. Le gouvernement de Thabo M'Beki a accepté d'examiner la demande du Zimbabwe, en formulant toutefois quelques conditions politiques telles que l'ouverture de négociations avec l'opposition. Entre-temps, le FMI a ouvert des pourparlers de la dernière chance avec Harare pour régler la question de sa dette, faute de quoi le Zimbabwe pourrait être prochainement suspendu de l'organisation.
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Updated on 20.01.2016