Reporters sans frontières s'inquiète de la virulence des accusations lancées contre Al-Arabiya et Al-Jazira

Reporters sans frontières s'inquiète de la virulence des critiques et des menaces adressées par l'armée américaine et le nouveau conseiller irakien à la sécurité nationale, Mouaffak Al-Roubaï, à l'encontre de deux chaînes satellite arabes, Al-Arabiya et Al-Jazira, leur reprochant une couverture des événements qualifiée d'"incitation à la violence", de "mensongère" et d'"anti-coalition". L'organisation met en garde le Conseil de gouvernement provisoire irakien contre une éventuelle décision d'interdire à ces deux médias arabes de travailler librement dans le pays. En novembre 2003 la chaîne Al-Arabiya avait été interdite de couverture et ses bureaux à Bagdad fermés pendant plusieurs semaines. En janvier 2004, Al-Jazira avait quant à elle été interdite de couvrir pendant un mois les activités du Conseil de gouvernement provisoire. Reporters sans frontières considère que les accusations des autorités civiles et militaires américaines en Irak, ainsi que celles du nouveau conseiller irakien à la sécurité nationale "dépassent les bornes" et "nient l'indépendance éditoriale des médias". Malgré des préoccupations sécuritaires légitimes, il est inacceptable que le commandant des forces américaines ainsi que d'autres hauts responsables américains en Irak taxent certains médias d'"anti-coalition". A peine trois semaines après que deux journalistes de la chaîne Al-Arabiya ont été tués, en reportage, par des tirs américains, de tels propos sont dangereux. Ils pourraient être interprétés par des troupes, par ailleurs mises à rude épreuve sur le terrain, comme signifiant que certains journalistes constituent des ennemis et donc des cibles légitimes. En outre, les menaces de fermeture et d'expulsion des journalistes d'Al-Jazira et Al-Arabiya exprimées par l'ancien membre du Conseil de gouvernement provisoire Mouaffak Al-Roubaï ne contribuent nullement à établir un climat de confiance entre les journalistes et les autorités. Au contraire elles témoignent d'une vision restrictive de la liberté de la presse. "Al-Jazira ne s'adonne pas à la politique mais à (une mission) d'information assumée avec professionnalisme", a commenté le porte-parole de la chaîne, affirmant que celle-ci interviewe des officiels américains afin de fournir une information "équilibrée" et "n'est avec personne, comme elle n'est contre personne". "L'Irak est un pays libre et nous utilisons avec responsabilité la liberté de la presse en couvrant tous les aspects du problème", a pour sa part répondu le rédacteur en chef d'Al-Arabiya, Salah Nejm. Le 12 avril, lors de sa conférence de presse quotidienne à Bagdad, le général Mark Kimmitt, chef adjoint des opérations militaires en Irak, a déclaré que "les sentiments anti-américains sont attisés par Al-Jazira et dans d'autres couvertures des médias opposés à la coalition". Par ailleurs, le général John Abizaid, commandant des forces américaines en Irak, a accusé les deux chaînes de mentir concernant les opérations de l'armée américaine à Falloujah. Enfin, toujours le 12 avril, le conseiller à la sécurité nationale d'Irak, Mouaffak Roubaï, a sévèrement mis en garde les chaînes satellitaires Al-Jazira et Al-Arabiya, menaçant de fermer leurs bureaux en Irak si elles "continuent à inciter à la violence et à la sédition".
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Updated on 20.01.2016