Reporters sans frontières se rendra à Athènes pour mettre la liberté d'expression à l'agenda de l'IGF

Le Forum sur la gouvernance d'Internet (IGF), qui fait suite au Sommet mondial sur la société de l'information organisé à Tunis en novembre 2005, se tiendra à Athènes du 30 octobre au 2 novembre 2006. Reporters sans frontières sera présent à cet événement pour rappeler que la liberté d'expression doit être à la base de tout modèle de gouvernance d'Internet. L'organisation rappellera également sa position sur la question de la neutralité du Réseau, ainsi que sur la responsabilité éthique des entreprises du secteur de l'Internet.

Un représentant de Reporters sans frontières participera à un atelier sur le filtrage d'Internet et la liberté d'expression, le 31 octobre, de 17h30 à 19h, dans le cadre de l'IGF (contact : [email protected]). Le Forum sur la gouvernance d'Internet (IGF), qui fait suite au Sommet mondial sur la société de l'information organisé à Tunis en novembre 2005, se tiendra à Athènes du 30 octobre au 2 novembre 2006. Reporters sans frontières sera présent à cet événement pour rappeler que la liberté d'expression doit être à la base de tout modèle de gouvernance d'Internet. L'organisation rappellera également sa position sur la question de la neutralité du Réseau, ainsi que sur la responsabilité éthique des entreprises du secteur de l'Internet. "Cet événement est une occasion de rappeler aux Etats que la libre circulation des informations sur le Réseau doit être un principe majeur de tout modèle de gouvernance d'Internet. Des gouvernements qui censurent le Net et emprisonnent les internautes seront représentés à l'IGF. Ils ne doivent surtout pas décider de l'avenir du Réseau", a déclaré l'organisation. LA GOUVERNANCE D'INTERNET Le débat : A l'heure actuelle, les Etats-Unis contrôlent les organisations qui gèrent le Web, notamment la principale d'entres elles, l'ICANN, une association de droit californien chargée, entre autres, de gérer les noms de domaine au niveau mondial. Cette situation est presque unanimement critiquée par les autres Etats, pour qui cette toute-puissance américaine est inacceptable. Cette réaction est compréhensible, car les décisions de l'ICANN, quoique d'apparence très techniques, ont des répercussions politiques directes. Pour ne prendre qu'un exemple, cette association a la capacité, en théorie, de faire disparaître de la Toile les noms de domaine de certains pays (ex : le .fr ou .cn). L'enjeu est également financier car l'organisme qui gère le Réseau peut mettre en avant certaines technologies, et donc certaines entreprises. Cette situation est critiquable. Mais à l'heure actuelle, le seul modèle alternatif clairement défini vient de pays qui ne respectent pas la liberté d'expression sur Internet. La Chine, Cuba et les pays les plus répressifs de la planète cherchent à attribuer la régulation du Réseau à une organisation supranationale indépendante, c'est-à-dire à l'ONU. Or, compte tenu de l'incurie de cette organisation en matière de droits de l'homme - rappelons que sa commission ad hoc a été présidée par la Libye -, l'idée fait froid dans le dos. Souhaite-t-on vraiment que les pays qui censurent le Net et emprisonnent les internautes se mettent à réguler la circulation de l'information sur le Réseau ? L'Union européenne a également pris position sur le sujet, proposant une alternative intermédiaire entre celle de la Chine et celle des Etats-Unis. Elle demande que les fonctions critiques de l'ICANN, ayant des conséquences politiques directes, soient confiées à une "structure multilatérale collégiale". La position européenne est toutefois très floue et ne définit en aucun cas un nouveau modèle de gouvernance d'Internet. La position de Reporters sans frontières : Il est anormal que les Etats-Unis aient seuls le contrôle des organismes de régulation du Net. Il est donc compréhensible que les autres pays cherchent à établir un nouveau mode de gouvernance du Réseau. Toute réforme devra toutefois respecter les principes suivants : - Ne pas octroyer trop de pouvoirs aux Etats. Internet doit rester un Réseau développé et organisé principalement par le secteur privé et la société civile. - S'assurer que les Etats répressifs ne puissent pas prendre une place prépondérante au sein des nouvelles structures de régulation du Réseau. - Donner aux organes de gestion de l'Internet les moyens de défendre la liberté d'expression. Par exemple, leur donner la possibilité de prendre des sanctions contre les pays, ou les entreprises, dont la politique est en contradiction avec l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. LA RESPONSABILITÉ DES ENTREPRISES DU SECTEUR D'INTERNET Le débat : De nombreuses entreprises du secteur d'Internet exercent une activité dans des pays répressifs en bafouant le principe de la libre circulation de l'information. Pour ne prendre que quelques exemples : - Yahoo ! censure son moteur de recherche en Chine et collabore avec la police pour faire arrêter et condamner des dissidents ou des journalistes indépendants. - Les entreprises américaines Secure Computing et Fortinet vendent des logiciels de filtrage à des pays, comme la Tunisie ou la Birmanie, qui ne respectent pas la liberté d'expression. - L'entreprise américaine Verint Systems, et sa concurrente anglaise Silver Bullet, vendent à la police vietnamienne du matériel d'écoute des téléphones portables. La position de Reporters sans frontières : Les entreprises du secteur d'Internet sont tenues de respecter la liberté d'expression quel que soit le pays où elles opèrent. Le fait de se conformer aux lois locales ne peut en aucun cas être une excuse pour enfreindre les normes internationales en matière de droits de l'homme. Face à l'incapacité de ces sociétés à mettre en place des codes d'éthique sérieux, nous considérons que : - Les gouvernements des pays démocratiques devraient réguler l'activité des entreprises du secteur d'Internet pour empêcher ce type de dérive. Il conviendrait notamment d'interdire la vente de matériel de surveillance des communications à des pays répressifs. Il faudrait également interdire aux entreprises d'opérer leurs services d'e-mails à partir de ces pays. - Toute nouvelle structure de régulation d'Internet au niveau mondial devrait mettre en place des normes internationales en la matière. LE PRINCIPE DE NEUTRALITE D'INTERNET Le débat : Le principe de neutralité implique que les opérateurs (ex : Verizon, France Télécom) ne sont pas autorisés à faire de différence entre les personnes ou les organisations qui fournissent un service sur le Réseau. Par exemple, les fournisseurs d'accès Internet ne devraient pas pouvoir établir de contrats avec des blogs ou des sites web pour leur assurer un meilleur service qu'à d'autres. Les opérateurs de télécoms américains sont actuellement tentés de briser ce principe de neutralité pour pouvoir notamment proposer des services de vidéo à la demande (video on demand), qui nécessitent une importante bande passante. Alors qu'actuellement un blog utilise le même Réseau que le site de CNN, une telle évolution mènerait à la création de deux Internet : l'un, très rapide, pour les entreprises commerciales ; l'autre, plus lent, pour tous ceux qui n'ont pas les moyens de payer les services des opérateurs. La position de Reporters sans frontières : L'abandon du principe de neutralité aurait des conséquences directes pour les blogueurs et les internautes du monde entier. Si les opérateurs de télécommunications sont autorisés à offrir des services différents suivant le prix payé par les fournisseurs de contenu, il est probable que les petites publications en ligne, et notamment les blogs, seront reléguées sur un Internet au rabais, dont les débits seront bien inférieurs à ceux des entreprises commerciales. On pourra alors craindre que les sites sans moyens financiers disparaissent au profit des grands fournisseurs de contenu. Le principe de neutralité a fait d'Internet un média ouvert, créatif et libre. Reporters sans frontières propose donc que : - la neutralité soit reconnue comme un principe fondamental en matière de régulation du Réseau. Elle pourrait notamment être inscrite dans les statuts des organismes qui gèrent l'Internet au niveau mondial. CYBER-MANIF : Reporters sans frontières organise "24 heures contre la censure du Net" et appelle les internautes à se mobiliser Rendez-vous sur www.rsf.org Du mardi 7 novembre 11h au mercredi 8 novembre 11h Plus d'informations sur cet événement
Publié le
Updated on 25.01.2016