Reporters sans frontières publie un rapport "Internet sous surveillance : Les entraves à la circulation de l'information sur le réseau"

Si Internet est la bête noire des régimes autoritaires de tous poils, même dans nos bonnes vieilles démocraties, l'adoption de lois antiterroristes a renforcé le contrôle des autorités sur le réseau et mis à mal le principe de protection des sources journalistiques. Ce rapport traite de la situation d'Internet dans soixante pays, entre le printemps 2001 et le printemps 2003. Il est préfacé par Vinton G. Cerf, le "père" d'Internet.

- Consulter l'intégralité du rapport 2003 " Internet sous surveillance - Les entraves à la circulation de l'information sur le réseau " - Télécharger le rapport : " Internet est l'un des vecteurs les plus solides de la liberté. Il offre la vérité à ceux qui veulent la voir et l'entendre. On ne s'étonnera donc pas que certains gouvernements et organismes craignent Internet et sa capacité à faire connaître la vérité." Vinton G. Cerf Si le nombre d'internautes chinois double pratiquement tous les six mois, et celui des sites tous les ans, cette croissance fulgurante de la Toile s'accompagne d'un effort de contrôle, de censure et de répression à la mesure de cette dynamique. Lois liberticides, cyberdissidents emprisonnés, sites bloqués, surveillance des forums de discussion, cybercafés fermés, en Chine, toute la panoplie répressive est utilisée pour museler le Réseau. Arrestations de cyberdissidents, blocage de l'accès aux sites jugés "politiquement ou culturellement incorrects", contrôle des courriers électroniques… bien que peu développé au Viêt-nam, Internet est toujours sous la coupe du Parti communiste. Le gouvernement d'Hanoi semble reproduire à la lettre le modèle chinois de contrôle du Réseau. Avec un accès soumis à autorisation et un rationnement des équipements nécessaires, Internet à Cuba apparaît comme un phénomène limité et sous haute surveillance. Les équipements nécessaires, y compris les plus récents, ne sont disponibles que dans les magasins d'Etat spécialisés, accessibles uniquement aux personnes autorisées. Par ailleurs, le gouvernement a légiféré dès l'apparition d'Internet sur l'île. En juin 1996, le décret-loi 209, intitulé "Accès depuis la République de Cuba au réseau informatique global", précise que son utilisation ne peut se faire "en violation des principes moraux de la société cubaine ou des textes de loi du pays", et que les messages électroniques ne doivent pas "compromettre la sécurité nationale". En Tunisie, le discours officiel prône le développement rapide et une démocratisation exemplaire d'Internet. Cependant, les services de sécurité opèrent une surveillance implacable du cyberespace. Censure des sites, interception des e-mails, contrôle des cybercafés, arrestations et condamnations arbitraires sont le lot quotidien des internautes. Arrêté en 2002, le cyberdissident Zouhair Yahyaoui a été condamné à deux ans de prison. Au total, au 19 juin 2003, plus d'une cinquantaine d'internautes croupissaient en prison, dont les trois quarts en Chine. Si Internet est la bête noire des régimes autoritaires de tous poils, même dans nos bonnes vieilles démocraties, l'adoption de lois antiterroristes a renforcé le contrôle des autorités sur le réseau et mis à mal le principe de protection des sources journalistiques. C'est le cas notamment aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou en France. Ce rapport publié avec le concours du ministère des Affaires étrangères, de la Fondation Hachette, et grâce au soutien de la Caisse des dépôts et consignations, traite de la situation d'Internet dans soixante pays, entre le printemps 2001 et le printemps 2003. Il est préfacé par Vinton G. Cerf, le "père" d'Internet. - Consulter l'intégralité du rapport 2003 " Internet sous surveillance - Les entraves à la circulation de l'information sur le réseau " On peut en commander la version brochée à Reporters sans frontières, 5 rue Geoffroy-Marie, 75009 Paris (10 € + frais de port). Reporters sans frontières, secrétariat international, 5 rue Geoffroy-Marie, 75009 Paris Ils sont victimes de la répression sur Internet… 42 cyberdissidents sont emprisonnés en Chine - La "souris inoxydable" Liu Di, détenue au secret Liu Di a été arrêtée sur le campus de l'université de Pékin, le 7 novembre 2002, à la veille de l'inauguration du seizième Congrès du Parti communiste chinois. Depuis, elle est détenue au secret par le département de la sécurité publique. Etudiante en psychologie et Férue d'Internet, elle avait diffusé sur des forums de discussion chinois, notamment sur son propre espace de discussion intitulé "La vie tel un feu", des messages ironiques sur le gouvernement communiste. Sa famille n'a toujours pas été autorisée à la voir. Les autorités accusent la jeune femme, âgée de 22 ans, d'avoir "mis en danger la sécurité nationale" et affirment vouloir faire "pression" sur elle en la détenant au secret. Le père de Liu Di a expliqué à Reporters sans frontières ne pas comprendre pourquoi sa fille, qui signait ses messages sur Internet "La souris inoxydable", est emprisonnée pour avoir mis en danger la sécurité nationale. "Elle adorait surfer sur Internet pour chercher des informations. Mais elle était frustrée par le manque de liberté sur Internet et elle a peut-être exprimé des critiques ou des sarcasmes, mais sans jamais penser aux conséquences de ces messages", a précisé Liu Qinghua. Selon ses proches, elle n'a fait qu'exprimer sur Internet son désir de liberté. La police a par ailleurs menacé la famille : elle n'apprécierait pas que les médias étrangers et les organisations de défense des droits de l'homme fassent du bruit autour du cas de Liu Di. - Huang Qi condamné à cinq ans de prison "Au revoir à tous, la police veut m'emmener. Nous avons un long chemin devant nous. Merci à tous ceux qui aident au développement démocratique de la Chine." C'est le dernier e-mail envoyé, le 3 juin 2000, par Huang Qi à ses amis. Des hommes de la sécurité publique venaient de se présenter à son domicile pour l'arrêter. Depuis cette date, son épouse n'a jamais été autorisée à lui rendre visite. Huang Qi, créateur du site Internet www.tianwang.com, a attendu près de trois ans avant d'apprendre qu'il était condamné à cinq ans de prison pour "subversion" et "incitation au renversement du pouvoir de l'Etat". La justice, aux ordres des autorités, a reproché au webmaster d'avoir laissé publier sur son site, hébergé aux Etats-Unis suite à une première interdiction en Chine, des articles sur le massacre de la place Tiananmen en juin 1989. Le site rebaptisé www.6-4tianwang.com est toujours alimenté par des Chinois en exil. Un simulacre de procès s'est tenu à huis clos en août 2001. En février de la même année, la cour avait organisé une première audience. Mais Huang Qi s'était évanoui en plein tribunal. Le cyberdissident, épuisé par les interrogatoires et les conditions de détention, portait une cicatrice sur le front et il avait perdu une dent à la suite de coups infligés par ses gardiens. Un diplomate européen présent à l'audience a confirmé ces traces de torture. L'ajournement du procès est intervenu au moment même où la commission d'évaluation du Comité international olympique se trouvait à Pékin. Quelques mois plus tard, le Comité accordait les J. O. de 2008 à Pékin… - 3 cyberdissidents sont emprisonnés aux Maldives dont Ahmad Didi condamné à 25 ans de prison Après avoir été détenus au secret pendant près de cinq mois, Ahmad Didi et ses trois compagnons, animateurs de la lettre d'information électronique Sandhaanu, ont été transférés sur l'île de Mafushi. Leurs cellules, de taille extrêmement réduite, n'étaient pas ventilées et ils ne disposaient que de cinq litres d'eau par jour pour boire et se laver. En guise de couchage, ils devaient se contenter d'un morceau de contreplaqué. En février 2003, Ahmad Didi a été transféré dans une nouvelle cellule et dispose désormais d'un lit, mais ses proches ne sont autorisés à lui rendre visite qu'une fois par mois.Ils ne peuvent lui fournir ni argent, ni journaux. En revanche, ils peuvent lui apporter de la nourriture, que le prisonnier doit consommer dans la journée. Ahmad Didi était pourtant un homme d'affaires prospère dans cet archipel paradisiaque pour les touristes. Il avait même postulé à un poste de député. Mais avec trois autres personnalités des Maldives, il a lancé Sandhaanu, diffusé sur Internet. Le président des Maldives a ordonné leur arrestation en janvier 2002. En juillet, ils ont été condamnés à une peine de vingt-cinq ans de prison pour avoir "insulté le Président " et avoir tenté de "renverser le gouvernement (…) en créant un bulletin d'information dénommé Sandhaannu". Pourtant, ce bulletin électronique, diffusé en divehi (langue des Maldives) à quelques centaines d'internautes, ne lançait aucun appel à la violence, seulement quelques critiques sur la gestion présidentielle. Depuis l'annonce de la sentence, les autorités ont refusé tout pourvoi en appel aux quatre prisonniers. Et ces derniers n'ont toujours pas d'avocats pour les défendre. Ahmad Didi, âgé de 50 ans, avait plaidé coupable, mais cela n'a pas influencé le tribunal en sa faveur. - 5 cyberdissidents sont emprisonnés au Viêt-nam dont Le Chi Quang condamné à quatre ans de prison Bien que Le Chi Quang souffre d'insuffisance rénale, le tribunal d'Hanoi a récemment refusé sa libération pour "raison médicale". Il a été condamné, le 8 novembre 2002, à quatre ans de prison ferme pour avoir publié sur Internet des articles critiques à l'égard du régime communiste. Il a notamment fait circuler un document intitulé "Vigilance envers l'Empire du Nord" qui revient sur les conditions dans lesquelles les autorités vietnamiennes ont signé des accords frontaliers avec le gouvernement chinois. Le texte qui touche un sujet tabou au Viêt-nam a été très largement diffusé au sein de la communauté vietnamienne à l'étranger. Le cyberdissident a été arrêté le 21 février 2002 dans un cybercafé d'Hanoi par un policier en civil se faisant passer pour un internaute. Une vingtaine de policiers l'ont escorté jusqu'à son domicile, où ils ont confisqué son ordinateur, des cassettes ainsi que des documents personnels. Les jours suivants, ses parents ont été régulièrement convoqués au poste de police pour interrogatoire. La police leur conseillait de ne pas ébruiter l'arrestation de leur fils. Le Chi Quang, âgé de 32 ans, est détenu dans le camp B14 de la province de Ha Dong (nord du pays). Diplômé en chimie et en droit, le cyberdissident était connu des services de police qui le qualifiaient dans leurs rapports d'"élément réactionnaire cherchant à renverser l'Etat socialiste". - 1 cyberdissident est emprisonné en Tunisie : Zouhair Yahyaoui condamné à deux ans de prison En juillet 2001, jeune diplômé au chômage et passionné d'Internet, Zouhair Yahyaoui lance, depuis la Tunisie, un site d'informations. Le 4 juin 2002, il est arrêté par une dizaine de policiers en civil dans un cybercafé de la banlieue de Tunis. Interrogé, peu après, par des membres de la Direction de la Sûreté d'Etat (DES, qui dépend du ministère de l'Intérieur), le cyberdissident révèle le mot de passe de son site Tunezine. Il est également torturé. Le 10 juillet, au terme d'un procès expéditif, il est condamné, en appel, à deux ans de prison pour " propagation de fausses nouvelles ". Depuis le début de l'année 2003, Zouhair Yahyaoui a entamé trois grèves de la faim. Cuba : Interview de Maydelín Guerra Álvarez, épouse du journaliste Mario Enrique Mayo Hernández Mario Enrique Mayo Hernández a été interpellé le 18 mars 2003 au cours d'une rafle dans les rangs de l'opposition. Au total, soixante-quinze dissidents, dont vingt-six journalistes indépendants, ont été arrêtés puis jugés et condamnés à de lourdes de peines de prison. - Mario Enrique Mayo Hernández, condamné à 20 ans de prison Directeur de la petite agence Félix Varela, à Camagüey (Centre), Mario Enrique Mayo Hernández a été jugé le 4 avril avec trois autres journalistes de la même province et condamné à 20 ans de prison pour "atteinte à l'indépendance et à l'intégrité de l'Etat". Lors du procès, un agent de la sécurité d'Etat (police politique), infiltré dans la dissidence, a comparu pour rapporter que le journaliste s'était rendu coupable d'avoir surfé sur Internet depuis la Section des intérêts américains, la représentation officielle des Etats-Unis à La Havane. Dans un entretien téléphonique avec Reporters sans frontières, Maydelín Guerra Álvarez, la femme du journaliste, raconte… Reporters sans frontières : Pendant le procès, un agent infiltré a rapporté que Mario consultait Internet à la Section des intérêts américains ? Maydelín Guerra Álvarez : Oui, il a dit que mon époux allait consulter Internet, ce dont ce dernier ne se cachait pas d'ailleurs. Reporters sans frontières : Mais cela a été considéré comme criminel par le tribunal ? Maydelín Guerra Álvarez : Tout, pendant ce procès, y compris être propriétaire d'une radio avec laquelle on peut écouter Radio Martí (radio financée par le gouvernement américain pour émettre vers Cuba et dont les émissions sont brouillées) est considéré comme un crime. Car ils avaient besoin d'arguments pour justifier une peine de vingt ans de prison. Mais, même ainsi, rien de tout cela ne peut justifier son arrestation, et encore moins une condamnation à vingt ans de prison. Reporters sans frontières : Maydelín, Mario Enrique a été jugé avec Normando Hernández, Alejandro González Raga… des personnes qui sont également des journalistes indépendants. Le fait de surfer sur Internet leur a également été reproché, ou cette accusation s'adressait uniquement à Mario Enrique ? Maydelín Guerra Álvarez : Non. A tous. Ils ont particulièrement insisté sur le fait que Normando Hernández et Mario Enrique surfaient sur Internet. Ce n'est pas tout. Le simple fait de se présenter à la Section des intérêts américains, quel que soit le motif, était considéré par le tribunal comme une trahison à la patrie. Reporters sans frontières : Lors du procès, il y eu uniquement cet agent infiltré qui est venu témoigner à charge ou d'autres personnes qui sont venues dire que ces journalistes naviguaient sur le web ? Maydelín Guerra Álvarez : Non, il n'y a eu que cet Eduardo Hernández Rodríguez qui est venu dire qu'ils surfaient sur Internet. Reporters sans frontières : Et depuis quand travaillait-il dans la dissidence ? Maydelín Guerra Álvarez : En réalité, il ne travaillait pas avec mon mari dans son agence de presse. Il était le représentant du Parti pour les droits de l'homme (clandestin) à Camagüey. Cela faisait deux ans, comme lui-même l'a dit devant le tribunal, qu'il était entré dans la dissidence pour faire ce travail. Il ne devait pas être très utile pour la sécurité d'Etat car, comme on dit ici, ils l'ont "grillé" rapidement. Pratiquement tous les opposants s'étaient rendu compte qu'il était bizarre, qu'il se comportait de façon différente, bref, qu'il était un informateur." Contact : Régis Bourgeat, responsable du bureau Amériques, tél : (33) 1 44 83 84 68, fax : (33) 1 45 23 11 51, e-mail : [email protected], web : www.rsf.org Chine : Interview de Zeng Li, épouse du webmaster Huang Qi, emprisonné depuis 3 ans - Huang Qi, condamné à 5 ans "Depuis trois ans, je n'ai aucun contact avec mon mari. (…) D'abord, je veux remercier les organisations qui nous soutiennent et surtout les médias qui parlent de la situation de Huang Qi. (…) Je ne comprends toujours pas pourquoi le fait d'exprimer ses opinions est considéré comme un crime qui met en danger le pays. Huang Qi n'a jamais rien écrit contre son pays, c'était seulement les opinions d'autres personnes. Si vraiment, ils l'ont condamné pour un crime contre la sécurité du pays, alors c'est vraiment stupide. (…) Mon avocat m'a dit que la santé de Huang Qi n'est pas bonne, il est très maigre. (…) Au cours des derniers jours, j'ai essayé de téléphoner à la prison pour avoir des nouvelles de lui. Mais à cause du SRAS, je ne peux plus envoyer de vêtements, seulement de l'argent. Donc je n'ai plus en retour sa signature qui est la seule preuve qu'il est vivant." Contact : Vincent Brossel, responasble du bureau Asie, tél : (33) 1 44 83 84 70, fax : (33) 1 45 23 11 51, e-mail : [email protected], web : www.rsf.org
Publié le
Updated on 25.01.2016

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