Reporters sans frontières interpelle les candidats sur la liberté de la presse

A trois semaines de l'élection présidentielle afghane, Reporters sans frontières a adressé ce jour une lettre aux principaux candidats, leur demandant de prendre des engagements précis pour enraciner durablement la liberté des médias dans le quotidien des Afghans. Le courrier a notamment été envoyé à Hamid Karzai, Abdullah Abdullah, Ashraf Ghani, Ramazan Bashardost et Sayed Jalal Karim. Après avoir rappelé que les menaces dont les journalistes afghans et étrangers présents dans le pays ne proviennent pas des seuls taliban, mais également de groupes mafieux et de certains responsables politiques et sécuritaires, l'organisation leur a demandé d'exprimer publiquement leur inquiétude face à cette récente vague de violations de la liberté de la presse qui frappe l'Afghanistan. "Nous espérons sincèrement que vous prendrez à bras le corps le dossier de la liberté de la presse (…) et relancez les enquêtes sur les assassinats et les agressions de journalistes", a demandé l'organisation, en citant les noms de Zakia Zaki, directrice de la Radio de la Paix, Abdul Rohani, reporter de la BBC, et Jawed Ahmad, fixeur pour des médias canadiens, tous trois assassinés. L'organisation a dénoncé l'impunité dont jouissent les auteurs de ces violences, notamment les forces de l'ordre. Dernier incident en date, le 30 juillet, cinq journalistes ont été agressés physiquement par des policiers à Herat, alors qu'ils enquêtaient sur la mort d'un civil tué par la police. Reporters sans frontières a indiqué que sans des améliorations concrètes pour la liberté d'expression, le "pays risque de perdre la confiance de ses journalistes et le soutien de l'opinion publique internationale, compliquant ainsi la tâche des Etats, notamment ceux de l'Union européenne, qui soutiennent financièrement, militairement et politiquement l'Afghanistan." Enfin, Reporters sans frontières a demandé à chaque candidat de "prendre l'engagement de libérer le jeune journaliste Sayed Perwiz Kambakhsh, condamné injustement à vingt ans de prison pour avoir téléchargé un texte sur Internet. Plus d'un million de personnes à travers le monde ont déjà signé une pétition demandant sa libération. Les révélations sur les tortures qu'il a subies de la part d'agents des services de sécurité ont jeté un doute sur leur capacité à respecter les standards internationaux en la matière." Plus généralement, l'organisation a souhaité que les candidats se prononcent publiquement contre la politisation du délit de "blasphème", afin que l'article 130 de la Constitution afghane ne soit plus utilisé dans des affaires de délits d'opinion. Enfin, Reporters sans frontières a déploré que la nouvelle loi sur la presse soit victime de blocages politiques, alors qu'elle pourrait être l'occasion de décriminaliser des délits de presse et d'améliorer, par la loi, la situation contractuelle et salariale des professionnels de l'information.
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Updated on 20.01.2016