Reporters sans frontières et l'Association biélorusse des journalistes condamnent l'absence d'accès aux médias pour les candidats de l'opposition

L'élection présidentielle au Bélarus s'est déroulée dans la plus grande opacité. L'accès aux médias pour les candidats de l'opposition a été étroitement vérouillé par les autorités. Reporters sans frontières et l'Association biélorusse des journalistes accusent le gouvernement d'avoir sciemment muselé la presse en vue d'assurer la réélection du président Alexandre loukachenko, le 19 mars, avec plus de 80% des voix.
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читайте на русском Reporters sans frontières et l'Association biélorusse des journalistes (BAJ) condamnent l'absence d'accès aux médias pour les candidats de l'opposition pendant la campagne électorale. Le président Alexandre Loukachenko a été réélu, le 19 mars, avec plus de 80% des voix dans un climat de tension extrême. La presse, presque totalement contrôlée par le Président, a servi de relais à la propagande officielle. Celui-ci reconnaît d'ailleurs que « les médias sont le principal instrument de mesure de l'idéologie à la base de l'Etat ». De très graves atteintes à la liberté de la presse ont été commises par les autorités pendant toute la campagne électorale. Elles ont notamment refusé d'accorder un accès équitable aux médias pour tous les candidats à la présidentielle. Reporters sans frontières et la BAJ rappellent que la campagne électorale s'est déroulée en l'absence totale de liberté d'expression. La presse a été muselée par les autorités pour assurer la réélection du président sortant. Les deux organisations appellent la communauté internationale à intervenir d'urgence auprès des autorités biélorusses pour sanctionner ces atteintes et promouvoir la diversité des médias dans le pays. Violations de la liberté de la presse avant et pendant le scrutin. A ce sujet, Reporters sans frontières vient de publier un rapport intitulé « L'acharnement contre les médias érigé en système » (http://www.rsf.org/article.php3?id_article=16774) - Depuis près de deux ans, le pouvoir a entrepris une politique de harcèlement systématique des médias libres. Seuls deux hebdomadaires indépendants, BelGazeta et Belorusy i Rynok, sont autorisés en kiosques et à la distribution, et vivotent avec des tirages insignifiants. Tous les autres journaux sont condamnés à la clandestinité. - Pendant la campagne électorale, deux journaux harcelés par le pouvoir ont tenté de publier le programme des candidats de l'opposition. Le 3 mars, les autorités ont confisqué 250 000 exemplaires du journal indépendant Narodnaya Volya, déjà interdit de vente et de distribution, consacrés au candidat à la présidentielle, Alexandre Kazouline. Deux jours avant le scrutin, le 17 mars, Tovarichtch, un journal d'opposition qui avait disparu des circuits de distribution depuis plusieurs mois, a imprimé 200 000 exemplaires comportant le programme du candidat Alexandre Milinkevitch, aussitôt saisis par la police. - La presse, largement contrôlée par l'Etat, s'est fait l'écho des activités du président Alexandre Loukachenko. Un numéro spécial du journal de l'administration présidentielle, Sovietskaya Bielorussia, publié à plus de 800 000 exemplaires et daté du 15 mars 2006, a été exclusivement consacré au programme du chef de l'Etat. - Le Président a largement occupé le petit écran, entièrement contrôlé par l'Etat. Alexandre Loukachenko est apparu presque tous les jours à la télévision depuis le début de la campagne. Le 2 mars, il a fait un long monologue de près de trois heures pour l'ouverture d'un Congrès extraordinaire réunissant les fonctionnaires du pays. La première chaîne publique BT a retransmis, dans la matinée, l'intégralité du discours présentant les exploits économiques du régime et le programme de développement du Président pour les cinq années à venir. La chaîne a rediffusé la moitié du discours dans son journal télévisé du soir et le lendemain. - D'après l'Association biélorusse des journalistes, le journal télévisé Nashi Novosti, de la chaîne publique ONT, a consacré 89,6% de son temps d'antenne aux candidats à l'élection présidentielle entre le 21 février et le 4 mars. Les candidats Alexandre Milinkevitch et Sergueï Gaidukevitch n'ont pas été évoqués. Alexandre Kazouline a eu droit à 0,4% de temps d'antenne sur cette chaîne. La première chaîne BT a accordé 58% au président Loukachenko, contre 0,1% à Alexandre Kazouline et 0,2% à Alexandre Milinkevitch. La commission électorale n'a attribué qu'un maigre temps d'antenne de deux fois une demi-heure pour tous les candidats et ce, pour toute la durée de la campagne électorale. - L'opposition n'a non seulement pas eu droit de cité dans les médias, mais elle a également été victime d'une campagne de dénigrement de la part des autorités. Un reportage sur un rassemblement d'opposants contestant les résultats officiels du scrutin a été diffusé le 20 mars sur la chaîne BT. La chaîne a qualifié les manifestants de « pédés » et affirmé que les organisateurs avaient distribué de la bière. - Plusieurs sites Internet d'opposition ont été bloqués, vraisemblablement sur ordre des autorités, le jour même de l'élection présidentielle. Le site d'opposition du mouvement citoyen Charte 97, www.charter97.org, a été victime d'une attaque informatique de type DOS, qui a paralysé le site du 19 mars à 16 heures jusqu'au lendemain matin à 11 heures. La rédactrice en chef du site, Natalya Radina, a déclaré à Reporters sans frontières que le site avait subi la même attaque pendant la campagne présidentielle de 2001 et le référendum de 2004. Le site de la station américaine Radio Svoboda, www.svoboda.org, était à nouveau accessible le 20 mars à 13 heures et les sites des candidats de l'opposition, www.milinkevich.org et www.kozylin.com, à 10 heures du matin le même jour. - Enfin, les autorités ont refusé l'accès au territoire aux journalistes considérés comme gênants. Laure Mandeville, du quotidien Le Figaro, s'est vu refuser son visa juste avant le scrutin. Il lui a été expliqué dans un courrier officiel qu'elle racontait des mensonges sur l'actualité au Bélarus et n'était donc pas autorisée à s'y rendre. Entre le 20 février et le 17 mars, au moins quatre journalistes polonais du quotidien Gazeta Wyborcza et Radio Bialystok ont été expulsés du territoire. Trois autres journalistes des chaînes ukrainiennes 1+1, Tonis et 5Kanal, ont été reconduits à la frontière alors qu'ils venaient couvrir une manifestation de soutien au candidat de l'opposition Alexandre Milinkevitch. - Entre le 12 et le 15 mars, au moins quatre autres journalistes ukrainiens et polonais ont été arrêtés par la police et condamnés à des peines allant de cinq à dix jours de prison. Andrej Poczobut, rédacteur en chef du magazine polonais Polski na uchodzstwie, est détenu depuis le 14 mars, officiellement accusé de « hooliganisme ». Il a entamé une grève de la faim et de la soif pour protester contre son incarcération, et a été transporté à l'hôpital le 19 mars pour recevoir des soins.
Publié le
Updated on 20.01.2016