Reporters sans frontières (RSF) condamne une nouvelle fois les pressions exercées par les autorités iraniennes à l’encontre des journalistes et de la presse écrite. Le 16 février,
Golamhossien Mohsseni Ejehi, le porte-parole de la justice
a annoncé dans un point presse que les médias avaient interdiction de publier des informations sur des “individus désignés comme “têtes de sédition” par le Haut conseil de la sécurité nationale et la justice
...”. En cas de non-respect, ils pourraient se voir interdits de publication voire de sanctions.
Il faisait notamment référence à l’ancien président de la République islamique
Mohammad Khatami,
Mir Hossein Mousavi, ancien Premier ministre et propriétaire du journal suspendu
Kalameh Sabaz, ainsi que son épouse, l’écrivain à succès Zahra Rahnavard, et
Mehdi Karoubi, ancien président du Parlement et propriétaire du journal suspendu
Etemad Melli. Depuis le 24 février 2011, les responsables du régime les considèrent comme les “têtes de sédition’. Ils sont placés illégalement et sans aucun procès en résidence surveillée, et privés de tous leurs droits depuis le 14 février 2011.
Selon les informations récoltées par RSF, il y a quelques semaines, le procureur de Téhéran avait convoqué les directeurs des médias pour leur rappeler cette interdiction.
«
L’intervention des responsables de la justice, - Haut conseil de la sécurité nationale, procureur de Téhéran ou procureur général, ministère des Renseignements ou gardiens de la révolution, ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, bureau du Guide suprême, et autres institutions - pour imposer la censure n'est pas nouvelle, déclare Reza Moini responsable du bureau Iran/Afghanistan de Reporters sans frontières..
Le porte-parole de la justice, lui-même mis en cause dans les assassinats de journalistes et d’intellectuels iraniens notamment dans celui de Pirouz Davani, a révélé publiquement la situation préoccupante de la liberté d'information en Iran, 173e dans le Classement de la liberté de la presse.»
Lire : Reporters sans frontières lance une campagne internationale, intitulée #FightImpunity
Le 16 février 2015, l’hebdomadaire conservateur
9day a été suspendu pour la deuxième fois en moins d'un an par la Commission d’autorisation et de surveillance de la presse, pour insulte indirecte contre l’ayatollah Rouhollah Khomeini et critique contre la politique nucléaire du régime. Ce média est 'un des principaux organes de presse d’un groupe extrémiste au sein du pouvoir iranien, proche du guide suprême Ali Khamenei qui critiquait les politique du gouvernement du conservateur modéré Hassan Rohani. Les articles incriminés visaient Javad Zarif, ministre des Affaires étrangères et chef des négociations sur la question nucléaire entre la République islamique et les pays occidentaux et l’ayatollah Hashemi Rafsanjani, ancien président de la République, l'un des proches du fondateur de la République islamique.
Pour avoir “critiqué” les méthodes de négociations nucléaires du gouvernement, l'hebdomadaire avait déjà été suspendu le 17 mars 2014 pour “insulte et diffamation” et “publication de fausses informations”, en application des articles 6 et 12 du code de la presse. Début mai 2014,
9day avait reçu l'autorisation de publier à nouveau.
Le lendemain, en réaction à la suspension du journal, le directeur de 9day et député de Téhéran, Hamid Rassaïe, a révélé, dans une conférence de presse, que le correspondant du Washington Post en Iran,
Jason Rezaian avait fait des “aveux télévisés”. Selon l’AFP, ce député extrémiste proche des gardiens de la révolution, a déclaré que “les responsables américains ont affirmé que Rezaian était détenu depuis 200 jours sans procès mais si la radio télévision iranienne diffusait ces aveux, et si les Américains écoutaient ses confessions sur ses activités d'espionnage contre notre pays (...) ils comprendront les raisons de sa présence en Iran".
“
Depuis des années, les ressortissants occidentaux, et particulièrement les journalistes, sont à la fois victimes de la paranoïa sécuritaire des dirigeants du régime et instrumentalisés à des fins de négociations diplomatiques, le tout dans le silence complice de la communauté internationale, Ce journaliste, qui n’a commis aucun crime, est victime de la guerre que se livrent les clans au sommet de l’Etat et des tensions entre la communauté internationale et Téhéran”, rappelle Reza Moini.
Lire : Le journaliste Jason Rezaian, victime des négociations américano-iraniennes
Le 15 février 2015,
Forozandeh Adibi, directrice du mensuel
Mehrnameh a été condamnée par la 79e chambre du tribunal d'instance de Téhéran à une amende de trois millions de tomans et à deux ans d’interdiction d'activité journalistique. Me Mahmoud Alizadeh-Tabatabaie, l'avocat de la journaliste a déclaré que le journal a été condamné pour la publication d’articles écrits par des groupe “déroutés” (expression utilisée pour les opposants du régime qui sont déviés de la ligne de la révolution) dans plusieurs numéros du mensuel. En effet la directrice avait été condamnée à un an de prison ferme, mais le juge a converti cette peine en amende.
L’Iran est classé 173e sur 180 dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2015 de Reporters sans frontières.