Reporters sans frontières s'inquiète de l'attitude des autorités maldiviennes qui, en l'espace de quelques jours, ont expulsé deux journalistes étrangers, arrêté un caricaturiste et opposant, et remis en cause le processus d'ouverture des médias électroniques.
Reporters sans frontières s'inquiète de l'attitude des autorités maldiviennes qui, en l'espace de quelques jours, ont expulsé deux journalistes étrangers, dont le correspondant du site Minivannews.com, arrêté un caricaturiste et opposant, et remis en cause le processus d'ouverture des médias électroniques.
"Alors que le gouvernement devrait calmer les esprits à la veille d'une manifestation importante de l'opposition, la police intimide, expulse et arrête ceux qui sont vus comme proches des manifestants au sein de la presse. Encore une fois, nous rappelons qu'un média d'opposition a autant le droit de travailler librement qu'un journal progouvernemental. Le harcèlement contre les journalistes du Minivan et du Minivannews.com doit cesser", a affirmé l'organisation.
Le gouvernement a notamment accusé Minivan d'avoir appelé début octobre à assassiner le président Abdul Gayoom, lors du lancement par le Parti démocratique maldivien (MDP) de son appel à manifester le 10 novembre. Depuis, les autorités accusent l'opposition de vouloir créer une situation insurrectionnelle. De son côté, le MDP présente cette manifestation comme un rassemblement national pour accélérer les réformes démocratiques. Une trentaine de ses militants ont déjà été arrêtés dans le pays.
Les journalistes maldiviens et étrangers ont pu librement couvrir la manifestation du 6 novembre devant le siège du MDP. L'organisation réitère son appel aux autorités de laisser la presse travailler librement, un engagement pris par les officiels devant la Mission internationale pour la liberté de la presse aux Maldives, en mai 2006.
Le 3 novembre, Phillip Wellman, correspondant américain accrédité du site d'informations Minivannews.com aux Maldives, a été arrêté en compagnie de Graham Quick, photographe indépendant attaché au journal britannique Observer, par la police sur l'atoll de Gaaf Dhal (Sud). Ils s'y étaient rendus pour couvrir l'arrestation de militants du MDP par la police. Pendant leur détention de quelques heures, un officier les a interrogés sur les personnes qu'ils avaient rencontrées et a tenté d'effacer leurs enregistrements et leurs photographies. Le lendemain, après avoir quitté l'atoll, des officiers de l'aéroport de Malé les ont priés de quitter le territoire des Maldives. Phillip Wellman, en poste dans le pays depuis le 10 octobre, et Graham Quick ont été contraints d'embarquer pour des vols à destination de Colombo et de Londres.
Contacté par Reporters sans frontières, Mohamed Hussain Shareef, porte-parole du gouvernement, a justifié cette arrestation et cette expulsion par des "activités militantes" attribuées aux deux reporters. "Dans quinze jours, ils seront les bienvenus aux Maldives", a précisé M. Shareef. De son côté, les rédactions du Minivannews.com et de l'Observer ont confirmé à Reporters sans frontières que les deux reporters travaillaient bien pour eux.
Le 3 novembre, Ahmed Abbas, caricaturiste et militant d'opposition, a été arrêté à Malé après avoir quitté les bureaux des Nations unies où il avait demandé l'asile. Il est actuellement détenu à Maafushi (près de Malé). L'opposant a été incarcéré suite à sa condamnation in absentia à six mois de prison pour avoir déclaré, en août 2005, au journal Minivan : "Ce que nous devons faire à ceux de la Star Force (unité d'élite de la police) qui nous frappent, c'est de les prendre individuellement et d'agir de telle manière qu'ils comprennent que les coups provoquent de la souffrance, autrement ils ne seront pas maîtrisés." Dans cette affaire, la directrice, Aminath Najeeb, et le rédacteur en chef, Nazim Sattar, du journal d'opposition ont également été inculpés de "désobéissance aux ordres".
Ahmed Abbas est connu pour ses caricatures acerbes publiées dans Minivan et sur des sites Internet d'opposition. Il a affirmé n'avoir jamais été appelé par la cour qui l'a condamné pour "désobéissance". Le verdict a en revanche été publié le 1er novembre par le site pro-gouvernemental Factmaldives.com.
Enfin, le ministère de l'Information n'a pas tenu sa promesse de mettre fin au monopole étatique sur la radio et la télévision au 31 octobre 2006. Il a été annoncé le 1er novembre que l'ouverture serait strictement maîtrisée par la loi, mais qu'en absence de texte, elle était retardée. La loi sur l'audiovisuel a été envoyée au Parlement (People's Majlis), mais n'a toujours pas été adoptée.
Dans un communiqué, il est précisé que les médias électroniques seront surveillés en raison des effets négatifs d'une liberté de la presse inconditionnelle. Au vu de ces revirements, Reporters sans frontières craint que Minivan Radio se voit refuser sa licence de diffusion. Diffusée depuis l'étranger, il s'agit de la seule station non gouvernementale en langue divehi.