Le 6 décembre 2004, Hugo Chávez a annoncé la promulgation, le jour même, de la loi sur la responsabilité sociale des médias audiovisuels. « Tout média qui se mettra au service d'un coup d'Etat ou d'intérêts apatrides sera suspendu », a prévenu le chef de l'Etat. Reporters sans frontières avait dénoncé une loi « dangereuse » pour la liberté de la presse.
Le 6 décembre 2004, Hugo Chávez a annoncé la promulgation, le jour même, de la loi sur la responsabilité sociale des médias audiovisuels. « Nous allons promulguer la loi aujourd'hui pour freiner le terrorisme médiatique qui frappe les libertés, pour commencer à démocratiser les médias séquestrés par une oligarchie qui a déjà soutenu des coups d'Etat, le fascisme et le terrorisme », a-t-il déclaré à l'ouverture d'un congrès. « Tout média qui se mettra au service d'un coup d'Etat ou d'intérêts apatrides sera suspendu », a prévenu le chef de l'Etat.
La loi a finalement été promulguée par le Président le 7 décembre au soir, après une ultime lecture de l'Assemblée nationale.
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26.11.2004 - Reporters sans frontières dénonce l'adoption d'une loi dangereuse pour la liberté de la presse
Reporters sans frontières dénonce l'adoption, le 24 novembre 2004, de la loi sur la responsabilité sociale des radios et télévisions.
"Nous sommes extrêmement préoccupés par l'adoption d'une loi dont la marge d'interprétation est large et qui risque d'être instrumentalisée contre les médias ne partageant pas les points de vue du gouvernement, a déclaré Reporters sans frontières. Les autorités disposeront dorénavant d'un arsenal de sanctions incluant de fortes amendes, et la suspension ou le retrait de leur concession aux médias fautifs. Un tel dispositif ne pourra qu'encourager les médias à s'autocensurer ou bien donner lieu à des abus de la part des autorités."
"Le gouvernement avait annoncé une large consultation sur ce projet de loi mais ce dernier n'a, au final, connu aucune modification significative. Dans la version approuvée, le texte contient toujours les deux dispositions les plus dangereuses pour la liberté de la presse : l'organe censé contrôler l'application de la loi est toujours composé en majorité de représentants d'institutions de l'Etat ou contrôlées par celui-ci ; la figure des "mesures conservatoires", qui rétablit la censure, est maintenue."
Dans une lettre adressée, le 20 octobre dernier, au ministre de l'Information et de la Communication, Andrés Izarra, Reporters sans frontières signalait que "pour prévenir toute instrumentalisation de la loi, son application (devait) être confiée à un organe indépendant du gouvernement" et demandait que le système des mesures conservatoires soit supprimé. L'organisation soulignait qu'elle n'avait pas "d'opposition de principe à l'existence d'une loi qui fixe des obligations aux concessionnaires d'une licence de radio et de télévision".
Le 24 novembre 2004, l'Assemblée législative, où le parti du Président Chávez dispose de la majorité, a approuvé en seconde lecture les derniers articles de la loi sur la responsabilité sociale des radios et télévisions. La seconde lecture avait débuté le 7 octobre, la première ayant eu lieu en février 2003. La loi a pour objectif affiché d'adapter la programmation audiovisuelle au jeune public. Elle doit maintenant être examinée par la commission parlementaire sur les médias avant d'être soumise au Parlement pour son approbation définitive.
Le texte classe le langage et les images à caractère violent et sexuel en plusieurs catégories (article 6). Selon leur classification, ces images seront diffusées pendant l'une ou l'autre des trois tranches horaires définies par l'article 7 de la loi : un horaire "tout utilisateur" (entre
7 heures et 19 heures) au cours duquel les enfants doivent pouvoir regarder seuls la télévision ; un horaire "supervisé" (entre 5 heures et
7 heures et entre 19 heures et 23 heures), pendant lequel les mineurs sont surveillés par leurs parents ; et un horaire adulte (entre 23 heures et 5 heures du matin).
L'article 28 liste les infractions. Celles-ci sont passées en seconde lecture de 47 à 78. Deux types de sanctions sont prévus : la cession forcée d'espaces pour des messages culturels et éducatifs ; des amendes pouvant aller jusqu'à 2 % des revenus fiscaux bruts déclarés par le média l'année antérieure. La diffusion "d'images de violences lors d'émissions d'information en horaire tout utilisateur" est ainsi interdite sous peine de cession forcée d'espace, sauf si elle est "indispensable pour la compréhension de l'information". Les médias audiovisuels risquent une amende maximale en cas de diffusion d'images montrant des enfants ou des adolescents "utilisant un langage ou adoptant des comportements sexuels ou violents inadaptés pour leur âge".
Par ailleurs, parmi les infractions réprimées, figurent des éléments sans lien apparent avec l'objet initial de la loi tels que la diffusion d'images qui "promeuvent, font l'apologie ou incitent à la guerre (…), à l'altération de l'ordre public (…), au délit" (article 29). Pour ce type d'infraction, le texte prévoit la suspension de la chaîne pendant
72 heures. En cas de récidive dans un délai inférieur à cinq ans, l'habilitation, voire la concession, pourront être révoquées.
L'article 20 confie le contrôle de l'application de la loi à un Directoire de la responsabilité sociale des radios et télévisions dont 7 des 11 membres sont désignés par les pouvoirs publics. Le directoire est chargé de dicter les sanctions contre les médias fautifs. Seule la révocation de la concession revient à l'"organe recteur en matière de télécommunications" (article 29), sans plus de précision. Dans la version antérieure du texte il était question du ministre des Infrastructures.
L'article 33 a été maintenu. Dans sa rédaction avant discussion, cet article donnait notamment le pouvoir à la Commission nationale des télécommunications (Conatel, entité publique chargée de réguler les licences attribuées par l'Etat placée sous l'autorité du ministère des Infrastructures) d'interdire, à titre de "mesure conservatoire", la diffusion d'images qui "promeuvent, font l'apologie ou incitent à la guerre (…), à l'altération de l'ordre public (…), au délit".