Première semaine de monitoring des médias publics : net déséquilibre en faveur d'Abdoulaye Wade
Dans le cadre d'une mission de monitoring des médias publics sénégalais, Reporters sans frontières a noté que la couverture de l'actualité politique, durant la première semaine de la campagne électorale, a été marquée par un net déséquilibre en faveur du président sortant. L'organisation recommande notamment au gouvernement de respecter le principe de la "réserve ministérielle".
De forts écarts
Dans la semaine du 5 au 11 février, le quotidien Le Soleil a consacré toutes ses unes à Abdoulaye Wade, photo à l'appui. Sa ligne éditoriale est clairement favorable au candidat sortant, même si un effort de présentation de tous les candidats a été consenti. L'actualité du PDS est systématiquement traitée à part. La surface rédactionnelle occupée par le candidat du PDS dans ce quotidien a varié entre 32 et 46% selon les jours, tandis que les autres candidats atteignent individuellement un total de 16% maximum. L'organisation a noté, par ailleurs, la publication en une, dans le numéro du week-end des 10 et 11 février, d'un photomontage montrant le président sortant au côté de l'inscription "Wade président". APS
Des efforts, mais le PDS favorisé
L'agence de presse sénégalaise, malgré ses nombreuses dépêches consacrées à l'ensemble des candidats, a également favorisé le président sortant. De jour en jour, le nombre d'évocations d'Abdoulaye Wade ou de ses soutiens a varié de 12 et 31% du contenu politique total, contre 2 à 21% pour le candidat de la coalition Alternative 2007, Moustapha Niasse (AFP), et 4 à 16% pour le candidat de la coalition Jubanti Sénégal, Abdoulaye Bathily (LD/MPT). Dans la semaine, le candidat PDS et ses soutiens ont comptabilisé 56 dépêches et évocations, contre 24 pour le candidat du LD/MPT et ses soutiens. RTS 1
Un gouvernement envahissant, une couverture partisane
Sur l'ensemble de la semaine, la couverture de l'actualité politique par la chaîne de télévision publique RTS 1 n'a pas respecté la règle de l'égalité entre les différents candidats. Abdoulaye Wade a enregistré un temps d'antenne de 48 minutes et 56 secondes, alors que le temps d'antenne de chacun des autres candidats a varié entre 35 et 39 minutes. Cela s'explique notamment par un plus grand temps d'antenne accordé aux soutiens du candidat Wade, dans le cadre des journaux d'information. De plus, Reporters sans frontières s'inquiète de la présence massive des activités du gouvernement dans les journaux d'information. L'action gouvernementale, sans rapport direct avec la campagne électorale, a totalisé 2 heures 12 minutes et 26 secondes sur la RTS 1. Les interventions fréquentes du Premier ministre Macky Sall, directeur de campagne du président sortant, et celles du ministre de l'Intérieur, Ousmane N'gom, tous deux membres du parti présidentiel et soutiens affichés d'Abdoulaye Wade, contreviennent au principe de la "réserve ministérielle" indispensable à l'équilibre d'une campagne électorale. Reporters sans frontières note enfin que cette omniprésence est aggravée par le fait que les projets annoncés par le gouvernement vont au-delà de l'échéance du scrutin, et s'apparentent à la présentation d'un programme électoral. RSI et la chaîne nationale
Déséqulibre en faveur du PDS
Sur RSI et la chaîne nationale, les temps d'antenne accordés aux différents candidats varient entre 1 heure 40 minutes et 2 heures 20 minutes. A nouveau, le président sortant Abdoulaye Wade se démarque nettement des autres candidats avec près de 3 heures d'antenne (2 heures 59 minutes). Recommandations A la lumière de ces premières constatations, Reporters sans frontières recommande : - Au gouvernement sénégalais de s'abstenir d'intervenir de manière ostentatoire dans la campagne électorale et de respecter le principe de la "réserve ministérielle". - Aux rédacteurs en chef des médias publics de veiller à équilibrer la couverture de l'activité gouvernementale avec l'actualité de la société civile et des éventuelles voix critiques du gouvernement. La rédaction en chef de la RTS 1, notamment, doit veiller à ce que le journal en wolof fasse preuve de plus d'équité dans le traitement et le commentaire de l'actualité. De plus, le respect du principe de la "réserve ministérielle", à défaut d'être observé par le gouvernement, doit l'être par les médias publics. L'organisation recommande, plus généralement, aux médias publics, de veiller à une plus grande équité dans le traitement de l'actualité des différents candidats. ---------- Mission. Reporters sans frontières mène, du 4 février 2007 à la clôture du scrutin présidentiel, une mission de monitoring des médias publics sénégalais. Conduite depuis Dakar par une équipe d'observateurs, cette mission a pour mandat de mesurer les temps d'antenne et de parole des différentes forces politiques en lice sur les antennes de la radio et de la télévision publiques, ainsi que l'espace consacré à ces forces politiques dans le quotidien Le Soleil et au sein de l'agence de presse APS. L'objectif de la mission est de veiller au respect des règles d'équité. Méthodologie. Reporters sans frontières observe et mesure l'équilibre du tems d'antenne des candidats dans les journaux d'information en français et en wolof, ainsi que l'émission spéciale "La parole aux candidats", diffusés sur la chaîne de télévision publique RTS 1, la radio publique Radio Sénégal internationale (RSI) et la chaîne nationale RTS. Pour la presse écrite, l'organisation compare la surface occupée par chaque candidat et ses soutiens dans les pages de l'unique journal public, Le Soleil. En ce qui concerne l'Agence de presse sénégalaise (APS), Reporters sans frontières a relevé le nombre de fois où chaque candidat est cité.
Cette mission est réalisée avec l'aide financière de l'Union européenne