Pour les journalistes en Iran, toute liberté est conditionnelle : Hossein Yazdi et Nazila Maroufian graciés et de nouveau arrêtés

Emprisonnés en 2022, graciés en début d’année, deux journalistes ont été de nouveau arrêtés par les autorités iraniennes. Reporters sans frontières (RSF) demande la libération immédiate du directeur de média Hossein Yazdi et de la journaliste indépendante Nazila Maroufian.

Mise à jour : Depuis le 13 août 2023,  Nazila Maroufian est en liberté provisoire après des emprisonnements répétés pour "propagande & fausses nouvelles" contre le régime. Elle a été libérée sous caution de 300 millions de tomans iraniens ( 6500 euros). Une condition qui a vocation à intimider les journalistes et restreindre toujours plus le droit à l’information

 

Ils faisaient pourtant partie des journalistes graciés, en février 2023, par le Guide suprême de l’Iran, Ali Khamenei. Mais ces grâces avaient un prix, et n’étaient finalement qu’un leurre de clémence. L'arrestation de Hossein Yazdi, directeur de la chaîne d’information sur Telegram Iran Times et du site d’information en ligne Mobin 24, et de la journaliste indépendante Nazila Maroufian vient corroborer cela.

“Pour les journalistes en Iran, toute liberté est conditionnelle : c'est le message que la République islamique veut faire passer en arrêtant deux journalistes récemment graciés. Des grâces qui n’ont jamais été que des menaces. Le journalisme n'est pas un crime à gracier : nous demandons la libération inconditionnelle et immédiate de Hossein Yazdi et de Nazila Maroufian, ainsi que celle de leurs 21 confrères détenus.”

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient

Accusé de propagande contre l'État, Hossein Yazdi a été convoqué pour un interrogatoire le 4 juillet à 9 heures. Il a été arrêté sur le champ par les forces de sécurité d'Ispahan, ville au centre du pays, puis transféré à la prison de Dastgerdi. Une caution de 90 millions de rials (près de 2 000 euros) a été fixée pour sa libération. Sa fille Saba Yazdi a déclaré, sur Twitter, qu'elle n'avait pas été autorisée à lui rendre visite ni à communiquer avec lui depuis le début de sa détention. Le directeur de média souffrirait de problèmes de santé et sa famille craint qu'il n'ait pas accès à des services médicaux. 

Ce même 4 juillet, des agents du ministère du Renseignement ont effectué une descente au domicile de la journaliste indépendante Nazila Maroufian : elle sortait de chez elle lorsque des agents lui ont barré la route. Confisquant son téléphone, ils lui ont demandé de leur ouvrir la porte et ont passé au crible sa maison, y compris ses effets personnels. Son journal intime a été saisi et lu. “La maison n'est plus en sécurité, la rue n'est plus en sécurité, toute sécurité nous a été confisquée,” a-t-elle écrit sur son compte instagram. Nazila Maroofian a été interpellée, quatre jours plus tard, pour un interrogatoire au tribunal d’Evin à Téhéran. Tout comme Hossein Yazdi, elle n'est pas ressortie libre de l’enceinte judiciaire ce 8 juillet. Mais contrairement à lui, aucune caution n'a été fixée pour sa libération. Malgré les demandes de clarification concernant les motifs de son arrestation, les autorités n'ont pas fourni d'explications ni émis de charges d’accusation.

Les deux journalistes avaient d’abord été arrêtés et condamnés dans le cadre du mouvement de protestation qui a suivi la mort de Mahsa Amini en septembre 2022. La journaliste Nazila Maroufian s'est d’ailleurs exprimée très ouvertement ces derniers mois, sur sa période d'emprisonnement. Détenue une première fois le 30 octobre 2022 suite à son interview avec le père de Mahsa Amini pour le site d’information Rouydad24, la journaliste a ensuite été libérée sous caution début janvier, avant d’être condamnée à deux ans de prison avec sursis pour "propagande contre le régime" et "propagation de fausses nouvelles". 

Le 10 février, Nazila Maroofian et Hossein Yazdi, détenus, lui, depuis décembre 2022, ont fait  partie des journalistes graciés dans le cadre d’une mesure d'amnistie. Le journaliste Keyvan Samimi libéré au même moment, a lui aussi été arrêté de nouveau le 20 avril, avant d'être libéré le 22 mai 2023.

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