Pour la première fois depuis la chute de la dictature militaire en 1999, trois journalistes passeront la nouvelle année en prison

Reporters sans frontières exprime sa solidarité envers trois journalistes nigérians qui vont passer la nuit du 31 décembre 2005 au 1er janvier 2006 en détention, dans la ville pétrolière de Port-Harcourt, capitale de l'Etat de Rivers (Sud). Il s'agit d'une première déplorable depuis la restitution du pouvoir aux civils en 1999. « Sous la pression du gouverneur d'un Etat instable, la justice fait subir une épreuve cruelle à trois professionnels de l'information, a déclaré Reporters sans frontières. La presse nigériane ne parvient pas à se libérer de l'étau d'une législation liberticide, d'une police brutale et de gouverneurs autoritaires. En cette veille de Nouvel An, nous demandons leur libération et exprimons notre engagement déterminé auprès de la presse privée, et notamment des trois prisonniers de Port-Harcourt, qui doivent faire face à de périlleux défis. » Clem Ofuokwu, rédacteur en chef de la radio privée Rythm 93.7 FM, et la présentatrice du journal de la station, Cleopatra Taiwo, ont été arrêtés le 19 décembre par des agents du State Security Service (SSS), les services de renseignements. Ils avaient été conduits au commissariat, en compagnie de David Obi, directeur de l'information, et Loknan Dombim, directeur des programmes, après que la radio avait annoncé, le 17 décembre, l'effondrement d'un pont à Choba, à la sortie de Port-Harcourt, une information qui s'est révélée fausse. La radio avait été fermée. Le lendemain, David Obi et Loknan Dombim avaient été relâchés à condition de se présenter quotidiennement à la police, et des excuses officielles du propriétaire de la station avaient été diffusées. Malgré cela, Clem Ofuokwu et Cleopatra Taiwo ont été inculpés de « conspiration en vue de publier et disséminer des fausses nouvelles » et « intention de causer la panique et la peur dans la population et de troubler la paix publique ». Ils sont maintenus en détention jusqu'à ce que le tribunal statue, le 3 janvier 2006, sur la demande de mise en liberté sous caution déposée par leur avocat. De son côté, Owei Kobina Sikpi, directeur de publication de l'hebdomadaire privé Weekly Star, s'apprête à entamer son troisième mois de détention. Après avoir été arrêté le 11 octobre à l'imprimerie de son journal et détenu six jours au secret, il avait été présenté, le 17 octobre, devant la Haute Cour de Port-Harcourt. Celle-ci avait prononcé à son encontre sept chefs d'inculpation de « publication de fausses nouvelles ». Les articles incriminés évoquaient notamment des accusations de blanchiment d'argent par le gouverneur de l'Etat de Rivers, Peter Odili, les affrontements entre des miliciens séparatistes et l'armée dans la région du delta du Niger et la présence au Nigeria de l'ancien président du Liberia, Charles Taylor. Toutes ses demandes de mise en liberté sous caution ont été rejetées.
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Updated on 20.01.2016