Pour l’envoi d’un rapporteur spécial en Iran afin de faire la lumière sur l’ampleur de la répression

Comme dénoncé par le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon dans son rapport remis au Conseil des droits de l’homme, l’Iran accentue sa répression contre les professionnels des médias. Le rédacteur en chef de l'Agence France-Presse a été expulsé du pays en fin de semaine dernière. Les accréditations de représentants de médias étrangers ont été annulées par le ministère de la Culture et de l’Orientation islamique. Abdolreza Tajik, prix RSF-FNAC de la liberté de la presse 2010, a été condamné à six ans de prison pour sa collaboration avec le Cercle des défenseurs des droits de l’homme. Plusieurs journalistes et net-citoyens ont récemment été convoqués par différents tribunaux révolutionnaires ou par le ministère des Renseignements.   Le 14 mars 2011, le secrétaire général des Nations unies a publié son rapport trimestriel dans lequel il se dit « profondément troublé par les informations faisant état d'une augmentation des exécutions, des détentions et arrestations arbitraires, des procès injustes, des possibles tortures et mauvais traitements sur des défenseurs des droits de l'homme, juristes, journalistes et militants de l'opposition ». Il  regrette que « l'Iran n'ait autorisé aucun des rapporteurs thématiques de l'ONU à se rendre sur place depuis 2005 ». Reporters sans frontières soutient la résolution présentée par plusieurs pays, dont la Suède, la Zambie, la Macédoine et les États-Unis, qui demandent aux Nations unies de mandater un rapporteur spécial, afin d’enquêter et de rédiger un rapport sur la situation des droits fondamentaux en Iran, et exigent l'entière collaboration de la République islamique avec ce rapporteur. Cette résolution est un espoir pour des centaines d’Iraniens emprisonnés dans des conditions inhumaines et des dizaines d’autres condamnés à la peine de mort. Nous exhortons tous les membres du Conseil de sécurité à voter en faveur de ce texte. Selon son avocat Me Mohammad Sharif, le journaliste Abdolreza Tadjik, prix RSF-FNAC de la liberté de la presse 2010, a été condamné à six ans de prison ferme. Le journaliste a été reconnu coupable pour « collaboration » avec le Cercle des défenseurs des droits de l’homme et « publication de fausses informations ». Incarcéré le 12 juin 2010 pour la troisième fois au moins d’un an, Abdolreza Tadjik avait été libéré le 22 décembre dernier, suite au versement d’une troisième caution de 500 millions de tomans (environ 370 000 euros) par sa famille. La police iranienne avait fermé, le 21 décembre 2008, les bureaux du Cercle, au motif que l’organisation n’avait pas d’autorisation du ministère de l’Intérieur « pour mener des activités ». Argument qui avait été démenti par l’avocate Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix et fondatrice du Cercle des défenseurs des droits de l’homme. Le 8 mars dernier, Mir Hossein Mousavi, propriétaire du journal suspendu Kalameh Sabaz, et sa femme, l’intellectuelle et écrivain à succès Zahra Rahnavard, ont pu rencontrer leurs enfants à leur domicile. Dans une lettre rendue publique, les enfants du couple ont confirmé qu’ils avaient pu rendre visite à leurs parents sous la surveillance d’agents des services de renseignements : « La maison était pleine d’agents ; l’un d’entre eux s’est même immiscé dans la conversation comme s’il était un membre de notre famille ! » En revanche, nous sommes toujours sans nouvelles de Mehdi Karoubi, propriétaire du journal suspendu Etemad Melli, et de sa femme Fatemeh Karoubi, rédactrice en chef de magazine suspendu Iran dokhte. Le 27 février dernier, Gholam-Hossein Mohseni Ejei, procureur général de Téhéran, a déclaré lors d’un point presse que MM. Mir Hossein Mousavi et Mehdi Karoubi étaient « en résidence surveillée et (que) leurs contacts avec l’extérieur - téléphone, Internet – (étaient) coupés », sans pour autant préciser le lieu de leur détention et le motif de leur arrestation. Reporters sans frontières considère toujours MM. Mousavi et Karoubi et leurs épouses en détention. A la prison d’Evin ou chez eux en présence d’interrogateurs d’Evin, le résultat est le même : ils ne sont pas libres. Nous sommes inquiets pour leur santé. La République islamique doit mettre un terme à cette situation. Le régime de Téhéran poursuit son verrouillage des médias et de l’information indépendante. Une dizaine de journalistes étrangers se sont vu retirer leur carte de presse, le 15 février, au lendemain d'une manifestation de soutien au soulèvement en Egypte qui avait rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes. Le 11 mars 2011, Jay Deshmukh, chef de rédaction de l’Agence France-Presse à Téhéran, a été expulsé. Depuis 2007, c’est le troisième responsable de l’agence à devoir quitter le pays. Depuis le 12 juin 2009, une vingtaine de journalistes et correspondants étrangers ont été expulsés du pays : Yolanda Alvarez, envoyée spéciale pour la chaîne de télévision espagnole RTVE ; le journaliste gréco-britannique, Iason Athanasiadis, travaillant entre autres pour le Washington Times, arrêté le 22 juin 2009 et expulsé après 15 jours de détention ; un équipe de France 3 ; John Leyne, correspondant de la BBC. Deux journalistes néerlandais de la chaîne Nederland2, et une équipe belge de la RTBF. Angeles Espinosa,  journaliste d' El Pais  a reçu l'ordre de quitter le pays le 24 octobre 2010. De nombreux autres correspondants ont été expulsés mais leurs rédactions préfèrent garder le silence pour préserver leur chance de renvoyer un journaliste dans le pays.
Publié le
Updated on 20.01.2016