Pologne : condamnation “absurde et scandaleuse” d’un journaliste ayant révélé le soutien d’un collaborateur du gouvernement à l'invasion de l'Ukraine

En Pologne, le journaliste Tomasz Piątek a été condamné, le 23 juin, à une amende pour avoir écrit qu’un officier, diffusant la propagande russe, soutenait l’invasion de l’Ukraine. Alors que le journaliste fait appel, Reporters sans frontières (RSF) soutient celui qui fut lauréat de son prix pour la liberté de la presse 2017."

“Le journaliste Tomasz Piątek a agi dans l’intérêt public : il a révélé qu’en qualifiant les Ukrainiens de ‘fascistes’, un officier polonais diffusait, en 2014, la propagande russe qui, par la suite, a servi de prétexte à l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, déclare le responsable du bureau Union européenne et Balkans de RSF, Pavol Szalai. La décision de la cour, aussi absurde que scandaleuse, doit être rejetée en appel.”

Le 23 juin, le journaliste d’investigation a été condamné à une amende de 1 000 euros et a également été sommé de présenter ses excuses, à travers les médias, à l’officier polonais, le colonel Krzysztof Gaj, qui avait déposé plainte contre lui. En dépit des appels de RSF, un tribunal du district de Varsovie a considéré que le journaliste avait “calomnié” Krzysztof Gaj en affirmant, en 2017, qu’il avait soutenu l’invasion de l’Ukraine et qu’il entretenait “des liens dangereux avec le Kremlin, la mafia et le lobbying ». Tomasz Piątek fondait ses affirmations sur l’article “Les fascistes à nos portes” signé par l’officier en 2014 - l’année de l’invasion du Donbass par la Russie -, dans lequel il déclarait que les Ukrainiens étaient des “fascistes” et que le président Vladimir Poutine avait “raison de les combattre”. Dans son livre, le journaliste révélait également qu’avant de travailler au ministère de la Défense, Krzysztof Gaj collaborait avec une fondation dont le directeur était en lien avec la mafia russe.

L’ensemble des motifs de la cour n’a pas été rendu public, le plaignant n’ayant pas donné son consentement, et celui-ci étant nécessaire pour une totale transparence dans les procès en diffamation en Pologne. Une confidentialité partielle qui s'applique également au dossier de l'affaire. Malgré l’autorisation du juge, RSF n’a toujours pas obtenu de la cour, l’accès au dossier.

L’organisation soutient pleinement Tomasz Piątek qui fait appel du verdict de première instance. L’ouvrage sur le ministère de la Défense polonais citant Krzysztof Gaj a valu plusieurs plaintes à son auteur, mais il lui a également valu le prix de la liberté de la presse décerné par RSF en 2017. Entretemps, l’officier a quant à lui intégré le cabinet du Premier ministre en tant que conseiller.

La Pologne occupe le 66e rang sur 180 pays au Classement mondial pour la liberté de la presse établi par RSF en 2022.

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