Le 28 janvier 2015, la police malaisienne a fait irruption dans les bureaux du caricaturiste Zunar, de son vrai nom Zulkiflee Anwar Alhaque, et saisi une centaine de ses ouvrages de caricatures. Reporters sans frontières (RSF) dénonce le harcèlement à l’encontre du dessinateur de presse et réclame la restitution de tous ses ouvrages.
Des policiers du département des enquêtes criminelles, menés par l’assistant superintendant (ASP) Lim Ah Heng, ont pénétré dans les bureaux du caricaturiste Zunar et interrogé ses collaborateurs, le 28 janvier 2015, à Kuala Lumpur. Invoquant le
Sedition Act, une loi répressive ayant permis à plusieurs reprises aux autorités de lancer des procédures à l’encontre de journalistes et de blogueurs, les policiers ont confisqué plus de 150 exemplaires de deux de ses ouvrages de caricatures. Aucun mandat n’a été présenté par la police avant la perquisition.
Les titres concernés sont “Conspiration pour emprisonner Anwar” (Conspiracy to Imprison Anwar) et “Pirates des Carri BN” (Pirates of the Carry BN) en malaisien et en anglais. Le premier est une référence au procès d’une figure de l’opposition Anwar bin Ibrahim, poursuivi par la justice depuis 2008 pour des accusations de “sodomie”, après avoir annoncé son intention de se présenter aux élections législatives du pays. Le second titre détourne l’acronyme du Barisan National (BN), coalition politique du Premier ministre atuel Najib Abdul Razak, cible fréquente des critiques de
Zunar.
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Cette nouvelle perquisition et la confiscation des ouvrages de Zunar sont une nouvelle preuve du harcèlement judiciaire à l’encontre du journaliste, déclare Benjamin Ismaïl.
Si certaines personnes, y compris le Premier ministre ou des officiels du gouvernement, ont quelque chose à redire sur les caricatures de Zunar, ils peuvent dans un premier temps s’exprimer par voie de presse. Si ces mêmes personnes estiment qu’elles peuvent être victimes de diffamation, elles peuvent éventuellement engager des poursuites au civil. Il leur faudra alors démontrer que l’intention de Zunar n’était pas de faire rire.”
Dans tous les cas, l’utilisation de lois relevant du pénal est totalement illégitime et disproportionnée. RSF demande l'arrêt immédiat des procédures contre Zunar et la fin du harcèlement contre le caricaturiste et ses collaborateurs.
Ce n’est pas la première fois que Zunar fait l’objet d’un tel raid policier. Entre 2009 et 2010, plusieurs centaines de ses ouvrages avaient été confisqués.
Suite à la parution de son album de caricatures "Cartoon-o-phobia", Zunar avait été interpellé le 24 septembre 2010 et toutes les copies de ses ouvrages avaient été saisies. A l’époque, Zunar avait été placé en détention pendant deux jours, puis avait déposé plainte contre l’usage abusif du Sedition Act. En juillet 2012, la
Haute cour avait rendu une décision contre le caricaturiste, affirmant que son arrestation était conforme au Sedition Act, et validant ainsi la position du gouvernement selon laquelle la parution de caricatures à caractère politique est un crime. Le caricaturiste ne peut organiser d’expositions de ses oeuvres dans le pays
La Malaisie est 147e sur 180 pays dans le
Classement mondial de la liberté de la presse 2014 établi par Reporters sans frontières.