Pacte numérique mondial : RSF demande aux États de revoir leur copie et de prendre en compte le droit à l’information
Les États membres de l’Organisation des Nations unies (ONU) négocient actuellement un projet de Pacte numérique mondial dont l’adoption doit intervenir lors du Sommet de l’avenir organisé par le secrétaire général de l’ONU en septembre 2024. Reporters sans frontières (RSF) appelle à ne pas laisser cette initiative ambitieuse se transformer en rendez-vous manqué pour la régulation de l’espace informationnel mondial.
Le 5 avril dernier, une “version zéro” du projet de Pacte numérique mondial a été présentée aux États membres des Nations unies par les délégations de Suède et de Zambie, chargées de co-faciliter les négociations sur ce texte. Suivant l’objectif poursuivi par le Sommet de l’avenir de “développer des solutions multilatérales aux défis de notre temps”, le Pacte numérique mondial entend “définir des principes communs pour un avenir numérique ouvert, libre et sûr pour tous”.
Le 2 mai, veille de la Journée mondiale de la liberté de la presse, les États se réuniront pour effectuer une deuxième lecture du projet de texte. Ce rendez-vous est l’occasion à ne pas manquer de protéger dans l’espace global et numérique de l’information le journalisme libre, pluraliste et indépendant et le droit de tous d’accéder à une information fiable. Ces notions ne figurent à aucun endroit du texte à ce stade.
“Le manque de régulation de l’espace numérique permet à la désinformation et à la propagande de prospérer sur Internet, au détriment du journalisme de qualité et de l’information fiable. Le cadre proposé par le Pacte numérique mondial a vocation à répondre à ce défi, c'est pourquoi nous soutenons la démarche du secrétaire général des Nations unies. Mais sans garanties fortes pour le droit à l’information et le journalisme, le texte ne sera pas à la hauteur de l’enjeu démocratique. Nous appelons les États à se mobiliser pour le droit à l’information.
RSF appelle les États, en particulier les 52 États signataires du Partenariat international information et démocratie – engagés en faveur d’une régulation démocratique de l’espace mondial de l’information et de la communication – à inscrire les recommandations suivantes dans le projet de Pacte numérique mondiale :
1- Les États s’engagent à accroître les exigences légales pesant sur les principaux acteurs du numérique
Les mécanismes purement incitatifs ne suffisent pas. Le Pacte numérique mondial devrait inclure des engagements plus fermes de la part des États pour imposer aux principaux acteurs du numérique (développeurs, plateformes de réseaux sociaux, entreprises d’intelligence artificielle (IA), etc.) des obligations légales de respecter les droits fondamentaux, y compris le droit à l’information.
2- Les États s’engagent à garantir l’accès à une information fiable et plurielle en soutenant le journalisme
La version zéro du Pacte reconnaît que “l’accès à des informations et des connaissances pertinentes, fiables et exactes est essentiel pour un espace numérique inclusif, ouvert, sûr, et sécurisé”. Mais il n’en tire aucune conséquence ni mesures concrètes pour l’assurer. Le Pacte numérique mondial devrait souligner la contribution fondamentale du journalisme à cet égard et exiger des États qu’ils s’engagent à assurer les conditions nécessaires pour le développement d’un journalisme fiable et indépendant sur Internet. RSF propose que le Pacte numérique mondial soutienne explicitement les médias qui obtiennent la certification Journalism Trust Initiative (JTI) en exigeant des plateformes qu’elles mettent en avant les contenus produits selon les méthodes et critères déontologiques édictés par la norme JTI.
3. Les États s’appuient sur le Partenariat information et démocratie pour la mise en œuvre du Pact
Alors que le projet de Pacte numérique mondial inclut la création de nouvelles instances, tel qu’un panel scientifique international sur l’IA ou un dialogue annuel mondial sur la gouvernance de l’IA RSF propose que le suivi de la mise en œuvre du Pacte intègre des mécanismes de coopération déjà existants, à l’instar du Partenariat, de son Forum et de son Observatoire sur l’information et la démocratie.
Pour plus d’infos, lire ici les recommandations de RSF adressées à la délégation de l’Union européenne auprès des Nations unies