Nouvel élément troublant dans l'enquête sur l'assassinat du journaliste Roberto Javier Mora García
Le rapport d'une commission d'enquête indépendante a révélé que l'arme retrouvée au domicile des deux suspects ne correspond pas à celle décrite par l'autopsie. "Cet élément troublant jette une nouvelle ombre sur le sérieux de l'enquête sur la mort, le 19 mars dernier, de Roberto Javier Mora García", s'est inquiétée Reporters sans frontières.
Dans un rapport publié le 30 mai 2004, la Commission In Memoriam (CIM) a révélé que l'arme retrouvée au domicile des suspects ne correspondait pas à celle décrite par l'autopsie. Le rapport médico-légal fait état de blessures infligées avec un couteau à double tranchant alors que le couteau retrouvé chez les suspects n'a qu'un fil coupant. Le 27 avril, Francisco Cayuela, alors procureur de l'Etat de Tamaulipas, avait annoncé que, selon des analyses de l'ADN, le sang retrouvé sur l'arme blanche était celui du journaliste. Dans son rapport, la CIM, qui a obtenu la copie des enregistrements vidéo des interrogatoires des deux suspects, revient également sur les allégations de tortures. Elle précise que Mario Medina Vázquez avait affirmé avoir été arrêté le 26 mars vers 19 heures alors que les autorités déclarent l'avoir interpellé à 23 heures. C'est pendant ce laps de temps qu'il affirme avoir été torturé et menacé de mort. De nationalité américaine, Mario Medina Vázquez avait dénoncé ces faits auprès du consulat de son pays qui avait formellement protesté. La CIM dénonce l'absence d'enquête sur ces actes de torture présumés. Cependant, après deux reports successifs, la confrontation entre Israel Castellanos Castillo, l'un des deux policiers mis en cause par les détenus, et Hiram Oliveros Ortiz a eu lieu le 2 juin. Une confrontation avec l'autre policier devait avoir lieu le 3 juin. Tué en prison
Dans son introduction, le rapport de la commission évoque également le meurtre en prison de Mario Medina Vázquez le 13 mai. Il a été poignardé à plus de 80 reprises par Roberto Herrera González, condamné pour deux homicides et pour possession de drogue. L'agresseur a d'abord affirmé avoir agi parce que la victime l'avait mis en cause à tort dans un crime avant de changer de version. Michael Yoder, consul des Etats-Unis à Nuevo Laredo, a affirmé que les autorités judiciaires mexicaines lui avaient garanti que, pour leur propre sécurité, Mario Medina Vázquez et Hiram Oliveros Ortiz étaient détenus dans une cellule isolée. Le consul s'est également étonné que le lieu où ce dernier a été tué ait été nettoyé avant l'arrivée de la police, privant celle-ci de précieux indices. Le 17 mai, depuis Washington, les autorités américaines ont exigé une enquête sur la mort de leur ressortissant. Le procureur de l'Etat de Tamaulipas, Francisco Cayuela, a présenté sa démission et été immédiatement remplacé. Rappels
Roberto Javier Mora García avait publié plusieurs articles sur les activités du Cartel du Golfe, une organisation de trafiquants de drogue de la région. Il dénonçait l'implication présumée de policiers et de fonctionnaires dans ce trafic ou encore les méthodes des "Zetas", d'anciens policiers chargés d'extorquer des entrepreneurs pour le compte des narcotrafiquants. Il avait également mis en cause la responsabilité des autorités dans le climat d'impunité qui règne dans l'Etat de Tamaulipas. Une délégation de la Commission In Memoriam s'est rendue dans l'Etat de Tamaulipas entre le 22 et le 24 avril 2004. Cette commission est composée des organisations mexicaines Centro de Estudios Fronterizos y de Promoción de los Derechos Humanos (CEFPDH), Libertad de Información-México (LIMAC), Centro de Periodismo y Etica Pública (CEPET), et des organisations internationales PEN Club et Periodistas Frente a la Corrupción (PFC). Elle travaille en étroite collaboration avec Reporters sans frontières. Lire l'intégralité du rapport