RSF appelle l'administration Trump à respecter la libre circulation de l’information sur le COVID-19

Reporters sans frontières (RSF) s'alarme de la multiplication des refus d'information ou d’accès auxquels se heurtent les médias aux Etats-Unis depuis le déclenchement de la crise du coronavirus. L’organisation dénonce également les mesures de rétorsion contre les journalistes, et les fonctionnaires de la santé qui veulent informer sur l’épidémie aux États-Unis.

Aux États-Unis, rendre compte librement de l’épidémie du coronavirus est un enjeu de santé publique urgent. Les journalistes et ceux qui détiennent des informations cruciales sur la situation sanitaire dans le pays doivent pouvoir s’exprimer librement, sans craindre les intimidations ou les sanctions.

 

Ainsi, le 9 avril, des journalistes du New York Times et du site d’investigations indépendant ProPublica.org ont été inculpés pour intrusion par effraction suite à un reportage réalisé à l'université Liberty à Lynchburg (Etat de Virginie). Cet établissement d’enseignement supérieur a décidé de rouvrir partiellement son campus alors que la plupart des autres universités ont fermé leurs portes pour lutter contre la propagation de coronavirus.

 

Les professionnels du réseau fédéral de santé publique (Centers for Disease Control - CDC), ne peuvent pas s’exprimer librement à propos des conditions d’exercice de leurs métiers, souvent difficiles. L'un d’entre eux a été licencié après avoir répondu aux questions du quotidien Seattle Times (État de Washington). Un autre a fait l’objet de réprimandes après avoir confié au quotidien britannique Metro sa peur d'aller travailler. Le 2 avril, le Knight First Amendment Institute de l’université de Columbia a entamé une procédure judiciaire contre les CDC pour cette entrave à la liberté d'expression.

 

Début avril encore, le secrétaire par intérim de la Marine, Thomas Modly, a démis de ses fonctions le capitaine Brett E. Crozier, commandant du porte-avions Theodore Roosevelt. Son tort ? Avoir alerté sur l’épidémie de coronavirus sur son navire. Le COVID-19 a infecté près de 600 membres de l’équipage (sur environ 5 600 personnes), dont Crozier lui-même, et a été à l’origine d’un décès.

 

Interdit d'apparaître sur CNN

 

En février, le président Donald Trump a demandé à son vice-président Mike Pence de coordonner l’action du groupe d’experts gouvernementaux en charge de la crise sanitaire et de gérer leurs relations avec la presse. Début avril, Pence leur a momentanément interdit d'apparaître sur CNN. Il a également sommé le Docteur Anthony Fauci, l’un des spécialistes, de ne s’exprimer publiquement qu’avec son approbation. 

Bien qu’il semble que certaines restrictions aient été assouplies ces derniers jours, l’attitude de l’administration en ce qui concerne la libre expression des médias et des professionnels de santé reste ambiguë. 

 

"L'administration Trump a critiqué à plusieurs reprises le gouvernement chinois pour sa gestion de la crise sanitaire. Mais elle agit de façon similaire en muselant des experts, en sanctionnant ceux qui s’expriment en tant que lanceurs d’alerte et en faisant pression sur les journalistes, déclare Dokhi Fassihian, directrice de RSF États-Unis. Pour être soutenue dans son action, l'administration Trump doit d'abord favoriser la libre circulation de l’information et permettre à ses collaborateurs de s'exprimer sans entrave."

 

Les médias se heurtent également à de nombreux refus d’informations ou d’accès. Au Missouri, le gouverneur Mike Parson a ainsi interdit à des représentants de la presse d'assister à ses briefings quotidiens, exigeant que les questions lui soient transmises par mail une heure avant le début de réunion, afin de pouvoir les sélectionner. Le 28 mars, un reporter de Floride s’est vu refuser l’entrée au point presse Covid-19 du gouverneur Ron DeSantis après avoir demandé le respect de la “distanciation sociale” lors des briefings précédents.

 

"Baisser la voix"

 

Dans le même temps, à Washington, la Maison Blanche continue d'agresser verbalement les médias lors des points de presse quotidiens sur le coronavirus. Le 19 avril, lors d'un briefing, le président Trump a attaqué la journaliste de CBS Weijia Jiang, lui intimant l’ordre de "baisser la voix" et de s’exprimer "agréablement et doucement". Elle lui demandait pourquoi l'administration n'avait pas déployé plus de moyens pour empêcher la propagation du coronavirus…

 

Les États-Unis occupent la 45e place au Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi RSF.

Publié le
Mise à jour le 23.04.2020