États-Unis : RSF et une coalition de 36 organisations de défense des droits humains appellent le Congrès à protéger les journalistes de l’USAGM dont la vie est menacée

Dans une lettre adressée au Congrès américain, Reporters sans frontières (RSF) et une coalition d’organisations de défense des droits humains alertent sur les dangers auxquels font face les employés de l’Agence des États-Unis pour les médias mondiaux (USAGM), à la suite d’un décret présidentiel signé par Donald Trump démantelant l’agence. La coalition a soumis des recommandations politiques et appelé le Congrès à agir pour obtenir la libération des 11 journalistes de l’USAGM actuellement emprisonnés à l’étranger et à garantir qu’aucun journaliste travaillant pour un média affilié à l’agence ne soit expulsé vers un pays où il risque d’être persécuté.

Le 1ᵉʳ avril 2025, RSF, PEN America et 35 autres organisations ont adressé une lettre aux membres du Congrès, les appelant à exhorter l’administration américaine, en particulier le département d’État, à allouer les ressources nécessaires pour soutenir les journalistes étrangers de l’USAGM. Nombre d’entre eux pourraient bientôt être exposés à de graves dangers s’ils sont contraints de retourner dans leur pays d’origine en raison de leurs activités journalistiques.

“Il est inacceptable que ces journalistes, qui risquent leur vie pour révéler l’ampleur de la répression dans leurs pays d’origine, soient abandonnés à leur sort. Le Congrès des États-Unis doit prendre ses responsabilités pour protéger ces reporters et tous les médias financés par l’USAGM, financés par le Congrès lui-même. Cette responsabilité n’est pas seulement morale : elle découle de l’engagement des États-Unis à défendre les principes de démocratie et de liberté de la presse.”

Thibaut Bruttin
Directeur général de RSF

L’USAGM, qui a été de facto supprimée par un décret signé par Donald Trump, distribue des fonds approuvés par le Congrès à des médias publics tels que Voice of America (VOA), Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL) et Radio Free Asia (RFA). Leurs journalistes jouent un rôle essentiel en fournissant des informations indépendantes sur des sujets politiquement sensibles dans des pays hostiles à la liberté de la presse. 

Le coût de cet engagement est lourd. À ce jour, onze journalistes de l’USAGM sont emprisonnés dans le monde : deux par la Russie, cinq au Vietnam, un au Bélarus, un en Azerbaïdjan et deux en Birmanie. Certains purgent des peines particulièrement sévères, à l’instar de la contributrice du service birman de RFA Shin Daewe, condamnée à une peine dela prison à vie, par la suite réduite à 15 ans, pour des accusations de prétendu “soutien” au terrorisme.

De plus, au moins 84 journalistes de l’USAGM basés aux États-Unis avec des visas de travail risquent désormais l’expulsion vers des pays où ils pourraient faire l’objet de poursuites et de graves persécutions. Parmi eux, au moins 15 journalistes de RFA et 8 de VOA, originaires du Bélarus, du Cambodge, de Chine, de Hong Kong, de Russie et du Vietnam, sont en danger immédiat : s’ils sont expulsés, ils risquent d’être arrêtés dès leur arrivée et, potentiellement, emprisonnés.

 

Recommandations de la coalition au Congrès :

  • Exhorter le département d’État à mobiliser les ressources nécessaires pour obtenir la libération des 11 employés de l’USAGM actuellement emprisonnés et éviter qu’ils ne soient abandonnés à leur sort.
  • Solliciter les services d’immigration américains (USCIS) afin d’accélérer le traitement et de donner la priorité aux demandes d’immigration ou de protection pour ces journalistes ayant travaillé avec des médias financés par l’USAGM, et demander au département d’État et à l’USCIS de suspendre la règle des 30/60 jours après un licenciement, qui met fin à leur droit de séjour aux États-Unis.
  • Organiser en urgence une audience au Congrès pour mettre en lumière la situation de ces journalistes courageux qui ont couvert des sujets sensibles dans leur pays d’origine pour des médias financés par le gouvernement américain et qui, aujourd’hui, risquent l’expulsion. L’objectif serait de garantir qu’aucun journaliste travaillant pour l’USAGM ne soit contraint de retourner dans un pays où il risque la persécution.
  • Légiférer sur le statut légal précaire de ces journalistes, fragilisé par la fermeture effective des entités financées par l’USAGM.
  • Demander en urgence au département de la Sécurité intérieure (DHS) de reprendre le traitement des demandes de carte verte pour les réfugiés et demandeurs d’asile, y compris les journalistes affectés par l’arrêt du financement de l’USAGM.

RSF reste pleinement engagée pour défendre les journalistes de l’USAGM. Le 28 mars, un juge américain a fait droit à la demande en référé de suspension de la dissolution de VOA formulée dans le cadre de la plainte déposée par RSF avec une coalition d'employés de VOA et leurs syndicats pour arrêter le démantèlement du média de service public.

Les États-Unis se classent au 55e rang sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse de RSF 2024, après une chute alarmante de dix places par rapport à 2023. 

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