Mort de Volodymyr Karachevtsev : les autorités concluent à un accident

Le 17 septembre 2004, le parquet général d'Ukraine a annoncé, au terme de son enquête, que la mort de Volodymyr Karachevtsev était due à un accident provoqué par la consommation d'une grande quantité d'alcool. « L'enquête est close. Le journaliste, en état d'ébriété avancé, est mort asphyxié après s'être accidentellement pendu », a déclaré à la presse le porte-parole du parquet général, Sergiy Roudenko, précisant que le taux d'alcoolémie du journaliste au moment des faits était de 2,8 grammes par litre de sang. « Les enquêteurs ont analysé les publications de ce journaliste et il n'y a pas de raison de croire que l'un de ses articles ait pu provoquer un tel désir de vengeance. Volodymyr Karachevtsev, rédacteur en chef adjoint de l'hebdomadaire Kurier, collaborateur du journal en ligne Vlasti.net et président du Syndicat régional des journalistes indépendants de Zaporojie (sud-est du pays), avait été retrouvé mort le 14 décembre 2003, pendu à la poignée du réfrigérateur de son appartement à Melitopol. Reporters sans frontières, l'Institut des Mass Medias, ainsi que le Conseil de l'Europe et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, avaient demandé aux autorités de mener une enquête approfondie sur cette affaire. ________________________ 18.12.2003 Reporters sans frontières et l'IMI demandent une enquête approfondie suite à la mort d'un journaliste Volodymyr Karachevtsev, rédacteur en chef adjoint de l'hebdomadaire Kurier, collaborateur du journal en ligne Vlasti.net et président du Syndicat régional des journalistes indépendants de Zaporojie (sud-est du pays), a été retrouvé mort le 14 décembre 2003, pendu à la poignée du réfrigérateur de son appartement à Melitopol. "Les circonstances de la mort de ce journaliste, critique envers les autorités locales, sont particulièrement troublantes et les informations que nous avons pu recueillir sont contradictoires. Etant donné la situation très précaire de la liberté de la presse dans votre pays, et compte tenu des précédents que nous avons tous à l'esprit, nous vous demandons de veiller personnellement à ce que l'enquête de la police soit menée de manière minutieuse, rapide et transparente. A ce stade de l'enquête, écarter arbitrairement la piste professionnelle serait, à nos yeux, une grave erreur", ont écrit Reporters sans frontières et l'Institut des Mass Medias (IMI), organisation ukrainienne de défense de la liberté de la presse, dans un courrier adressé au procureur général d'Ukraine, Gennadi Vassiliev. Volodymyr Karachevtsev, 47 ans, père de deux enfants et ancien officier de la Marine, a été retrouvé par son ex-femme, Zinaida, pendu par le col de son pull à la poignée du réfrigérateur, située à environ 70 cm du sol. La veille, son ex-femme avait rendu visite au journaliste, affecté par le décès de son père, survenu une semaine auparavant. L'enterrement du journaliste a eu lieu deux jours après sa mort, le 16 décembre. Le procureur de Melitopol, Leonid Vasylenko, a annoncé l'ouverture d'une enquête. Il a indiqué que Volodymyr Karachevtsev était mort suite à une asphyxie mécanique, que certaines analyses avaient déjà été effectuées par des experts médicaux locaux et que d'autres prélèvements devaient encore être examinés. Selon le procureur et selon le directeur adjoint de la police locale, Oleg Bukach, la thèse du suicide est exclue. La version privilégiée par la police, pour le moment, est celle d'une mort accidentelle. Oleg Bukach a déclaré, le 16 décembre, que le journaliste, en état d'ivresse, était tombé et que, le col de son pull s'étant pris dans la poignée du réfrigérateur, il s'était étouffé. D'après lui, la police n'a pas constaté de désordre particulier dans l'appartement de Volodymyr Karachevtsev. Il a affirmé à Reporters sans frontières que les résultats des expertises, couverts par le secret de l'instruction, lui étaient déjà parvenus et que le corps de la victime ne portait aucune trace de violence. Les collègues du journaliste, en particulier le rédacteur en chef de Kurier, Igor Yenin, rejettent la thèse de l'accident et sont convaincus qu'il a été assassiné pour qu'il ne révèle pas certaines informations gênantes sur les autorités locales. La rédaction, qui mène sa propre enquête, affirme que l'appartement était en désordre et que la police, n'ayant pas encore les résultats des tests d'alcoolémie, devrait se garder de toute conclusion hâtive. Récemment, Volodymyr Karachevtsev menait des investigations sur la corruption de différents responsables politiques locaux, sur la vente d'une propriété de l'Etat à bas prix par le maire de la ville et sur la faillite de l'usine Start. Dans une interview accordée à l'IMI, Igor Yenin a indiqué que Volodymyr Karachevtsev était parti en reportage non loin de la ville une semaine auparavant et que son matériel, notamment son dictaphone et son appareil photo, aurait dû se trouver dans l'appartement du journaliste. Selon lui, il avait reçu des menaces de mort et subi une agression au début de l'année. Plusieurs éléments, parus dans la presse, laissent penser qu'il pourrait s'agir d'un assassinat lié à son activité professionnelle. Le 16 décembre, dans l'après-midi, la rédaction de Vlasti.net a reçu un appel anonyme d'un homme déclarant d'une voix joyeuse : "ça nous fait déjà un imbécile en moins, attendez la suite, je vous rappellerai." Les journalistes, ayant pu noter le numéro de téléphone, ont transmis l'information au bureau du procureur, qui a rapidement identifié l'auteur de l'appel. Selon le procureur Vasylenko, il s'agirait du directeur d'un complexe commercial de Melitopol. Kurier publie souvent des articles extrêmement critiques à l'égard du maire de la ville, Vasyl Yefymenko, et de son adjoint, Oleksander Ilchuk. Quant au site Vlasti.net, créé par le Syndicat régional des journalistes indépendants, il s'est donné pour mission de révéler et de dénoncer toutes les pratiques douteuses des autorités et des hommes politiques locaux. Reporters sans frontières et l'IMI rappellent que Géorgiy Gongadze, rédacteur en chef du journal en ligne Pravda.com.ua, et Igor Alexandrov, directeur général de la télévision TOR, également très critiques envers le pouvoir en place, ont été assassinés, respectivement en 2000 et en 2001.
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Updated on 20.01.2016