Le décès après plusieurs années de coma de l’un des témoins clé de l’affaire Gongadze est un "nouveau coup dur", mais ne doit pas faire oublier que la volonté politique des autorités est indispensable pour élucider la mort du journaliste.
Le 1er juin 2009, l’un des principaux témoins de l’affaire Géorgiy Gongadze, le général Edouard Fere, est décédé à l’hôpital au terme de six années de coma. De 1995 à 2001, il avait exercé les fonctions de chef de cabinet du ministre de l’Intérieur de Leonid Koutchma, Iouri Kravtchenko. Il aurait également été proche de l’un des assassins présumés du journaliste, le général Olexi Poukatch, ancien responsable du renseignement extérieur du ministère de l’Intérieur, aujourd’hui sous le coup d’un mandat d’arrêt international. Dans le coma après un arrêt cardiaque en 2003, Edouard Fere n’a jamais été entendu par la police.
“ La mort d’Edouard Fere est un coup dur de plus dans la recherche de la vérité sur l’assassinat de Géorgiy Gongadze. Toutefois, nous n’oublions pas que la justice dispose d’autres moyens pour résoudre cette enquête. Nous déplorons notamment que les autorités ukrainiennes manifestent si peu de volonté politique pour que cette affaire soit résolue”, a déclaré Reporters sans frontières.
Edouard Fere était considéré comme l’un des témoins clé dans la disparition et l’assassinat de Géorgiy Gongadze. Le rédacteur en chef du journal en ligne Ukrainskaïa Pravda avait été enlevé le 16 septembre 2000, en bas de chez lui. En novembre, un corps décapité ainsi qu’un crâne – que les experts avaient confirmés comme étant ceux du journaliste - avaient été retrouvés dans une forêt proche de Kiev. Géorgiy Gongadze, 31 ans, avait rédigé de nombreux articles sur des affaires de corruption impliquant des membres du gouvernement de Léonid Koutchma, l’ancien chef de l’Etat ukrainien. Edouard Fere était suspecté d’avoir été l’intermédiaire entre les commanditaires de l’assassinat du journaliste et les organisateurs, dont Olexi Poukatch. Le parquet avait demandé à l’entendre à plusieurs reprises. En vain.
En juillet 2008, trois hommes ont été condamnés pour la disparition et la mort de Géorgiy Gongadze. La Cour suprême a confirmé la condamnation de Mykola Protassov à treize ans de prison, ainsi que celle d’Oleksandr Popovitch et de Valeri Kostenko à douze ans d’emprisonnement. Olexi Poukatch, sous les ordres duquel les trois hommes auraient agi, est en fuite à l’étranger. La deuxième partie de l’enquête, concernant les commanditaires et les organisateurs de l’assassinat est toujours en cours et sous le contrôle du parquet général. L’une des pièces principales de cette dernière consiste dans des enregistrements réalisés par Mykola Melnichenko, garde du corps de l’ancien président, compromettant de très hauts responsables politiques, dont l’expertise n’a toujours pas été réalisée.