Maroc : la condamnation inique du journaliste Hamid El Mahdaoui par contournement de la loi de la presse doit être annulée

Reporters sans frontières (RSF) dénonce l’utilisation du Code pénal au lieu de la loi sur la presse et de l’édition, qui a abouti à la condamnation du journaliste Hamid El Mahdaoui à une peine de prison ferme et une lourde amende. Cette décision inique, aboutissement d’une procédure inique, doit être annulée au plus vite.

 

Le journaliste Hamid El Mahdaoui attend son procès en appel, après avoir été condamné, le 11 novembre, par le tribunal de première instance de Rabat, à 18 mois de prison ferme et à une amende d'environ 130 000 euros, pour “diffusion de fausses allégations” et “diffamation”, en vertu du Code pénal, alors qu’il aurait dû être jugé selon la loi de la presse et l’édition. La raison ? Une plainte déposée par le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, pour une vidéo publiée le 11 juillet 2023 sur le site d’information Badil.info, dans lequel le journaliste évoquait des faits qui pourraient l’impliquer dans une affaire compromettante. 

“Cette décision vient réduire les espoirs d’amélioration de la liberté de la presse, après la grâce royale accordée le 30 juillet 2024 à huit journalistes, dont Taoufik Bouachrine, Omar Radi et Soulaimane Raissouni, à l'occasion de la fête du Trône. Le contournement de la loi de la presse et de l’édition, par le recours au droit pénal pour condamner un journaliste, qui a pour seul tort d’avoir exercé son métier, est un signal très alarmant. RSF appelle la justice marocaine à annuler cette décision. Il est crucial que les autorités marocaines reprennent le chemin de la justice qu’indiquaient les grâces royales, pour ouvrir la voie à un climat favorable à une presse libre et au respect du droit à l’information.

Bureau RSF Afrique du Nord

La justice ne peut être rendue” si le tribunal ne prend pas en compte l'ensemble des éléments relatifs à l'affaire, a confié à RSF le journaliste Hamid El Mahdaoui. Il insiste notamment sur l'importance de considérer les documents qu'il a soumis, ainsi que ses vains efforts pour contacter le ministre de la Justice avant la publication de la vidéo critique au cœur de cette affaire. Il s'interroge également sur les poursuites spécifiques qui le visent: “Comment pourrais-je être traité équitablement si l'on ignore que j'ai publié les mêmes informations qu'un autre journaliste, qui lui a été poursuivi selon la loi relative à la presse et à l’édition, tandis que je suis jugé en vertu du Code pénal ?” 

Connu pour ses contenus d’information critiques envers les autorités, notamment sur les sujets de  la corruption ou des droits économiques et sociaux, Hamid El Mahdaoui a déjà été victime de poursuites judiciaires abusives en lien avec son travail. Arrêté en 2017, Il a purgé une peine de trois ans de prison pour “non-dénonciation d’un crime portant atteinte à la sécurité de l’État”, qui était liée à sa couverture d’une marche pacifique interdite par les autorités marocaines. Une condamnation qui avait été largement dénoncée comme une atteinte à la liberté de la presse au Maroc. 

Le Maroc occupe le 129e rang sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024.

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