Loi de sécurité nationale à Hong Kong : après un an d’attaques permanentes, la liberté de la presse en danger de mort

La loi de sécurité nationale imposée par Pékin il y a tout juste un an a justifié de multiples abus à Hong Kong, dont la détention de journalistes et la fermeture du quotidien Apple Daily. Reporters sans frontières (RSF) appelle les démocraties à accentuer la pression sur le régime chinois pour l’empêcher de démanteler ce qui reste de liberté de la presse dans le territoire.

Il y a tout juste un an, le 30 juin 2020, le régime de Pékin adoptait une loi dite de sécurité nationale et visant spécifiquement Hong Kong. Ce texte, volontairement flou et fourre-tout, était censé faciliter la lutte contre le « terrorisme », la « sécession », la « sédition » et l’« interférence étrangère », quatre crimes passibles de la peine de mort dans le reste de la Chine et fréquemment instrumentalisés contre les journalistes. Un an plus tard, les pires craintes des journalistes et défenseurs de la liberté de la presse basés à Hong Kong se sont révélées fondées : depuis l’entrée en vigueur de la loi (voir chronologie ci-dessous), pas moins de dix d’entre eux ont été arrêtés en vertu de ce texte et risquent la prison à vie. 


À ce jour, cinq d’entre eux restent sous les verrous : Jimmy Lai, le fondateur du quotidien Apple Daily et lauréat 2020 du prix RSF de la liberté de la presseRyan Law et Cheung Kim-hung, respectivement rédacteur en chef et directeur général du média, l’ancienne députée et ancienne journaliste Claudia Mo et l’ancienne journaliste et militante Gwyneth Ho. Cette réglementation liberticide a aussi permis au gouvernement hongkongais de justifier fin juin le gel des avoirs financiers d’Apple Daily, contraignant le quotidien à mettre la clé sous la porte.


« Depuis un an, le régime de Pékin et le gouvernement hongkongais invoquent la loi de sécurité nationale pour justifier, avec une apparence de légalité, le démantèlement de la liberté de la presse et la persécution des journalistes et commentateurs qui leurs déplaisent, » constate le directeur du bureau Asie de l’Est de RSF, Cédric Alviani, qui appelle les démocraties « à faire davantage pression sur le régime chinois pour qu'il mette fin à ses politiques autoritaires et qu’il œuvre enfin au rétablissement de la liberté de la presse, un droit inscrit en toutes lettres dans la constitution de la République populaire de Chine et dans la Loi Fondamentale qui régit Hong Kong. »


Chronologie : un an de persécution des défenseurs de la liberté de la presse à Hong Kong

  • 30 juin 2020 : la loi sur la sécurité nationale entre en vigueur.
  • 10 août 2020 : en parallèle du raid de la police au siège d’Apple Daily, le fondateur Jimmy Lai est arrêté pour « collusion avec des puissances étrangères » puis libéré sous caution.
  • 6 janvier 2021 : Gwyneth Ho, militante et ancienne journaliste chez Stand News, est arrêtée pour « complot en vue de commettre un acte de subversion ». La libération sous caution lui est plus tard refusée.
  • 28 février 2021 : Claudia Mo, ancienne députée et défenseuse de la liberté de la presse, est détenue et inculpée pour « complot en vue de commettre un acte de subversion ». La libération sous caution lui est plus tard refusée.
  • 16 avril 2021 : Jimmy Lai est une fois de plus inculpé sous la loi sur la sécurité nationale pour « complot de collusion avec des forces étrangères » et condamné à un total d'un an et deux mois de prison pour des charges distinctes.
  • 17 juin 2021 : suite à un nouveau raid d la police dans les locaux d’Apple Daily et à l’arrestation de cinq de ses cadres, le gouvernement gèle les actifs financiers du média, l’obligeant à cesser toute activité une semaine plus tard.
  • 23 juin 2021 : la police arrête Yeung Ching-kee (plus connu sous le nom de Li Ping), chroniqueur pour Apple Daily, pour « complot de collusion avec des forces étrangères » et le libère sous caution deux jours plus tard.
  • 27 juin 2021 : la police arrête Fung Wai-kong, éditorialiste chez Apple Daily, pour « collusion pour mettre en danger la sécurité nationale », qui sera plus tard libéré sous caution.


RSF a récemment procédé à deux saisines d’urgence de l’Organisation des Nations unies (ONU), l’appelant à « prendre toutes les mesures nécessaires » pour sauvegarder la liberté de la presse à Hong Kong et notamment obtenir la libération immédiate de Jimmy Lai. 


Autrefois bastion de la liberté de la presse, Hong Kong est passée de la 18e place en 2002 à la 80e place en 2021 au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF. La République populaire de Chine stagne pour sa part au 177e rang sur 180.

Publié le
Updated on 03.09.2021