L'Europe et ex-URSS

Des disparités au sein de l'Union européenne Les quinze premiers pays du classement sont tous, à l'exception de la Suisse (8e) et de la Norvège (6e), membres de l'Union européenne. Parmi eux, les pays du nord de l'Europe continuent de marcher en tête. Parmi les 25 membres de l'Union européenne, la Pologne (58e) doit à un relatif regain de la censure sa position persistante de plus mauvais élève. Les incarcérations et amendes pour diffamation, insulte à la dignité ou au sentiment religieux, y revêtent malheureusement un caractère banal. La tentative de sanctionner le Tageszeitung pour "outrage public à une institution constitutionnelle polonaise", après la publication d'un article satirique sur le président Lech Kaczynski, est emblématique de la volonté de contrôle à l'œuvre depuis l'arrivée au pouvoir de la coalition catholiques/conservateurs en novembre 2005. La Pologne est rattrapée par la Roumanie (58e) dont la progression dans le classement illustre bien la dynamique de l'Europe orientale. L'adhésion à l'UE ou sa perspective ont eu une influence bénéfique sur la situation de la liberté d'expression dans la région. La loi roumaine dépénalisant la diffamation, adoptée en juin 2006, reflète cette dynamique. L'Allemagne (23e) doit à une succession d'incidents sa baisse relative dans le classement : reconnaissance par les services fédéraux de renseignements de la surveillance illicite qu'ils ont exercée sur les médias pendant près de dix ans ; affaire “Cicero” dans laquelle deux journalistes de ce magazine ont été poursuivis pour “divulgation d‘information confidentielle” ; menaces de mort à l'encontre d'un dessinateur du Tagesspiegel ; difficultés ponctuelles d'accès à l'information après l'entrée en vigueur de la loi sur la liberté de l'information (Informationsfreiheitgesetz). La Suisse (8e) perd sept places, essentiellement en raison de la poursuite de deux médias en vertu de l'article 293 du code pénal qui sanctionne la "publication de débats officiels secrets". En Italie (40e), la sortie de la “période Berlusconi” se traduit par une légère remontée, notamment en raison des condamnations répétées de l'abus de temps de parole par Silvio Berlusconi pendant la campagne pour les élections législatives d'avril 2006. L'Espagne (41e) ne bouge pas, perdant une seule place dans ce classement, à la suite de l'adoption d'une loi contraignante sur l'audiovisuel par le gouvernement catalan. Ex-Urss : la tentation répressive est à l'œuvre, mais les méthodes diffèrent C'est dans l'espace post-soviétique que l'on retrouve les lanternes rouges du classement. La situation reste globalement inchangée pour la Russie (147e) et le Bélarus (151e). Confrontée à des problèmes fondamentaux de déficit démocratique, de rachats de la quasi-totalité des médias indépendants par des groupes industriels proches du pouvoir et d'une législation nouvellement entrée en vigueur décourageant l'activité des organisations non gouvernementales, la Russie de Vladimir Poutine poursuit lentement mais avec acharnement le démantèlement de la presse libre. Par ailleurs, chaque année, plusieurs journalistes sont assassinés dans le pays en toute impunité. Plus de deux ans après l'assassinat de Paul Klebnikov, rédacteur en chef de la version russe du magazine Forbes tué en juillet 2004 à Moscou, le commanditaire de ce crime demeure inconnu. Et la mort d'Anna Politkovskaïa, début octobre 2006, ne laisse rien présager de bon pour l'année à venir. En Asie centrale, l'Ouzbékistan d'Islam Karimov (155e) fait perdurer un régime de contrôle inspiré de son passé soviétique dont la sévérité s'est sensiblement accrue après le soulèvement d ‘Andijan de mai 2005. Avec l'adoption en février 2006 d'une résolution assimilant les journalistes étrangers à des agitateurs ou à des terroristes, les refus d'accréditation se sont multipliés en Ouzbékistan, où les bureaux des correspondants de la BBC et de Radio Free Europe / Radio Liberty ont été fermés. Les passages à tabac et les arrestations se sont poursuivis. Djamshid Karimov, journaliste indépendant et neveu du président, a été interné dans un hôpital psychiatrique de Samarkand, sans explication et sans que ses proches soient autorisés à lui rendre visite.
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Updated on 20.01.2016