Les progrès en matière de liberté de la presse continuent-ils?
Organisation :
Reporters sans frontières et son organisation partenaire, la Burma Media Association (BMA) condamnent les poursuites judiciaires intentées en janvier 2012, par un ingénieur du ministère de la construction, contre le journal Modern Weekly et sa reporter, Thet Su Aung, suite à la parution d’un article, en novembre 2011, critiquant les mauvaises conditions d’une route de la région de Mandalay (Centre). Les organisations s’inquiètent des récentes restrictions de la liberté de la presse révélées par les médias en exil, qui continuent de montrer leur importance.
« Le procès intenté contre Thet Su Aung fait tache dans le processus d’ouverture initié par le gouvernement birman à l’égard de la presse et nous appelons au retrait de la poursuite. Nous saluons les avancés du gouvernement birman dans la protection du travail des journalistes. Toutefois, la censure par les autorités d’un discours de campagne de l’opposition va à l’encontre de leurs déclarations de démocratisation et de bonne foi", a déclaré Reporters sans frontières. "Il en va de même pour la loi sur les médias en cours d’élaboration qui, en l’état actuel, ne permet pas de garantir la liberté de la presse promise par le gouvernement. Une refonte totale du cadre légal en la matière, qui date des années vingt et soixante, devrait être envisagée. Il est nécessaire que le pays se dote d'un Conseil de la presse indépendant, pouvant servir de médiateur entre d'éventuels plaignants et accusés avant que la justice ne soit sollicitée. Dans le même temps, un syndicat de journalistes véritablement indépendant est nécessaire afin de protéger juridiquement et d'aider les professionnels des médias.” a ajouté l'organisation.
“La communauté internationale demeure informée sur ces violations grâce au travail remarquable de médias tels que la Democratic Voice of Burma, Mizzima News, The Irrawaddy ou Radio Free Asia, basés hors de Birmanie. Tant que des atteintes à la liberté d’information auront lieu et que ces médias en seront les seuls ou les premiers dénonciateurs, nous considérerons comme incomplète la démocratisation du pays.”
Le 8 mars 2012, Aung San Suu Kyi a dénoncé à Radio Free Asia la censure par les autorités birmanes d’une partie de son discours, prévu pour être diffusé avant le premier tour des élections le 1er avril 2012. La paragraphe censuré portait sur les abus de pouvoir de l’ancienne junte militaire, accusée de ne pas respecter l’État de droit et de manipuler la loi à son gré. Ce n’est pas la première entrave qu’Aung San Suu Kyi a rencontré au cours de sa campagne électorale, malgré les garanties avancées par les autorités. Le gouvernement a néanmoins permis la diffusion des propos d'Aung San Suu Kyi critiquant plusieurs lois et la constitution de 2008, dont sa remarque qualifiant de "pratique anti-démocratique" l'allocation de 25% des sièges du Parlment à des militaires. En dépit de quelques signes d’ouverture, Aung San Suu Kyi a invité la communauté internationale à suivre de près le déroulement des prochaines élections avant de déterminer sa position sur les avancées démocratiques en Birmanie.
Le journaliste Thet Su Aung a comparu devant le tribunal, le 6 mars 2012, pour répondre aux accusations portées contre elle par le ministre de la Construction birman. Dans l’article incriminé, datant de novembre 2011, la journaliste avait déploré le mauvais état de plusieurs routes et ponts dans la ville de Thabeikkyin, et en particulier de la route qui relie Thabeikkyin et Tagaung, sur laquelle, selon l’article, l’ingénieur Nwe Nwe Yi aurait aussi chargé la compagnie Su Htoo Pan d’instaurer des péages à un prix élevé afin de collecter de l’argent. D’après Htun Win, éditeur du journal Shwe Mandalay, Thet Su Aung n’avait pas été la seule à dénoncer les mauvaises conditions de la route Thabeikkyin-Tagaung. Pourtant, elle est la seule à être poursuivie en justice.
Par ailleurs, selon des sources proches du Press Scrutinization and Registration Department (PSRD), la première nouvelle loi des médias, actuellement en cours de rédaction par le PSRD, a été adaptée à partir du Printers and Publishers Registration Act, une loi promulguée après le coup d'état militaire en 1962. De plus, cette loi, dans sa forme actuelle, ne concernerait que la presse écrite, laissant complètement de coté les autres supports des médias.
La Birmanie demeure à la 169ème place sur 179 pays recensés dans le classement de la liberté de la presse établi en 2011-2012 par Reporters sans frontières. Au moins quatre journalistes et un blogueur demeurent emprisonnés, Zaw Tun, Win Saing, Ne Min, Aung Htun et le blogueur Kaung Myat Hlaing (Nat Soe) n’ayant pas bénéficié de l’amnistie du 13 janvier 2012.
Publié le
Updated on
20.01.2016