Après une couverture médiatique totalement biaisée de la campagne électorale, la liberté de la presse est mise à mal à l'approche du second tour de l'élection présidentielle. "Les méthodes les plus diverses sont utilisées pour empêcher une couverture complète de la campagne", s'est inquiétée Reporters sans frontières.
Après une couverture médiatique totalement biaisée de la campagne électorale, la liberté de la presse est mise à mal à l'approche du second tour de l'élection présidentielle, le 21 novembre, entre le candidat du pouvoir et Premier ministre Victor Ianoukovitch et son rival de l'opposition Victor Iouchtchenko.
"La pression continue de monter à l'approche du second tour. Agressions, pressions répétées, licenciements abusifs, blocages dans la distribution ou dans l'accès à l'information : les méthodes les plus diverses sont utilisées pour empêcher une couverture complète de la campagne", s'est inquiétée Reporters sans frontières.
De nombreux journalistes ont continué à dénoncer l'utilisation systématique par les autorités de " temnyks ", des instructions adressées aux rédactions sur la manière dont certains sujets doivent être traités.
Ainsi, le soir du débat télévisé opposant les deux candidats, le 15 novembre, une trentaine de journalistes des principales chaînes de télévision ont manifesté devant l'immeuble abritant les locaux de la chaîne publique UT-1 ainsi que ceux de la chaîne privée 1+1, pour dénoncer les entraves gouvernementales au travail des médias. Certains s'étaient symboliquement lié les mains avec des chaînes de papier constituées de "temnyks".
Le 3 novembre, Volodymyr Holosnyak, présentateur du journal télévisé sur UT-1, a été limogé après avoir refusé de lire un temnyk concernant le débat télévisé auquel allait participer Victor Ianoukovitch. Le journaliste a précisé qu'il devait également lire un communiqué relatant les conditions exigées par Victor Iouchtchenko pour participer à ce débat.
Par ailleurs, plusieurs agressions ont été recensées à l'encontre des partisans de l'opposition et des journalistes. Le 3 novembre, Enver Musayev, de l'hebdomadaire Holos Kryma, a été agressé et ses collègues menacés à Simféropol (capitale régionale de la Crimée). Trois inconnus se sont approchés du véhicule des journalistes, ont fait sortir Enver Musayev et l'ont frappé. Eldar Seidbekirov, rédacteur en chef de l'hebdomadaire, présent lors de l'agression, a déclaré que l'un des agresseurs portait un uniforme de lieutenant-colonel.
Le soir du premier tour de l'élection, le 31 octobre, Serghiy Skorobohatko, journaliste de la principale chaîne de télévision d'opposition, Kanal 5, a été frappé dans un bureau de vote par des inconnus, qui se sont emparés de sa caméra.
Enfin, l'édition du quotidien d'opposition Silski Visti du 17 novembre, dans laquelle était publiée une interview du candidat Victor Iouchtchenko, n'a pas pu être envoyée à ses abonnés. La veille, les exemplaires avaient été bloqués au dépôt de l'entreprise de diffusion, "Pressa Ukrainy", filiale de la poste publique. Le même jour, des inconnus avaient visité la rédaction du quotidien et donné des "conseils" à la rédaction, leur indiquant la façon la plus appropriée de couvrir la campagne électorale. Le quotidien a finalement pu être distribué à ses abonnés vers 15 heures, le 17 novembre, après que la rédaction a demandé l'intervention du Parlement.
Les entraves se sont multipliées à l'égard de ce quotidien depuis que son propriétaire, le socialiste Alexandre Moroz, a apporté son soutien à Victor Iouchtchenko. Ainsi, de très nombreux lecteurs, en particulier dans les régions méridionales, ne reçoivent plus le journal. Les bureaux de poste locaux invoquent les prétextes les plus divers.
Selon Vasyl Hruzin, rédacteur en chef de Silski Visti, ces problèmes techniques sont uniquement dus à l'orientation politique du quotidien. Il a également dénoncé les tentatives de censure dont la rédaction a été victime.
De même, le 12 novembre, la poste publique de Donetsk (Est) a refusé d'acheminer l'hebdomadaire indépendant Svoboda à plusieurs milliers d'abonnés, dans les régions de Donetsk, Dnipropetrovsk, Zaporizhzhya, Luhansk, Kharkov et en Crimée. Mykola Dremov, directeur régional de la poste, a informé Mykhailo Khalandski, rédacteur en chef de l'hebdomadaire, qu'un tribunal de Donetsk avait interdit sa distribution, tout en refusant de présenter une copie de la décision de justice.