Les médias kurdes toujours dans la tourmente
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Reporters sans frontières se réjouit de la remise en liberté d’Ismail Eskin, reporter à l’agence de presse DIHA, une décision prise le 19 mai 2010, lors de la première audience de son procès, au terme de 5 mois de détention.
Etudiant au sein du département de journalisme de l’université de Kocaeli, il avait été interpellé le 4 décembre 2009 et accusé de mener des activités au nom du PKK (Parti de travailleurs du Kurdistan). Ismail Eskin a été placé en liberté conditionnelle, son procès continue et la prochaine audience a été fixée en septembre prochain.
Cette « bonne » nouvelle intervient alors que Pinar Ural, journaliste dans la même agence, a été agressée le 17 mai. Après avoir couvert une manifestation contre la peine de mort, sur le campus de l’université technique d’Istanbul, la journaliste a été prise à partie, insultée de « traître » puis agressée dans un bus par un individu qui l’avait suivie lors de la manifestation. Elle a réussi à s’enfuir du bus en demandant au chauffeur d’ouvrir la porte. Pinar Ural prévoit de porter plainte.
Reporters sans frontières saisit cette occasion pour revenir également sur la situation du journal Azadiya Welat, seul titre du pays publié en langue kurde. Le rédacteur en chef du quotidien, Mehdi Tanrikulu, a passé cinq mois en prison pour avoir voulu mener sa défense en kurde. Au terme de cette peine, il a été remis en liberté.
Il demeure poursuivi pour avoir, dans l'édition du 23 janvier dernier, traité de l'un des responsables du PKK de manière trop positive, selon les autorités. Il encourt jusqu’à 40 ans de prison s’il est reconnu coupable d’appartenance au parti kurde.
Reporters sans frontières réitère son soutien au rédacteur en chef, et appelle le tribunal à la clémence et à respecter enfin la liberté des médias kurdes.
L’organisation de défense des journalistes, qui, le 13 mai dernier, a dénoncé le verdict condamnant Vedat Kursun, l’ancien rédacteur en chef d’Azadiya Welat, à 166 ans de prison, salue l’initiative des milieux kurdes appelant à sa libération.
Lors d’une conférence de presse, qui a eu lieu le 17 mai au siège de l’Association des journalistes du sud-est anatolien, plusieurs pancartes ont été déployées, sur lesquelles on pouvait lire « Vedat Kursun n’est pas seul », « Libérez Vedat Kursun » mais aussi « Libérez la langue kurde ». Car en emprisonnant les responsables de journaux kurdes, c’est bien l’identité d'une partie non négligeable de la population qui est visée et niée.
Une pétition pour libérer le journaliste a également été lancée. La campagne de mobilisation des journalistes kurdes est prévue pour durer un mois, au terme duquel les signatures recueillies seront transmises aux institutions et ONG européennes afin de les sensibiliser sur le sort de leur confrère.
Cette conférence de presse a été l’occasion pour Filiz Koçali, directrice de la publication du quotidien prokurde Günlük, de rappeler que les rédacteurs en chef des principaux médias kurdes étaient en prison. « Ce gouvernement veut étouffer les médias kurdes avec les mains de la justice et par l’intermédiaire de la loi antiterroriste » s’insurge-t-elle.
Reporters sans frontières condamne une fois encore l’attitude des autorités turques à l’encontre des journaux kurdes. Les peines encourues par les journalistes sont absurdes et disproportionnées, basées sur des motivations politiques douteuses.
Publié le
Updated on
20.01.2016