Reporters sans frontières (RSF) s’inquiète du sort des journalistes, pris pour cible en raison de leurs témoignages sur la situation en Irak. Le chef du bureau de l’agence Reuters, Ned Parker, a dû fuir le pays, menacé par des groupes armés chiites, après un article dévoilant leurs agissements dans la ville libérée de Tikrit.
Ned Parker, chef du bureau de l’agence Reuters à Bagdad, a reçu de graves
menaces diffusées sur Facebook et sur la chaîne
Al-Ahd TV - qui appartient au groupe Asaib Ahl al-Haq (groupe armé soutenu par l’Iran) - après la publication d’un article publié le 3 avril dernier. Craignant pour sa vie, il a fui le pays.
Dans cette publication, le journaliste fait état de violations de droits de l’homme par la police irakienne et les milices chiites alliées dans la ville libérée de Tikrit. Il y décrit l’impunité et le vandalisme régnant et relate les agissements de policiers qui ont torturé à mort à un homme suspecté d’appartenir au groupe EI. Une scène d’une grande violence y est également rapportée, décrivant des milices chiites qui traînent le corps d’un homme accroché à leur voiture. L’article souligne les terribles conséquences de ces actions pour le gouvernement irakien dans sa stratégie de lutte contre les djihadistes.
RSF exhorte le gouvernement à garantir une meilleure protection aux journalistes pris pour cible par le groupe Etat islamique ou les milices radicales chiites. “
Les autorités irakiennes ne doivent pas laisser impunis les crimes commis contre les journalistes, déclare Virginie Dangles, adjointe à la direction des programmes.
Face aux exactions qu’ils subissent, des enquêtes pour identifier et sanctionner les coupables doivent être ouvertes. Il est du devoir des autorités de protéger les journalistes qui ne sont à l’abri nulle part dans le pays”.
Le Premier ministre irakien, Haidar Al-Abadi, a
réagi en affirmant son soutien aux journalistes et à la liberté de la presse et en assurant que la police a pris toutes les mesures pour protéger Ned Parker suite aux menaces. Il avait également
ordonné aux forces irakiennes de faire cesser les actes de vandalisme et d’arrêter les responsables.
Pression double
Alors que l’insécurité et l’impunité règnent en maître en Irak, les journalistes doivent affronter la pression d’officiels peu enclins à la critique, qui n’hésitent pas à les poursuivre en justice.
Selon les informations du Journalistic Freedom Observatory, le journaliste indépendant
Nasser Al-Hajjaj, actuellement au Liban, est
poursuivi par les autorités locales pour avoir critiqué le gouverneur de la province de Bassorah sur les réseaux sociaux et le gouvernement local. Le président du Conseil suprême islamique aurait
demandé au gouverneur de Bassorah de retirer sa plainte.
RSF, en collaboration avec son organisation partenaire JFO, avait dénoncé en février 2014 les agissements de certains responsables administratifs et politiques qui n’hésitaient pas à saisir de manière abusive la justice pour contrecarrer le travail des journalistes dans une
lettre ouverte au président du Conseil suprême de la magistrature, au président de la Cour d’appel de Bagdad ainsi qu’au président de la Chambre spécialisée pour les affaires de presse et de publication.
L’Irak figure à la 156e place (sur 180) du
Classement 2015 établi par Reporters sans frontières.