Les journalistes bélarusses dans le collimateur des autorités après l'attentat du 11 avril
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Depuis l’attentat dans le métro de Minsk le 11 avril dernier, les médias sont la cible d’avertissements en série de la part des autorités. « Nous appelons le gouvernement à cesser les pressions et les menaces presque quotidiennes à l’encontre des journalistes qui essaient simplement de faire leur travail. L’attentat de Minsk ne doit pas servir de prétexte pour museler la presse », a déclaré Reporters sans frontières.
Les avertissements lancés, soit par le ministre de l’Information, soit par le Parquet, se sont multipliés de manière inquiétante ces derniers jours. Les journalistes s’intéressant à l’attentat du 11 avril sont accusés de diffusion de fausses informations et de diffamation. Après deux avertissements pour violation de la loi des médias, les journalistes risquent la suspension ou la fermeture de leur titre.
L’hebdomadaire indépendant Nasha Niva a reçu un avertissement le 15 avril pour avoir « publié de fausses informations sur la présence d’une victime de l’attentat de Minsk qui n’a été évacuée que tard dans la nuit de la station de métro ». Le 18 avril, le KGB a rappelé le titre à l’ordre, l’accusant de révéler des informations sur l’enquête en cours. Le journal a été victime de plusieurs perquisitions par des officiers du KGB cette année. Andrei Surko, le rédacteur en chef de Nasha Niva a également été réprimandé pour avoir publié l’opinion d’un ancien colonel de l’armée, suggérant que l’attaque terroriste aurait pu être organisée par les services de sécurité. Le représentant du procureur général l’a accusé de « discréditer l’Etat bélarusse au détriment de l’intérêt public ». Publié dans une rubrique d’opinion, l’article « ne viole aucune loi », estime Andrei Surko, puisqu’ « un avertissement en bas de la page stipule bien que le journal n’est pas responsable des opinions exprimées ».
Le 15 avril, le journal Narodnaya Volya a reçu un avertissement du Ministère de l’information pour avoir diffusé de «fausses informations à caractère diffamatoire pour la télévision et la radio d’Etat bélarusse ». La Cour suprême étudie la plainte déposée par la chaîne étatique à l’encontre du journal ; des poursuites judiciaires pourraient être engagées.
Le rédacteur en chef du journal privé Bobruyiski Kuryer, dont le journaliste Vauhen Voskovitch est emprisonné depuis janvier 2011, s’est vu reprocher, le 12 avril, une publication sur le site belaruspartisan.org. Dans son article, Anatol Sanatsenka s’interrogeait sur les personnes à qui profitait l’attentat.
Le même jour, le Procureur général a adressé un avertissement à Aleksandr Starykievitch, rédacteur en chef du journal en ligne Solidarnosts. Il est accusé d’avoir diffusé des informations sans fondement dans un article qui examinait différentes thèses autour de l’attentat.
Enfin, le 19 avril, Sergueï Nyarouny, rédacteur en chef de Volny Horad, journal régional de Mahilou, a été averti par écrit par le procureur de Krychau à propos d’un article exprimant des doutes sur la culpabilité des suspects arrêtés. L’article aurait eu pour but de « discréditer et d’insulter les officiers de police, l’Etat et la société bélarusse dans son ensemble ». Il a été menacé de poursuites s’il publiait d’autres articles à ce sujet.
Tout semble montrer que les autorités bélarusses ne tolèrent aucune investigation indépendante et utilisent l’attentat du 11 avril pour renforcer la répression de la presse. Aleh Barshcheuski, rédacteur en chef du Vitebsky Kuryer a été condamné à 10 jours de prison le 20 avril pour « hooliganisme ». Il avait été arrêté avec des défenseurs des droits de l’homme et des activistes de l’opposition, tous supposément présumés d’implication dans l’attentat.
Le Net est également dans le collimateur des autorités. Les sites charter97.org et belaruspartisan.org, connus pour être critiques de la politique gouvernementale, ont été victimes ces dernières jours d’attaques DdoS. Le 12 avril 2011, le procureur général Grigori Vassilievitch avait ouvertement déclaré vouloir « mettre de l’ordre » sur la toile.
Les différentes attaques recensées contre les médias font écho aux discours très virulents du procureur général Grigori Vassilievitch, mais aussi du Président en personne. Le 13 avril, Aleksandr Loukachenko a fustigé les médias qu’il a accusés de « créer la panique ». « J’ai ordonné que les scélérats soient poursuivis, détenus et interrogés comme des criminels », a t-il déclaré.
Les derniers événements constituent un nouveau chapitre dans la vague de répression qui touche les professionnels de médias depuis les élections controversées du 19 décembre 2010.
(Photo: AFP)
Publié le
Updated on
20.01.2016