L'entreprise d'Etat TelOne, qui dispose du monopole sur les télécoms du pays, a demandé aux fournisseurs d'accès Internet de signer un contrat qui porte, entre autres, sur la surveillance des e-mails. L'imprécision des termes employés dans ce contrat ainsi que le contexte politique du pays, où la liberté d'expression est constamment bafouée, font craindre un renforcement du contrôle de la Toile par le gouvernement.
L'entreprise d'Etat TelOne, qui dispose du monopole sur les télécoms du pays, a demandé aux fournisseurs d'accès Internet (FAI) de signer un contrat qui porte, entre autres, sur la surveillance des communications en ligne. Le texte demande aux FAI de "prendre les mesures nécessaires" afin d'empêcher la diffusion de contenus illégaux sur le Net. L'imprécision des termes employés dans ce contrat ainsi que le contexte politique du pays, où la liberté d'expression est constamment bafouée, font craindre un renforcement du contrôle de la Toile par le gouvernement.
Reporters sans frontières s'inquiète de l'évolution d'Internet au Zimbabwe. "Le gouvernement, par l'intermédiaire de TelOne, cherche à se donner les moyens juridiques de surveiller le Réseau. Nous reconnaissons que la lutte contre les contenus illégaux sur le Net - incitation à la haine raciale, images pédophiles, etc. - est justifiée. En revanche, il est essentiel que cette lutte ne se fasse pas au détriment du droit des internautes à s'exprimer librement. Or, nous estimons que la formulation actuelle du contrat proposé par l'opérateur d'Etat ouvre la voie à des dérives liberticides", a déclaré l'organisation.
Le contrat stipule que les FAI "doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher que les messages répréhensibles, obscènes, non autorisés (…), qui enfreignent les lois du Zimbabwe, soient diffusés sur le Réseau". Il demande donc aux FAI de surveiller l'ensemble du trafic Internet, notamment les e-mails, afin de repérer les contenus illégaux. D'une part, une telle surveillance est impossible techniquement et fait donc peser sur les FAI une responsabilité qu'ils ne peuvent assumer. D'autre part, il est demandé à des prestataires techniques du Net de juger eux-mêmes de la légalité des messages qu'ils transmettent, sans contrôle judiciaire. Censurer la Toile devrait pourtant être la prérogative exclusive d'un juge.
Ensuite, le texte indique que les FAI devront permettre à TelOne et au gouvernement de repérer l'origine des messages nuisibles. Cette procédure, parfois justifiée dans le cadre d'enquêtes judiciaires, doit être encadrée par des garde-fous très stricts, pour éviter qu'elle n'empiète sur le principe de confidentialité des correspondances privées. Or actuellement, au Zimbabwe, aucune loi ne définit les modalités d'interception des communications, ni dans quels cas des informations personnelles sur un internaute peuvent être requises par les autorités. La Cour suprême a jugé anticonstitutionnel, début mars 2004, le Post and Telecommunications Act (PTC), qui donnait des pouvoirs exorbitants au gouvernement pour surveiller les communications téléphoniques et électroniques. Aucune loi ne garantissant correctement la confidentialité des informations circulant sur Internet, il est donc dangereux que les FAI soient liés par un contrat aussi imprécis que celui qui leur est proposé par TelOne.
Pour rappel, le Zimbabwe occupe la 141e position (sur 166) dans le classement de la liberté de la presse réalisé par Reporters sans frontières. Le président Robert Mugabe est considéré par l'organisation comme un prédateur de la liberté de la presse.
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