Les deux journalistes d'Al-Chourouk mettent un terme à leur grève de la faim

Reporters sans frontières est soulagée de la décision prise par Slim Boukhdir et Shéhérazade Akacha, journalistes au quotidien progouvernemental Al-Chourouk, de mettre un terme à leur grève de la faim, entamée respectivement les 4 et 19 avril 2006. “Nous accueillons cette nouvelle avec soulagement car nous étions inquiets pour la santé des deux journalistes. Slim Boukhdir souffre de graves problèmes cardiaques et respiratoires et a perdu 15 kilos en 35 jours. Mais nous regrettons que les autorités tunisiennes continuent de harceler les professionnels des médias et les militants des droits de l'homme”, a souligné Reporters sans frontières. Les deux journalistes avaient entamé leur grève de la faim pour protester contre le licenciement abusif dont ils avaient été victimes. Contacté par Reporters sans frontières, Slim Boukhdir a affirmé faire face à de gros problèmes financiers suite à la suspension de son salaire en février 2006 : "Aujourd'hui, après avoir connu la faim comme mode de protestation, je découvre la faim par obligation, n'ayant plus assez d'argent pour nourrir ma famille, payer mes factures et acheter de la nourriture ainsi que les médicaments dont j'ai besoin. J'accepte cette situation même si c'est intolérable, mais je veux rester un journaliste libre et garder ma noblesse." Reporters sans frontières rappelle que le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali est l'un des 38 prédateurs de la liberté de la presse dans le monde. -------------------------------------------------------------------------- 20.04.2006 Une deuxième journaliste d'Al-Chourouk en grève de la faim Shéhérazade Akacha, journaliste au quotidien progouvernemental Al-Chourouk, a entamé une grève de la faim le 19 avril 2006, en signe de protestation au licenciement abusif dont elle a été victime. La journaliste avait subi un interrogatoire et de fortes pressions de la part de sa direction après avoir refusé de se faire "dicter" un article dans un supplément du Chourouk paru le 7 novembre 2005. La publication du texte de l'interrogatoire sur le site Internet tunisnews.net a, par la suite, conduit à son licenciement. "Je demande le droit d'accomplir librement et dignement mon devoir de journaliste et de transmettre des informations neutres sans interventions extérieures. Je voudrais également mettre fin au harcèlement dont je suis victime quotidiennement", a-t-elle déclaré à Reporters sans frontières. Par ailleurs, le journaliste Slim Boukhdir poursuit sa grève de la faim depuis plus de quinze jours. Il a déjà perdu 11 kilos et souffre de graves problèmes cardiaques. Contacté par Reporters sans frontières, Slim Boukhdir a affirmé être déterminé à aller jusqu'au bout de ses revendications. "Aujourd'hui je n'ai pas d'autres moyens pour m'exprimer. Je ne demande qu'à récupérer mon passeport et mon salaire ainsi que mon droit de circuler librement sans être harcelé par les services de police", a-t-il déclaré. -------------------------------------------------------------------------- 11.04.2006 Un journaliste et un cyberdissident en grève de la faim Reporters sans frontières est inquiète de l'état de santé du journaliste tunisien Slim Boukhdir, en grève de la faim depuis le 4 avril 2006 et de l'avocat Mohammed Abbou, en grève de la faim depuis le 11 mars 2006. L'organisation appelle les autorités tunisiennes à prendre en considération les revendications des deux hommes. "Quatre mois après le Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI), les pressions et menaces contre les journalistes et cyberdissidents n'ont pas cessé. Le cas de Slim Boukhdir illustre à lui seul cette situation : pour avoir publié des articles, son passeport a été confisqué et son salaire gelé. Il est inacceptable que la grève de la faim constitue le seul recours possible pour les journalistes réprimés parce qu'ils ont tenté de s'exprimer librement", a déclaré Reporters sans frontières. "Nous tenons également a rappeler que le président Zine el Abidine Ben Ali qui a grâcié plus de 80 prisonniers politiques le 25 février 2006, est resté sourd aux revendications des organisations internationales de défense des droits de l'homme et de la société civile tunisienne concernant la libération de Mohammed Abbou, emprisonné depuis plus d'un an", a ajouté l'organisation. Journaliste au quotidien progouvernemental Al-Chourouk et correspondant à Tunis du site Internet de la chaîne de télévision satellite Al-Arabiya, Slim Boukhdir aurait critiqué les autorités tunisiennes dans des articles parus sur alarabiya.net. Il a notamment publié des déclarations des membres du mouvement des "grévistes de la faim du 18 octobre" et des responsables de partis politiques non reconnus en Tunisie. Il a également commenté la situation des prisonniers politiques dans le pays, en insistant sur le cas de Mohammed Abbou. Contacté par Reporters sans frontières, Slim Boukhdir a déclaré avoir été mis au ban de son quotidien, aucun de ses articles n'ayant été publié depuis novembre 2005. "Mon salaire est gelé depuis février 2006, mais on refuse de me signifier officiellement mon licenciement. On me refuse également l'attribution d'une carte de presse. Aujourd'hui, je demande le droit à la liberté d'expression et au travail", a-t-il expliqué. Mohammed Abbou, lui, a entamé sa grève de la faim le 11 mars 2006 pour protester contres les conditions de sa détention qui se sont détériorées depuis le 2 mars 2006, date d'un rassemblement devant la prison de Kef, où il est détenu. Ce jour-là, son épouse, Samia Abbou était parvenue à manifester quelques instants, accompagnée de quatre de ses avocats. Le petit groupe avait brandi des portraits de l'avocat en scandant son nom. Leur voiture avait été arrêtée une quinzaine de fois par la police sur la route menant de Tunis au centre pénitentiaire. D'autres militants des droits de l'homme qui cherchaient à rejoindre le rassemblement avaient été forcés de rebrousser chemin. Interrogée par Reporters sans frontières, Samia Abbou a déclaré que son mari avait beaucoup maigri et que son état de santé était inquiétant. Mohammed Abbou, surnommé « l'avocat de la liberté » est emprisonné depuis le 1er mars 2005. Il a été condamné, le 29 avril 2005, à trois ans et six mois de prison, à l'issue d'un simulacre de procès. Sa peine a été confirmée en appel deux mois plus tard. L'avocat était jugé dans le cadre de deux affaires. Dans le premier dossier, il a été condamné à deux ans de prison pour la prétendue agression de l'une de ses consoeurs, en 2002, sans qu'aucune preuve ne soit venue étayer cette accusation. Dans un deuxième dossier, Mohammed Abbou a été condamné à un an et demi de prison pour la publication sur Internet d'un article dans lequel il comparait les tortures infligées en Tunisie à des prisonniers politiques aux exactions de soldats américains à Abou Ghraib.
Publié le
Updated on 20.01.2016