Samedi 6 février 2016, une équipe de la
BBC a été arrêtée dans le district d'Abim au Nord du pays et retenue plusieurs heures au poste de police pour avoir filmé, depuis la route, l'enceinte d'un hôpital public.
Catherine Byaruhanga la correspondante de la
BBC en Ouganda, son cameraman
Kelvin Brown et un journaliste local qui leur servait de fixeur,
Sam Lawino ont été sommés par la police d'effacer leurs images avant d’être arrêtés pour avoir refusé d’obtempérer. Selon le commissaire local, joint par RSF, les reporters ne disposaient pas de l'autorisation nécessaire pour filmer des infrastructures de santé et se seraient fait passer pour des agents du ministère de la santé. Ils n'ont dû leur libération, quatre heures plus tard, qu'à l'intervention personnelle du Directeur national de la police, le général Kale Kayihura qui avait été alerté par plusieurs journalistes.
Cet hôpital s’était déjà trouvé au centre d’une polémique quelques mois plus tôt lorsqu'un candidat à la présidentielle, le docteur Besigye, avait visité les lieux accompagné de journalistes et recueilli des témoignages sur le délabrement de cet établissement qui, aux dires d’une infirmière, n'avait pas vu un médecin depuis six ans. Ce
reportage diffusé sur
Nation Television (NTV), avait à l'époque valu à ce média une acerbe riposte de la part du président Museveni et déclenché l'interdiction par le ministère de la santé et la commission électorale pour tout candidat à la présidentielle de se rendre dans des structures de santé.
"Ce type d'arrestation et d'intimidation est totalement intolérable dans un pays qui se dit attaché à la démocratie, déclare Reporters sans frontières.
Ce qui est arrivé à l'équipe de la BBC n'est qu'un exemple parmi des dizaines des menaces et des intimidations dont font l'objet les journalistes ougandais, et ce plus encore depuis le début de la campagne présidentielle. Nous demandons aux autorités ougandaises de cesser leur campagne de contrôle de l'information et d'intimidation envers les journalistes afin de permettre la tenue d'élections transparentes et apaisées pour tout le peuple ougandais".
Ces arrestations ou intimidations sont malheureusement devenues courantes en Ouganda et s'intensifient depuis l'ouverture de la campagne présidentielle en novembre 2015. Selon Robert Sempala du
Réseau des droits de l'homme pour les journalistes, depuis octobre 2015, plus de 40 journalistes ont été arrêtés, battus, empêchés de travailler ou privés de leur matériel par les forces de l'ordre. L’ONG américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch a publié en janvier 2016,
un rapport dénoncant les menaces dont font l’objet les journalistes et l’auto-censure que cela engendre chez nombre d’entre eux.
L'Ouganda occupe la 97ème place sur 180 pays au
Classement 2015 établi par RSF.
Photo : Catherine Byaruhanga © BBC