Deux jours après l'attaque des locaux du groupe de presse Himal Media à Katmandou, Reporters sans frontières s'inquiète vivement de la vague d'attaques contre des médias et dénonce l'impunité dans laquelle agissent les militants maoïstes.
"Le Premier Ministre, Prachanda, doit tenir sa promesse et lancer une enquête afin que les coupables soit punis. Les menaces et les agressions ne cessent de croître envers les médias. Or, la protection de la liberté de la presse, garantie par la nouvelle constitution, est un élément primordial pour assurer l'instauration d'une démocratie digne de ce nom dans le pays", a déclaré l'organisation.
Le 23 décembre 2008, de jeunes activistes membres de la Youth Force (YF), affiliée au CPN-UML (Communist Party of Nepal- Unified Marxist Leninist), un des partis au pouvoir, ont mis à sac les locaux du journal, Ankush, dans la ville de Birjgunj, à la frontière Est du pays, et ont brûlé plus de 2500 exemplaires du quotidien. Selon Bijaya Bhandari, directeur d'Ankush, les membres de la YF ont déclaré que "ce journal mentionnait sans distinction évidente les deux acronymes de leur parti". Il s'agit du second incident qu'Ankush subit cette année. Ses locaux avaient déjà été vandalisés le 29 août 2008.
Par ailleurs, dans un article paru le 22 décembre, dans le quotidien local Kantipur Daily, le président de la redouté Young Communist League (YCL) du district de Bhaktapur (à l'est de la vallée Katmandou), affiliée au Parti maoïste, a averti que ses membres "comptaient maintenant cibler les publications basées à Bhaktapur".
Des membres de la All Nepal Communications, Printing and Publications Workers Union (ANCPPWU), affiliée aux maoïstes, ont également menacé les employés d'une société de distribution de plusieurs publications au Népal (l'ACPA), suite à une plainte que cette dernière a déposé à la cour suprême pour dénoncer l'ANCPPWU, comme association "frauduleuse". L'ACPA distribue notamment les quotidiens très populaires The Himalayan Times et l'Annapurna Post.
En guise de réponse, la Fédération des journalistes népalais (FNJ) a organisé une manifestation, le 23 décembre, pour protester contre les multiples attaques dont les médias privés sont victimes.
Une alliance des médias népalais (The Media Society and Editors Alliance), à déclaré dans un communiqué de presse : "nous percevons ces différentes attaques contre les médias comme une sérieuse menace à la liberté de la presse, à la démocratie et au pluralisme dans ce pays. Il est très ironique que ces attaques soient perpétrées par des groupes affiliés à un parti qui a gagné les élections et qui dirige le gouvernement".
Pour dénoncer la situation, les rédacteurs en chefs des principaux médias privés ont lancé un programme spécial de protestation dans leurs publications. Les journaux ont, par exemple, paru avec une page blanche en guise d'éditorial.
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22/12/08
Les locaux du groupe Himal Media de nouveau attaqués par des militants maoïstes
Reporters sans frontières est vivement préoccupée par la nouvelle attaque de partisans maoïstes, le 21 décembre 2008, contre les locaux du groupe de presse Himal Media, à Katmandou. Le lendemain, les policiers sont intervenus violemment, blessant une douzaine de journalistes, dans une manifestation organisée par la Fédération des journalistes népalais (FNJ), pour protester contre l'attaque.
"Nous appelons le gouvernement à porter une attention particulière à la sauvegarde de la liberté de la presse. Après la récente vague d'attaques contre les médias, aucune mesure n'a été prise par le Parti maoïste au pouvoir pour punir les coupables. Le gouvernement doit garantir la liberté pour toutes les voix d'être entendues, réagir en sanctionnant les responsables, et ne pas laisser agir ses militants en toute impunité", a déclaré Reporters sans frontières.
Le 21 décembre 2008, une cinquantaine de partisans du Parti maoïste, ont vandalisé les locaux d'Himal Media et ont blessé une douzaine de personnes, dont le directeur du groupe de presse, Ashutosh Tiwari, et le rédacteur en chef de l'hebdomadaire en anglais Nepali Times, Kunda Dixit.
L'assaut résulterait de la publication d'un article, dans le bimensuel en népali, Himal Khabapatrika, et dans le Nepali Times, critiquant le "comportement extrémiste" de certains cadres du parti interférant dans des intérêts commerciaux et menaçant les médias.
Selon un employé du groupe, les agresseurs sont entrés de force dans les locaux et ont frappé le personnel. Ils ont déclaré que "tout pouvait arriver si l'un des journaux du groupe publiait de nouveau des informations anti-maoïstes".
Kunda Dixit, interrogé après l'attaque a déclaré :"Ces personnes semblent être des expertes en arts martiaux. Ils ont subi un entraînement militaire. Il ne s'agit plus d'une simple attaque contre Himal Media mais contre la démocratie et les médias en particulier, que les maoïstes font tout pour contrôler."
Le 16 novembre 2008, des cadres maoïstes avaient déjà attaqué les entrepôts de distribution du groupe de presse Himal Media dans la capitale. Ils avaient vandalisé quelques équipements et brûlé plus de mille exemplaires d'Himal Khabarpatrika devant les locaux.
Le premier Ministre népalais, Pushpa Kamal Dahal, également nommé Prachanda, a promis qu'une enquête serait lancée et que les coupables seraient punis. Interrogé par Reporters sans frontières, l'ancien ministre des finances, Dr Devendraraj Pandey, aurait déclaré que les maoïstes n'ont aucune politique d'attaque contre les médias et que des "agents immoraux" ont "infiltré" le Parti maoïstes. Il a exprimé sa tristesse à propos de l'accident et a appelé l'opinion à combattre contre ces "infiltrés".
Voir la vidéo de Nepal News montrant les dommages causés par l'attaque des locaux d'Himal Media et une interview de Kunda Dixit :
http://www.youtube.com/watch?v=Os9k2GToGhY&eurl=http://www.nepalnews.com/archive/2008/dec/dec21/news06.php