L'enquête sur la mort mystérieuse de Vassili Grodnikov n'aura finalement pas lieu

Reporters sans frontières se déclare particulièrement inquiète après l'annonce, le 14 décembre 2005, par le procureur de la ville de Minsk, Dmitry Kirilchik, de la fermeture de l'enquête concernant la mort du journaliste de Narodnaya Volya, Vassili Grodnikov. L'affaire Grodnikov avait été classée une première fois le 28 novembre, les enquêteurs privilégiant la thèse de la mort accidentelle en raison de l'absence d'effractions dans l'appartement de la victime. Le 29 novembre, l'enquête avait finalement été rouverte. Reporters sans frontières est donc particulièrement choquée de l'attitude des autorités judiciaires dans cette affaire et craint que les circonstances exactes du décès de Vassili Grodnikov ne soient jamais connues. L'organisation reste vigilante et continue d'exiger une enquête criminelle concernant la mort du journaliste, compte tenu d'un certain nombre d'éléments accréditant la thèse de l'assassinat pour des raisons professionnelles. ------ 7 décembre 2005 Réouverture du dossier Grodnikov : Reporters sans frontières espère des résultats rapides Le 29 novembre 2005, l'inspecteur Dmitry Kirilchik a annoncé la réouverture de l'enquête concernant la mort du journaliste Vassili Grodnikov. Celle-ci devrait durer jusqu'au 18 décembre et pourrait se poursuivre après la date prévue. Dmitry Kirilchik avait décidé de clore le dossier Grodnikov le 28 novembre, estimant que la blessure mortelle du journaliste était certainement de nature accidentelle et justifiant sa décision par l'absence de traces d'effraction. Le frère du journaliste, Nikolai Grodnev, avait aussitôt protesté contre cette décision. «Il est étrange que les enquêteurs n'aient trouvé aucune preuve pouvant accréditer la thèse du crime. Vassili est décédé suite à une blessure à la tête causée par un objet contondant. Il y avait 17 tâches de sang à divers endroits de l'appartement. Tout a été photographié. Je ne peux pas croire que mon frère ait parcouru tout l'appartement en se cognant accidentellement la tête à plusieurs reprises et à divers endroits», avait déclaré Nikolai Grodnev à Reporters sans frontières. L'organisation se réjouit de cette décision mais restera particulièrement attentive aux suites données à cette enquête. Reporters sans frontières souhaite toujours que la thèse de l'assassinat pour raisons professionnelles soit sérieusement envisagée et espère que des résultats concrets seront mis en évidence dans les semaines à venir. ------- 30 novembre 2005 Reporters sans frontières déplore la fermeture du dossier Grodnikov lire en russe Dans une lettre adressée au président bélarusse Alexandre Loukachenko, Reporters sans frontières condamne le refus, le 28 novembre, d'ouvrir une enquête criminelle sur la mort du journaliste d'opposition Vassili Grodnikov. Paris, le 30 novembre 2005 Monsieur le Président, Dans une lettre datée du 22 novembre, nous avions fait part au ministre de l'Intérieur de l'importance de l'ouverture d'une enquête criminelle concernant la mort de Vassili Grodnikov, compte tenu d'un certain nombre d'éléments accréditant la thèse de l'assassinat pour des raisons professionnelles. Nous tenons aujourd'hui, à exprimer notre profonde inquiétude après l'annonce, le 28 novembre, par le parquet d'un district de Minsk, du refus d'ouvrir une enquête dans cette affaire. Vassili Grodnikov a été retrouvé mort dans son appartement de la banlieue de Minsk, le 18 octobre 2005. Les enquêteurs ont découvert des taches de sang sur le papier peint, une table cassée et du sang coagulé sur la tête de la victime. L'autopsie a révélé qu'un objet contondant avait causé sa mort. Peu de temps avant son décès, le journaliste travaillait sur le sujet sensible de l'escroquerie d'appartements auprès de personnes âgées vivant seules. De plus, selon l'hebdomadaire indépendant Zhoda, le journaliste avait laissé sur sa table de travail le brouillon d'un article qu'il avait intitulé « Un bureau réservé ou plusieurs questions intransigeantes au président du pays et aux agences sous son contrôle ». Nous craignons de ne jamais connaître les circonstances exactes du décès de Vassili Grodnikov, comme ce fut malheureusement le cas pour deux autres journalistes, Veronika Cherkasova et Dmitri Zavadski. La première avait été assassinée à son domicile de Minsk, le 20 octobre 2004, de plusieurs dizaines de coups de couteau. Depuis l'ouverture de l'enquête, les policiers privilégient la thèse du crime passionnel et du drame familial, au détriment de la piste professionnelle. Dmitri Zavadski a disparu le 7 juillet 2000, à l'aéroport de Minsk. L'enquête sur sa disparition a été close à deux reprises. Les soupçons sur l'implication des autorités dans ce dossier et sur leur volonté de dissimuler la vérité sont toujours d'actualité. Là encore, le silence et l'immobilisme de la justice sont très préoccupants. Ces crimes ne doivent pas rester impunis. Les familles des victimes et les citoyens bélarusses sont en droit de savoir ce qui s'est réellement passé. C'est pourquoi nous vous demandons de ne pas classer l'affaire Vassili Grodnikov sans avoir sérieusement envisagé la thèse de l'assassinat, et d'obtenir enfin des résultats concrets sur les décès suspects de Veronika Cherkasova et Dmitri Zavadski. Confiant dans l'intérêt que vous porterez à notre requête, je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma très haute considération. Robert Ménard, Secrétaire Général
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Updated on 20.01.2016