Le spectre de la loi antiterrorisme plane sur les journalistes turcs

Reporters sans frontières exprime son incompréhension face aux peines encourues par certains journalistes turcs pour avoir seulement exercé leur travail. Depuis l'entrée en vigueur de l’amendement de la loi antiterroriste en 2006, les autorités turques menacent les journalistes avec des peines disproportionnées. Les journalistes publiant des informations sur des procès en cours ou de simples faits d'actualité risquent ainsi de lourdes peines de prison. Tel est le cas du photographe Nurettin Kurt. Photoreporter au quotidien Hürriyet, il est accusé d'avoir pris en photo le colonel E.Y.B, alors entendu dans une enquête sur un possible attentat contre le Premier ministre. Alors que la majorité des médias turcs traitent cette affaire, le photographe risque, pour avoir pris cette photo, trois ans de prison, en vertu de l'article 6-1 de la loi antiterroriste (LAT). Le rédacteur en chef du journal, Hasan Kiliç, est lui aussi menacé pour avoir autorisé la publication de ladite photo. On leur reproche d’avoir "exposé un fonctionnaire, menant un combat antiterroriste, à une organisation terroriste", même si on ignore pour l'heure à quelle "organisation terroriste" le colonel photographié ferait face à cause de cette publication. “Partout ailleurs dans le monde, la publication de cette photo fait partie intégrante du journalisme. Je suis choqué que ceci fasse l’objet d’enquête ici”, a déclaré Nurettin Kurt, au moment de l’enquête L’article 6 alinéa 2 prévoit une peine de trois ans de prison pour « toute diffusion de déclarations et de communiqués émanant d’organisations terroristes» . Quant aux propriétaires et rédacteurs en chef concernés, ils risquent une forte amende. L’article 7 alinéa 2 stipule que « quiconque fait la propagande d’une organisation terroriste sera condamné de un à cinq ans de prison. Si le délit est commis par voie de presse, la sanction peut être augmentée de moitié. Les propriétaires et rédacteurs en chef seront également condamnés à une forte amende ». Reporters sans frontières qualifie de choquante et aberrante la durée de la peine encourue. L'organisation dénonce à nouveau l'application de la loi antiterrorisme et ses articles visant à museler la presse. Lors du dernier classement mondial, la Turquie occupait la 122e position (sur 175 pays recensés).
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Updated on 20.01.2016